141 R - Définition

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La Mikado 141 R fut un type de locomotive à vapeur dit unifiée de la SNCF qui fut largement utilisée sur l'ensemble du réseau français de 1945 à 1974. Cette machine fut également à l'origine de changements dans le travail des cheminots, en rompant l'association locomotive-mécanicien-chauffeur : les équipes de conduite ne sont plus titulaires d'une machine qui leur est attribuée mais peuvent conduire n'importe quelle machine ; on appelle cela la conduite en banalité.

Histoire

Locomotive 141 R 568 en gare de Lons-le-Saunier (Jura) le 1er aout 1996. Cette locomotive tractait des trains touristiques pour le compte de la CITEV
Locomotive 141 R 568 en gare de Lons-le-Saunier (Jura) le 1er aout 1996. Cette locomotive tractait des trains touristiques pour le compte de la CITEV

À la fin de la Seconde Guerre mondiale, le déficit en locomotives et l'incapacité de l'industrie française, en cours de reconstruction, à livrer rapidement un grand nombre de machines neuves imposa diverses commandes aux constructeurs américains et canadiens.

C'est la firme Baldwin Locomotive Works, qui dans l'urgence de l'époque dessina les plans de ces machines, en modifiant pour le réseau français une locomotive qui circulait déjà depuis plusieurs années aux états-unis, la Mikado USRA modèle léger. Les principales adaptations portèrent sur la mise au gabarit SNCF, l'attelage à tendeur avec les tampons, les écrans pare-fumée, le poste de conduite côté gauche, une porte de boîte à fumée à volant de fermeture central puis de type Nord, avec l'échappement Kylchap sur les machines de la seconde tranche. Ce choix technologique qui bousculait le conservatisme industriel ferroviaire français de l'époque, allait se révéler judicieux.

C'est ainsi qu'une commande de 700 locomotives tous services (mixtes) fut passée en février 1945 pour constituer la première tranche : les 141 R 1 à 700. Ce sont les firmes American Locomotive Company à Schenectady (New York), Baldwin Locomotive Works à Philadelphie (Pennsylvanie), et Lima Locomotive Works à Lima (Ohio) qui se chargèrent de la construction. Une fois le financement rendu possible, la seconde tranche, les 141 R 701 à 1340, est commandé auprès des mêmes firmes, secondées par des constructeurs canadiens : Montreal Locomotive Works à Montréal (Québec) et Canadian Locomotive Company à Kingston (Ontario). Ces machines étaient alors majoritairement prévues pour être chauffées au fuel (fuel lourd préchauffé) et non au charbon comme les précédentes. Les 604 machines au fuel assurèrent un meilleur service et furent de ce fait plus sollicitées que celles au charbon.

L'introduction massive de machines chauffées au fuel s'explique également par le fait que dans l'immédiat après-guerre, le charbon de qualité était très demandé et que la SNCF en consommait annuellement 9 millions de tonnes. Le fuel permettait donc des économies de charbon, même si dans de nombreux dépôts il s'agissait d'une véritable révolution. L'autonomie permise par le fuel (700 km au lieu de 400 km) explique aussi l'usage plus intensif des machines. Les vaporistes parlent de "mazoutières" ou de "charbonnières" selon le combustible employé; les machines chauffées au fuel, étaient aussi surnommées "les goudronneuses" par les équipes de conduite.

Après le second conflit mondial, les constructeurs américains qui furent "boostés" par l'effort de guerre, se retrouvèrent à la tête de moyens de production trés modernes. L'organisation des chaînes de montage des locomotives s'apparentaient à ce qu'il se faisait dans l'industrie automobile. C'est ainsi que de juillet 1945 à mai 1946 les 700 141 R de la première tranche ont été construites en onze mois seulement. On peut cependant observer d'importants écarts sur le nombre de machines produites mensuellement. Si le gros de la production démarra vraiment en septembre, il atteindra son point culminant pendant les mois de octobre novembre décembre et janvier, pour ralentir fortement en février et mars, et enfin reprendre jusqu'à mai, soit une moyenne de près de trois locomotives par jour ! A titre de comparaison (toute relative, l'industrie française étant trés affaiblie après la guerre) il aura fallu quatre ans, de juin 1948 à juillet 1952, au constructeur Schneider pour livrer les trente-cinq 241 P à la SNCF.

