Une expérience menée au Ganil (CNRS/CEA) a mis en évidence la forme sphérique du Krypton-96, remarquable en comparaison de la forme très allongée du Rubidium-97, qui compte seulement un proton de plus. Ce changement de forme radical et soudain donne aux physiciens de précieux indices sur l'
organisation (Une organisation est) et la force de liaison entre les neutrons et protons qui constituent le noyau.
Les noyaux atomiques sont des objets quantiques contenant un nombre fini de protons (Z) et de neutrons (N). La forme du noyau reflète l'organisation
interne (En France, ce nom désigne un médecin, un pharmacien ou un chirurgien-dentiste, à la...) de ses nucléons et évolue en général graduellement en fonction du nombre de protons et de neutrons. En de rares occasions, cette forme change brusquement si le noyau contient un
nucléon (Le terme nucléon désigne de façon générique les composants du noyau...) de plus ou de moins. C'est une de ces rares transitions abruptes de formes qui a été identifiée entre le noyau de Rubidium-97 (37 protons, 60 neutrons), qui présente une forme très allongée, et le noyau de Krypton-96 (36 protons, 60 neutrons), dont la répartition sphérique des nucléons a été déduite lors de cette expérience. L'étude de ces exceptions est essentielle pour déterminer les caractéristiques spécifiques de la
force nucléaire (La force nucléaire est une force qui s'exerce entre nucléons. Elle est responsable de la...) qui assure la cohésion du noyau. Cette transition de forme, actuellement inexpliquée par les modèles théoriques modernes, aidera les physiciens à identifier les composantes clés de la force
nucléaire (Le terme d'énergie nucléaire recouvre deux sens selon le contexte :).
C'est l'association de deux spectromètres à la pointe de la technologie (photo ci-contre), AGATA (
Advanced GAmma-ray Tracking Array) et VAMOS (
VAriable MOde magnetic Spectrometer), au Grand Accélérateur National d'Ions Lourds (Ganil) situé à Caen (France), qui a permis d'obtenir ce résultat en sondant la structure intrinsèque de noyaux qui n'existent pas à l'état naturel sur Terre.
Les spectromètres AGATA et VAMOS installés dans une salle d'expériences du GANIL ©CNRS/CEA/P.Stroppa
Ces noyaux "exotiques", de courte durée de vie, difficiles à atteindre, ont été créés simultanément parmi des centaines d'autres dans la fission nucléaire induite par un faisceau d'ions lourd d'Uranium-238. Le spectre caractéristique de rayonnements gamma du Krypton-96 (l'
énergie (Dans le sens commun l'énergie désigne tout ce qui permet d'effectuer un travail, fabriquer de la...) des
photons (En physique des particules, le photon est la particule élémentaire médiatrice de l'interaction...) qu'il émet en se désexcitant) a permis de déduire la forme sphérique de ce noyau (voir figure ci-dessous).
Spectres caractéristiques d'émission de photons pour l'atome d'Azote (L'azote est un élément chimique de la famille des pnictogènes, de symbole N et de...) (N), la molécule (Une molécule est un assemblage chimique électriquement neutre d'au moins deux atomes, qui...) de di-azote (N2) et les noyaux de 102Mo, 100Zr, 98Sr, 96Kr.Par opposition à l'atome d'azote, le spectre de la molécule de di-azote (N2) dans le domaine des micro-ondes présente une régularité caractéristique d'un mode de rotation de la molécule. Les spectres d'émission gamma mesurés par AGATA pour les noyaux de 102Mo, 100Zr, 98Sr présente une régularité similaire qui reflète une grande déformation de ces noyaux. L'absence de régularité dans le spectre de 96Kr mesurée dans cette expérience met en évidence une transition soudaine de la structure du noyau atomique (Le noyau atomique désigne la région située au centre d'un atome constituée de...) dans cette région et suggère que le 96Kr a une forme sphérique. © J.Dudouet / A.Lemasson / M.Rejmund
Ce résultat a été obtenu lors d'une expérience menée par une collaboration internationale de chercheurs français de l'IPNL, du GANIL et de l'IPHC en collaboration avec les chercheurs des laboratoires français (CSNSM, IPN, LPSC, IRFU), allemands, espagnols, italiens, hongrois, sud-africains et suisses. Ce travail de recherche fait l'objet d'une publication dans la revue
Physical Review Letters.
Contacts chercheurs:
- Jérémie Dudouet, post doctorant à l'IPNL
- Antoine Lemasson, chercheur CNRS au Ganil
- Gilbert Duchêne, chercheur CNRS à l'IPHC