Sentinelles du Nord

Publié par Isabelle le 20/10/2015 à 12:00
Source: Jean Hamann - Université Laval
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C'est dans l'Arctique que le réchauffement climatique fera sentir le plus rapidement et le plus durement ses effets. Il est donc essentiel que les chercheurs unissent leurs efforts et mettent leur savoir-faire au service des communautés nordiques afin de mieux prévoir les répercussions de ces changements et d'en atténuer les effets négatifs sur ces populations. Voilà le coeur du message livré par les chercheurs de l'Université Laval qui ont participé à la table ronde "L'Arctique, sentinelle du réchauffement climatique", qui s'est tenue au Musée de la civilisation le 7 octobre.


Cette année, l'équipe de Takuvik a mené une mission de quatre mois dans la région de Qikiqtarjuaq au Nunavut. Les travaux ont porté sur des questions qui auront des répercussions directes sur la vie et sur le développement des collectivités nordiques.
Organisée par le Consulat général de France à Québec avec la collaboration des Musées de la civilisation, cette activité s'inscrivait dans le cadre des French Ameri-Can Climate TalkS (FACTS 2015), un des nombreux événements qui précèdent la Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques qui s'ouvrira à Paris à la fin novembre.

D'entrée de jeu, Louis Fortier, professeur au Département de biologie et directeur scientifique du projet ArcticNet, a rappelé la nature du problème. En raison de la hausse du CO2 dans l'atmosphère, la planète se réchauffe et cette hausse est particulièrement prononcée dans l'Arctique. L'une des manifestations les plus évidentes du phénomène est la disparition progressive de la banquise. Sa superficie estivale, qui était d'environ 11 millions de kilomètres carrés jusque dans les années 1960, a diminué de moitié et elle pourrait disparaître complètement d'ici 35 ans. "Une partie de nos travaux consiste à étudier les répercussions de la disparition de la banquise sur les écosystèmes marins qui en dépendent et sur les ressources que les collectivités humaines tirent de ces écosystèmes, a souligné le professeur Fortier. Les Inuits seront touchés au premier chef par ces changements et nous devons les aider à trouver des mesures pour en atténuer les effets négatifs."

De son côté, Michel Allard, professeur au Département de géographie et membre du Centre d'études nordiques, est aux premières loges pour observer les effets du réchauffement climatique sur la terre ferme... qui est d'ailleurs de moins en moins ferme au Nunavik et au Nunavut. En effet, le réchauffement climatique fait fondre une partie du pergélisol - le sol des régions froides gelé en permanence. Les routes, les pistes d'atterrissage, les écoles, les édifices publics et les maisons qui reposent sur ce sol auparavant ferme en subissent les contrecoups. "Lorsque le pergélisol fond, ces infrastructures bougent et subissent des dommages parfois très importants, explique le professeur Allard. Nous développons des techniques originales pour corriger ces problèmes et pour assurer le suivi des rénovations. Notre rôle est de mettre notre expertise au service des décideurs locaux pour les aider à prendre les meilleures décisions dans ce genre de situation."

Marcel Babin, professeur au Département de biologie et directeur de l'Unité mixte internationale Takuvik - un centre qui regroupe des chercheurs du Conseil national de recherche scientifique de France et de l'Université Laval -, a rappelé à quel point la recherche nordique est exigeante sur le plan logistique. La mission menée cette année par une équipe de Takuvik dans la région de Qikiqtarjuaq au Nunavut en témoigne. Cette expédition scientifique, qui s'est déroulée de mars à juillet, a mis à contribution 47 chercheurs français, canadiens et américains qu'il a fallu nourrir et loger pendant 124 jours. "En prévision de cette mission, nous avons dû expédier par avion 2 tonnes de nourriture et 14 tonnes d'équipement. Il a aussi fallu planifier l'équivalent de 1 000 nuitées pour les chercheurs", a souligné le professeur.

Une expédition de cette envergure n'arrive pas dans un village inuit sans s'annoncer. "Nous avons pris soin de rencontrer les responsables inuits pour leur présenter notre projet et pour faire les demandes de permis requis, a précisé le chercheur. Pendant toute la durée du séjour, nous avons participé à des rencontres sociales et sportives avec les résidents du village. Nous avons aussi invité les aînés à venir passer une journée avec nous sur la banquise pour leur expliquer la nature de nos travaux. Nos recherches visent à déterminer si les changements climatiques vont conduire à une hausse ou à une baisse de la productivité des écosystèmes marins arctiques, une question qui aura des répercussions directes sur la vie et sur le développement des collectivités nordiques."

En préambule de la table ronde, le consul général de France à Québec, Nicolas Chibaeff, a souligné le rôle majeur que joue Takuvik dans les efforts concertés du Québec et de la France visant l'avancement des connaissances sur les changements climatiques. "Cette unité mixte internationale est un fleuron du partenariat entre la France et le Québec", a-t-il indiqué. Le premier ministre du Québec, Philippe Couillard, a abondé dans le même sens. "Takuvik est un élément moteur de la collaboration entre le Québec et la France pour les enjeux qui touchent le climat. Le Québec dispose déjà d'une solide expertise en études nordiques et la création de l'Institut nordique du Québec pourrait en faire le centre de la recherche nordique en Amérique du Nord", a-t-il ajouté, tout en rappelant la volonté de son gouvernement d'investir dans la construction de cet institut sur le campus de l'Université Laval.
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