Des observations astronomiques anciennes sous un jour nouveau

Publié par Adrien le 30/11/2015 à 00:00
Source: Observatoire de Paris
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Un projet de numérisation de plaques anciennes piloté par une équipe internationale comprenant des chercheurs de l'Institut de mécanique céleste et de calcul des éphémérides de l'Observatoire de Paris permet de réunir une série de données astrométriques d'époque sur le positionnement des satellites de Mars, d'une qualité inégalée. Ce résultat très prometteur, paru dans la revue Astronomy and Astrophysics en octobre 2015, ouvre des perspectives d'études comparées intéressantes, alors qu'en 2016 est attendu le premier catalogue d'objets célestes du satellite Gaia.

À partir d'observations réalisées sur plaques photographiques par Dan Pascu dans la seconde moitié du XXe siècle, une équipe scientifique internationale démontre que l'information sur le positionnement des satellites de Mars issue d'observations anciennes prises au sol pouvait rivaliser avec celle délivrées par des sondes spatiales de la même époque.


Numérisation (négatif) - Centre d'une plaque photographique USNO. La planète Mars apparaît sous un filtre de forme conique avec à gauche, hors filtre, ses deux satellites.
© Observatoire de Paris/IMCCE/IPSA/ORB/Robert et al. 2015.

De la difficulté d'obtenir des données sur les satellites de Mars

Obtenir des observations précises depuis le sol des deux satellites de Mars, Phobos et Deimos, est encore problématique aujourd'hui. Leur faible magnitude apparente et leur orbite très proche de la brillante planète rouge les rendent très difficiles à observer.

Il s'agit pourtant d'une étape indispensable, et ce malgré l'existence de sondes spatiales in situ, pour pouvoir déterminer le mouvement de ces lunes, tant pour l'avenir que pour le passé. Cela permet de valider les différents modèles de formation et d'évolution de ce système.

De plus, les effets de marées présents dans Mars sont directement responsables de l'accélération orbitale de Phobos. Étendre l'analyse du mouvement des deux satellites à des périodes lointaines permet ainsi de mieux caractériser les processus internes à la planète.

En 1971, pour pallier la difficulté associée aux différences de luminosité notamment, Dan Pascu, un astronome américain de l'Observatoire Naval des Etats-Unis développe une technique originale. Il utilise une lunette astronomique à longue focale, avec un système de filtrage en NiChrome (un alliage de Nickel et de Chrome).

Une série de plaques photographiques des satellites de Mars est alors réalisée.

Si ces observations deviennent pour l'époque la référence mondiale en terme de précision astrométrique depuis le sol, elles restent néanmoins limitées par la présence, sur chaque plaque, d'étoiles essentiellement non cataloguées à l'époque.

Ces étoiles ne peuvent donc pas être utilisées en référence, ce qui interdit la mesure de la position de Mars sur la sphère céleste, limitant le positionnement des satellites à des mesures relatives à la planète d'une précision de plusieurs dizaines de kilomètres.

De plus, l'étude de chaque plaque photographique est réalisée manuellement, par des techniques où l'oeil humain intervient régulièrement dans le processus de traitement.

Quarante ans plus tard, les positions des étoiles sont enfin connues avec une précision suffisante, les méthodes numériques et les détections automatiques ont remplacé l'intervention humaine.

Un vaste projet de numérisation de plaques photographiques

Reste que les plaques photographiques sont un support analogique, impropre à une utilisation numérique immédiate.

C'est dans ce cadre que le projet de numérisation de plaques photographiques porté par le réseau européen ESPaCE voit le jour.

Bénéficiant d'un scanner de nouvelle génération de l'Observatoire Royal de Belgique, dont la précision de mesure atteint 0,07 µm, les plaques réalisées à l'USNO par Dan Pascu sont numérisées.

Un processus spécifique est développé pour identifier les différents objets célestes, extraire et corriger les positions mesurées, et enfin produire des données astrométriques d'une qualité inégalée à partir de ce type de support.

La précision de positionnement de la planète et de ses satellites depuis ces observations atteint désormais 20 km, ce qui devient très similaire à la précision obtenue par les sondes spatiales en orbite autour de Mars dans les années 1970.

En effet, la fin de l'année 1971 correspond à la période d'arrivée de la sonde Mariner 9 au voisinage de Mars, et le lancement du programme spatial Viking. Leur précision de positionnement sera alors inférieure à 25 km.

A l'aune du premier catalogue "Gaia"

Au-delà de toute attente, ces résultats novateurs ouvrent la voie à de multiples applications des observations photographiques dans le domaine de la dynamique des objets du système solaire.

Ils obligent à une nouvelle analyse des observations anciennes, d'autant que le satellite européen Gaia devrait fournir dès 2016 un premier catalogue d'étoiles avec une précision au moins cent fois meilleure encore que les catalogues actuels.

A plus long terme, c'est l'ensemble des objets du Système solaire qui devraient être concernés.

Equipe internationale

L'équipe internationale est composée de chercheurs:
- de l'Observatoire de Paris à l'IMCCE (Observatoire de Paris/CNRS/UPMC/Université Lille 1),
- de l'Institut Polytechnique des Sciences Avancées (IPSA),
- du United States Naval Observatory (USNO),
- de l'Université Technique de Berlin (TUB)
- et de l'Observatoire Royal de Belgique (ORB),

Référence

Ce travail de recherche fait l'objet d'une publication dans Astronomy and Astrophysics.A new astrometric measurement and reduction of USNO photographic observations of Phobos and Deimos: 1967-1997, V. Robert, V. Lainey, D. Pascu, A. Pasewaldt, J.-E. Arlot, J.-P. de Cuyper, V. Dehant, W. Thuillot, A&A 582, octobre 2015.

Collaboration

Ce résultat est issu des travaux menés par une équipe internationale dans le cadre du programme FP7-ESPACE financé par le European Community's Seventh Framework Program (FP7/2007-2013) n°263466.
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