EZH2, une nouvelle cible thérapeutique dans le cancer de la surrénale

Publié par Adrien le 11/05/2016 à 00:00
Source: CNRS-INSB
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Le cancer de la surrénale est un des cancers les plus agressifs et pour lequel il n'existe pas de traitement efficace. L'équipe de Pierre Val au laboratoire Génétique, reproduction et développement, identifie une nouvelle altération impliquée dans la progression de ce cancer, qui touche la protéine EZH2. Le ciblage de ce facteur par des molécules pharmacologiques permet de bloquer la multiplication des cellules cancéreuses et d'induire leur mort. Cette étude est publiée dans la revue Human Molecular Genetics.


Figure 1: Coupe de glande surrénale. En rouge, la médulla, en vert, le cortex, en bleu, la capsule conjonctive.
© Pierre Val

Les surrénales sont des glandes endocrines situées aux pôles supérieurs des reins. Elles sont l'organe principal de la réponse au stress et sont constituées de deux tissus. Au centre, la médullosurrénale qui fabrique l'adrénaline et à la périphérie, la corticosurrénale qui fabrique les corticostéroïdes tels que le cortisol (équivalent naturel de la cortisone, anti-inflammatoire fréquemment prescrit). Les tumeurs de la corticosurrénale existent sous deux formes: les tumeurs bénignes qui ne possèdent pas la capacité de disséminer, mais qui sont fréquemment associées à une hyperproduction d'hormones et les tumeurs malignes appelées corticosurrénalomes, qui sont rares mais très agressives et associées à un mauvais pronostic. La prise en charge thérapeutique des patients repose essentiellement sur la chirurgie de la tumeur primaire. Toutefois il n'existe pas de traitement efficace pour les patients qui présentent des métastases et constituent la moitié des malades au moment du diagnostic.

La découverte de nouveaux traitements est donc une priorité pour ce cancer. Des analyses OMICs (génomique, transcriptomique et protéomique) conduites sur des cohortes de patients recrutés à l'échelle européenne, mais également aux Etats-Unis, ont mis en évidence des altérations associées à la survenue de ce cancer.


Figure 2: EZH2, une nouvelle cible thérapeutique dans le cancer de la surrénale. A. Co-expression de Ezh2 et du marqueur de prolifération Ki67 dans un cancer de la surrénale développé dans un modèle de souris transgéniques. B. Effet d'un inhibiteur pharmacologique de EZH2 (GSK126) sur la croissance de cellules de cancer de la surrénale humain (H295R)
© Pierre Val

Grâce à des modèles de souris transgéniques, les chercheurs avaient pu montrer que les deux altérations les plus fréquentes chez les patients, surexpression du facteur de croissance IGF2 et activation constitutive de la voie WNT/bêta-caténine, participaient effectivement au développement tumoral. Toutefois, la combinaison des deux altérations n'induisait que rarement le développement de tumeurs agressives chez ces souris, suggérant que d'autres altérations étaient nécessaires.

Afin d'identifier celles-ci, l'équipe de Pierre Val, en collaboration avec des chercheurs de l'Institut Cochin (J. Bertherat) et de l'université du Michigan (USA) (T. Giordano), a conduit une réanalyse de données OMICs de trois cohortes de patients porteurs de corticosurrénalomes. Les chercheurs ont ainsi pu mettre en évidence une forte surexpression de EZH2 dans les corticosurrénalomes par rapport aux surrénales saines et aux tumeurs bénignes. Cette surexpression est le résultat d'une dérégulation de la voie P53/RB/E2F1 qui conduit à une hyperprolifération et un mauvais pronostic chez les patients. EZH2 est une histone méthyltransférase, une protéine capable de modifier les histones et de verrouiller l'expression de nombreux gènes simultanément. Elle a déjà été impliquée dans la progression de cancers tels que le cancer de la prostate et du sein, dans lesquels elle bloque l'expression de suppresseurs de tumeurs. Des inhibiteurs pharmacologiques ont été développés afin d'inhiber l'activité de EZH2. Les chercheurs démontrent que l'utilisation de ces inhibiteurs sur des cellules de corticosurrénalome humain en culture bloque leur multiplication, leurs capacités de migration et induit la mort cellulaire. De plus, la combinaison de ces inhibiteurs avec le mitotane, l'agent cytostatique systématiquement utilisé dans le traitement du corticosurrénalome, conduit à une inhibition quasi-totale de la croissance cellulaire. Ceci suggère que l'inhibition pharmacologique de EZH2 pourrait présenter un bénéfice thérapeutique dans le traitement du corticosurrénalome.

En conclusion, l'ensemble de ces données a mis en évidence, pour la première fois, le rôle potentiel de l'histone méthyltransférase EZH2 dans le corticosurrénalome et fournit de nouvelles pistes thérapeutiques pour un cancer aujourd'hui incurable.
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