Sophie Lerouge et Réjean Lapointe montrent leur biogel injectable, qui facilite la destruction de tumeurs cancéreuses in vitro. Photo: CRCHUM. Un nouveau biogel injectable s'avère efficace pour livrer des agents anticancer directement dans les tumeurs cancéreuses et les tuer. Cette
technologie (Le mot technologie possède deux acceptions de fait :) conçue par des chercheurs du Centre de recherche du Centre hospitalier de l'
Université de Montréal (L’Université de Montréal est l'un des quatre établissements d'enseignement...) (CRCHUM) a été testée avec succès en laboratoire. Si elle fonctionne chez les patients, cette gélatine
thérapeutique (La thérapeutique (du grec therapeuein, soigner) est la partie de la médecine qui...) pourrait un jour révolutionner les traitements contre plusieurs formes de cancer.
Contrairement au "jello", ce biogel est liquide à température de la pièce et se gélifie à 37 degrés Celsius, la température du
corps humain (Le corps humain est la structure physique d'une personne.). "La force de ce biogel est d'être compatible avec les cellules immunitaires anticancer. Il sert à les encapsuler pour les administrer à l'aide d'une seringue ou d'un cathéter dans la tumeur ou juste à côté. Au lieu d'injecter ces cellules anticancer ou encore des médicaments dans tout le corps à travers la
circulation sanguine (La circulation sanguine est un type de système circulatoire en circuit fermé qui assure...), nous pouvons traiter localement le cancer. Nous espérons que cette approche ciblée va améliorer les traitements d'
immunothérapie (L'immunothérapie est un traitement qui consiste à administrer des substances qui vont...) actuels", explique Réjean Lapointe,
chercheur (Un chercheur (fem. chercheuse) désigne une personne dont le métier consiste à faire de la...) au CRCHUM, professeur à l'
Université (Une université est un établissement d'enseignement supérieur dont l'objectif est la...) de Montréal, et co-auteur d'une étude parue récemment dans la revue
Biomaterials.
Une forme d'immunothérapie consiste à traiter des patients atteints de cancer avec des cellules immunitaires anticancer. C'est ce qu'on appelle la thérapie cellulaire adoptive. Ces cellules, les lymphocytes T, sont produites naturellement par le corps et elles ont la capacité de détruire les cellules cancéreuses. Sauf qu'elles sont généralement trop faibles et trop peu nombreuses pour éradiquer à elles seules le cancer. Il s'agit donc de cultiver des lymphocytes T en laboratoire - souvent les propres cellules du patient - pour les réinjecter ensuite dans le sang du patient. L'immunothérapie a donné des résultats prometteurs dans des cas de cancer avancé. Mais ce n'est pas toujours possible de générer suffisamment de lymphocytes T, sans compter l'effet toxique des doses élevées d'interleukine 2, une hormone ajoutée pour maximiser le traitement. "Avec notre système, nous n'aurons besoin que de quelques dizaines de millions de lymphocytes T au lieu des milliards actuellement nécessaires. Nous pourrons aussi administrer des composés qui vont en quelque sorte réveiller le
système immunitaire (Le système immunitaire d'un organisme est un ensemble coordonné d'éléments de...) pour qu'il lutte contre le cancer", espère Réjean Lapointe.
La recette de ce biogel prometteur a été élaborée par Sophie Lerouge, chercheuse au CRCHUM et professeure au département de génie mécanique à l'École de technologie supérieure. "Il s'agit d'un composé à base de chitosane, un
matériau (Un matériau est une matière d'origine naturelle ou artificielle que l'homme façonne...) biodégradable extrait de la carapace des
crustacés (Les crustacés (Crustacea) sont des arthropodes, c'est-à-dire des animaux dont le corps...), auquel on ajoute des agents gélifiants. La
formulation (La formulation est une activité industrielle consistant à fabriquer des produits...) est liquide à la température de la pièce, ce qui facilite l'
injection (Le mot injection peut avoir plusieurs significations :), mais elle passe rapidement à une structure cohésive et résistante à 37 degrés. Il nous fallait aussi un hydrogel non toxique pour le corps, qui permet une excellente survie et la croissance des cellules encapsulées", résume l'ingénieure. Tout un défi pour l'équipe de Sophie Lerouge, qui a testé de nombreux mélanges avant d'en arriver à ce biogel "intelligent".
Le biogel a été testé avec succès dans plusieurs modèles
in vitro, dont le mélanome et le cancer du rein. " Les lymphocytes T présents dans le gel sont fonctionnels, peuvent proliférer pendant deux à trois semaines, sortir du gel, et tuer des cellules cancéreuses ", explique Réjean Lapointe. La prochaine étape consiste à faire la
démonstration (En mathématiques, une démonstration permet d'établir une proposition à partir...) de l'efficacité de ce biogel chez les animaux et chez l'humain. Si les essais s'avèrent concluants, cette toute nouvelle approche pourrait s'ajouter aux thérapies actuelles contre le cancer d'ici quelques années.
À propos de cette étude
L'étude "
Chitosan thermogels for local expansion and delivery of tumor-specific T lymphocytes towards enhanced cancer immunotherapies" a été publiée en ligne dans la revue
Biomaterials en octobre 2015
. Sophie Lerouge est financée par le Conseil de recherche en sciences naturelles et génie du Canada (CRSNG) et la Chaire de recherche du Canada sur les biomatériaux et implants endovasculaires. Réjean Lapointe est financé par l'Institut de recherche de la Société canadienne du cancer, la Fondation canadienne du rein, le réseau de thérapie cellulaire ThéCell du Fonds de recherche du Québec - Santé (FRQS). Son laboratoire est situé à l'Institut du cancer de Montréal du CRCHUM. Les autres auteurs de cette étude sont Anne Monette, Caroline Ceccaldi et Elias Assaad. Le biogel décrit dans cette étude fait l'objet d'une demande brevet, gérée par la société de valoriation Aligo Innnovation.