La première locomotive, la 141 R 1 construite par Lima, sortit des ateliers le 30 juillet 1945. La 141 R 466 fut la première à être débarquée en France le 17 novembre 1945 au port de Marseille. La dernière de la série, la 141 R 1340, sortit des ateliers de la Canadian Locomotive Company en juillet 1947 et fut débarquée le 5 septembre 1947 au port de Cherbourg. Dix-sept locomotives (les 141 R 1220 à 1235 et la 141 R 1241) disparurent en mer lors du naufrage du navire norvégien Belpamela, le 11 avril 1947, pris dans une violente tempête au large de Terre-Neuve. De ce fait, sur les 1340 locomotives commandées intialement, seulement 1323 entrèrent en service sur le réseau français.

Pour la SNCF, ce type de machine constituait une petite révolution : à simple expansion et très évoluées du point de vue constructif, les 141 R 1101 à 1340 furent les seules locomotives à vapeur de la SNCF à être entièrement équipées de roues Boxpok et de roulements à rouleaux sur tous les essieux moteurs et accouplés, ainsi que d'un châssis monobloc quasiment indéformable. Quand aux châssis en barres, et aux coussinets des boîtes d'essieux des 141 R 1 à 1100, ils se révélèrent tout aussi irréprochables, ce qui en firent à la fois des machines performantes et d'un entretien économique. Pour les 141 R 1101 à 1340, le kilométrage maximum parcouru entre deux grandes révisions (levages), fut poussé jusqu'à 230 000 kilomètres. Faciles à conduire, elles offraient un confort relatif mais nouveau aux mécaniciens et aux chauffeurs. Les abris étaient de véritables cabines de conduite fermées, dotées d'un confort et d'une ergonomie jusqu'alors inconnus à la SNCF: conduite et chauffe assises sur des fauteuils avec les appareils de commande à portées de mains, alimentation automatique en charbon grâce au chargeur mécanique stoker, et chauffe au fuel encore plus aisée avec la commande du régulateur de mazout. Elles furent "banalisées" c’est-à-dire non liées à une équipe particulière.

C'est le 19 octobre 1975 que circula la dernière 141 R encore en service à la SNCF, la 141 R 1187 du dépôt de Vénissieux, en assurant un train spécial aller et retour entre Lyon et Veynes. Quatre machines du dépôt de Narbonne furent louées aux chemins de fer grecs de novembre 1973 à avril 1974.

Caractéristiques

  • Simple expansion, 2 cylindres et surchauffe
  • Longueur totale (loco seule) : 14,64 m
  • Surface de la grille : 5,2 m²
  • Diamètre des cylindres : 597 mm
  • Course des pistons : 711 mm
  • Diamètre des roues motrices : 1,65 m
  • Vitesse maximale en service : 100 km/h
  • Poids en charge machine seule : 115,5 t (charbon), 116,25 t (fuel)
  • Tender 30 R, poids en charge : 75 t

Machines préservées

12 locomotives 141 R sont aujourd'hui préservées. Parmi elles, se trouvent en état de marche :

  • 141 R 420, (charbon) basée à Clermont-Ferrand, gérée par la Sté Civile de Conservation de la 141 R 420
  • 141 R 840, (fuel) basée aux Aubrais, gérée par l'"AAATV" : Amicale des Anciens et Amis de la Traction à Vapeur, section Centre/Val de Loire.
  • 141 R 1126, (fuel) propriété de la SNCF, basée à Toulouse, gérée par L'Amicale des Cheminots pour la Préservation de la 141 R 1126
  • 141 R 1199, (fuel) propriété de la SNCF, basée à Nantes, gérée par Loco Vapeur 1199

Deux machines circulent en Suisse : les 141 R 568 (charbon) ex CITEV, et 1244 (fuel). Trois autres y sont stockées en pièces détachées : les 141 R 73 (charbon), 1207 (charbon) et 1332 (fuel) après la faillite de l'entreprise chargée de leur restauration.

Les trois machines restantes, les 141 R 1108 (fuel) propriété de la SNCF, à Breil-sur-Roya, 1187 (fuel) propriété de la SNCF, à la Cité du train de Mulhouse et 1298 (fuel) propriété de la SNCF, à Miramas, sont préservées à l'abri, mais hors d'état de circulation.

Galerie d'images

La 141 R 568

Bibliographie

Les 141R ont fait l'objet de nombreux ouvrages, parmi ceux-ci:

  • Bernard Collardey, André Rasserie, Les 141 R, ces braves américaines, La Vie du rail, Paris, 1982 (réimpr. 1981, 1982), 144 p. (ISBN 2-902 808-08-09)
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