Dans un article publié dans
Nature, les collaborations CMS et LHCb décrivent la première observation d'une désintégration très rare de la particule B0s en deux muons.
Représentation d'un événement candidat pour la désintégration d'un méson B0s en deux muons dans le détecteur LHCb. (Image: LHCb/CERN)
D'après les prédictions du Modèle standard, la théorie qui décrit de la façon la plus satisfaisante le monde des particules, ce processus subatomique rare se produit quatre fois sur un milliard de désintégrations, mais il n'avait jamais été constaté auparavant. L'analyse s'appuie sur des
données (Dans les technologies de l'information (TI), une donnée est une description élémentaire, souvent...) prises auprès du Grand
collisionneur (Un collisionneur est un type d'accélérateur de particules mettant en jeu des faisceaux...) de hadrons (LHC) en 2011 et 2012. Ces données contiennent également des indices d'une désintégration similaire, mais encore plus rare, celle du B0, une particule cousine du B0s, en deux muons.
Représentation d'un événement candidat pour la désintégration d'un méson B0s en deux muons dans le détecteur CMS. (Image: CMS event display/CERN)
Les particules B0s et B0 sont des mésons, autrement dit, des particules subatomiques non élémentaires, instables, constituées d'un quark et d'un antiquark liés ensemble par l'
interaction (Une interaction est un échange d'information, d'affects ou d'énergie entre deux agents au sein...) forte. Ce type de particule n'est produit que dans des collisions à haute
énergie (Dans le sens commun l'énergie désigne tout ce qui permet d'effectuer un travail, fabriquer de la...), soit dans des accélérateurs de particules, soit dans la nature, par exemple dans les rayons cosmiques. Ce résultat aura des conséquences importantes pour la quête d'une
physique (La physique (du grec φυσις, la nature) est étymologiquement la...) au-delà du Modèle standard.
Mis au point au début des années 1970, le Modèle standard est actuellement la meilleure description existante du monde subatomique. Il arrive à expliquer la quasi-totalité des résultats expérimentaux en physique des particules et a prédit avec précision toute une série de phénomènes. Toutefois, il ne permet pas de répondre à certaines questions importantes, par exemple: " qu'est-ce que la
matière (La matière est la substance qui compose tout corps ayant une réalité tangible. Ses...) noire ? " ou " qu'est-il arrivé à l'
antimatière (L'antimatière est l'ensemble des antiparticules des particules composant la matière...) après le
Big Bang (Le Big Bang est l’époque dense et chaude qu’a connu l’univers il y a...)? ". C'est pourquoi les expériences auprès du LHC s'efforcent de trouver des indices d'une " nouvelle " physique, qui permettrait de résoudre certaines de ces énigmes.
Il existe deux stratégies complémentaires pour sonder cette physique dite " au-delà " du Modèle standard, toutes deux utilisées par les expériences du LHC. La stratégie directe, qui consiste à chercher de nouvelles particules prédites par les modèles théoriques qui vont au-delà du Modèle standard, tels que la
supersymétrie (Note : Pour profiter au mieux de cet article, le lecteur devrait avoir de bonnes notions sur...), et la stratégie indirecte, qui consiste à tester le Modèle standard sur les prédictions qu'il fait concernant des désintégrations très rares. Tout écart entre les résultats expérimentaux sur ces processus très rares et les prédictions du Modèle standard serait un indice de nouvelle physique. C'est la démarche adoptée par les expériences CMS et LHCb en étudiant les désintégrations rares des particules B0s et B0.
Les collaborations CMS et LHCb ont d'abord publié leurs résultats propres concernant la désintégration du méson B0s en juillet 2013. Même si ces résultats concordaient parfaitement, ils se trouvaient juste en dessous de la limite statistique de 5 sigmas traditionnellement requise pour qu'on puisse parler d'
observation (L’observation est l’action de suivi attentif des phénomènes, sans volonté de les...). L'analyse combinée dépasse largement cette limite, puisqu'elle atteint 6,2 sigmas. C'est la première fois que CMS et LHCb ont analysé leurs données conjointement.
Cette analyse combinée montre que la probabilité de désintégration du méson B0s en deux muons et la probabilité de désintégration du méson B0 en deux muons sont en accord avec les prédictions du Modèle standard. Jusqu'à présent, ces désintégrations rares n'ont donc pas révélé d'indice de nouvelle physique. Toutefois, les données qui seront recueillies lors des futures exploitations du LHC augmenteront la précision de la mesure concernant le B0s et détermineront si les indices de la désintégration associée du B0 sont confirmés. Ces résultats seront cruciaux pour démêler d'éventuels signes de nouveaux phénomènes sortant du cadre du Modèle standard et permettront de progresser dans la
recherche (La recherche scientifique désigne en premier lieu l’ensemble des actions entreprises en vue...) d'une nouvelle physique.