Un semi-conducteur supraconducteur à basse température

Publié par Redbran le 02/02/2016 à 12:00
Source et illustrations: CNRS/INP
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Transformer un semi-conducteur bidimensionnel en conducteur ou supraconducteur.

Grâce à une nouvelle technique utilisant la mobilité des ions dans un substrat de verre, des physiciens ont modifié la densité électronique des couches ultraminces d'un semi-conducteur, le disulfure de molybdène. Placé sur le substrat, celui-ci peut être transformé en métal et en supraconducteur à basse température.

Les semi-conducteurs permettent de réaliser des transistors car il est possible de les faire passer d'un état isolant à un état conducteur par la seule application d'un champ électrique extérieur. Si la structure électronique du graphène ne permet pas de réaliser ce type de basculement, un autre matériau bidimensionnel se révèle être le candidat idéal: le disulfure de molybdène, aux propriétés semi-conductrices. Les techniques actuelles de dopage électrostatique ne permettent pas toutefois de créer des densités de charge assez élevées pour induire une transition isolant-conducteur. Une équipe de physiciens de l'IMPMC (UPMC/CNRS/MNHN/IRD) vient d'inventer une nouvelle technique de dopage électrostatique qui met en jeu de très forts champs électrostatiques au niveau d'un échantillon de matériau bidimensionnel placé sur un substrat de verre, provoquant des changements de phases électroniques. Ces chercheurs ont ainsi observé la transition du disulfure de molybdène dans un état conducteur et même, à basse température, dans un état supraconducteur. Cette technique ouvre la voie à la production de conducteurs transparents et à une nouvelle technologie d'électronique sur verre. Ce travail est publié dans la revue Nature Communications. Une demande de brevet a par ailleurs été déposée.

Pour créer un champ électrique très intense dans le disulfure de molybdène, les chercheurs ont eu l'idée clé d'utiliser des ions dans une matrice de verre, plutôt que les électrons des plaques d'un condensateur, comme cela est le cas habituellement. A une température de quelques dizaines de degrés au-dessus de la température ambiante, les ions alcalins présents dans la plupart des verres communs deviennent mobiles et peuvent se déplacer sous l'effet d'un potentiel extérieur. Ce déplacement, de l'ordre de quelques nanomètres seulement, brise la neutralité électrique à la surface du substrat en créant une charge d'espace qui peut être gelée rapidement à la température ambiante. Dans leur expérience, les chercheurs ont déposé des échantillons de 2 à 11 nanomètres d'épaisseur de disulfure de molybdène sur des substrats de verre avec des contacts électriques permettant de mesurer leurs propriétés électroniques. Ils ont ensuite créé une charge d'espace à la surface du substrat de verre sous l'échantillon par la méthode décrite ci-dessus. La charge d'espace ainsi créée peut être jusqu'à deux ordres de grandeur plus forte que dans une configuration de condensateur, provoquant des changements dans les propriétés électroniques de l'échantillon de disulfure de molybdène.

Une transition vers un état métallique a été suivie par une transition supraconductrice à une température de 10 degrés Kelvin dans l'échantillon de 11 nanomètres et de 4 degrés Kelvin dans l'échantillon de 2 nanomètres. Ne comportant aucun risque de dégradation de l'échantillon, cette technique pourra être utilisée pour explorer les propriétés électroniques d'autres matériaux bidimensionnels.


(a) L'échantillon semi-conducteur est placé sur un substrat de verre et muni de contacts électriques. Un potentiel électrique peut être appliqué entre l'échantillon et la surface inférieure du substrat chauffé pour provoquer le déplacement des ions alcalins rendus mobiles par la température. Ce déplacement à la surface du substrat provoque soit un surcroît d'électrons dans l'échantillon bidimensionnel (voir schéma b), soit un déficit (voir schéma c), soit éventuellement un changement de phase électronique (voir schéma d).
Ces changements de phase peuvent être suivis en mesurant la résistance de l'échantillon en fonction de la température. La courbe rouge où la résistance augmente quand la température diminue présente un caractère semi-conducteur, la courbe verte avec la tendance inverse présente un caractère métallique et finalement la courbe bleue où il y a une diminution abrupte à très basse température présente un caractère supraconducteur.
Pour plus d'information voir:
Onset of two-dimensional superconductivity in space charge doped few-layer molybdenum disulfide
J. Biscaras (1), Z. Chen (1), A. Paradisi (1) et A. Shukla (1), Nature Communications (2015)

Note:
(1) Institut de minéralogie, de physique des matériaux et de cosmochimie (IMPMC)
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