Une musaraigne remet en cause les connaissances sur l'abus d'alcool

Publié par Adrien le 18/08/2008 à 01:01
Source: BE Allemagne numéro 397 (8/08/2008) - Ambassade de France en Allemagne / ADIT - http://www.bulletins-electroniques.com/ ... /55610.htm
Illustration: Allons-Sortir.fr
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Une équipe de chercheurs allemands, luxembourgeois, canadiens, suisses et malais, dirigée par les biologistes Frank Wiens et Annette Zitzmann de l'Université de Bayreuth, vient de mettre en évidence la consommation régulière d'alcool, en conditions naturelles, d'une musaraigne de Malaisie. Cette dernière ne présente pourtant pas de symptômes d'ébriété. Cette première preuve d'une consommation chronique d'alcool chez un mammifère sauvage apporte un nouvel éclairage sur les mécanismes d'adaptation de l'organisme à l'alcool et sur leur évolution.

Le ptilocerque de Low, musaraigne nocturne à la queue en forme de plume, boit chaque nuit de la "bière de palmier". Elle consomme, en effet, le nectar du palmier Eugeissonia tristis, qui présente la particularité de produire un liquide apparenté à la bière grâce à des levures. La teneur maximale en alcool de cette substance atteint 3,8%, le plus haut taux d'alcool jamais mesuré dans un aliment naturel. Le palmier retient cette "bière de nectar" très odorante pendant plusieurs mois dans ses boutons floraux, jusqu'à ce que le pollen soit mûr, vraisemblablement pour favoriser la présence d'insectes pollinisateurs. Cette plante fleurit tout au long de l'année.

Ainsi, la consommation d'alcool du ptilocerque est chronique et elle a vraisemblablement débuté il y a 55 millions d'années. Les chercheurs ont calculé, compte-tenu du poids de la musaraigne (47 grammes) et de la quantité d'alcool consommée chaque nuit, que l'animal devrait être soûl toutes les trois nuits, si son organisme se comportait comme celui d'un être humain. Pourtant, le comportement de cet agile grimpeur ne laisse pas percevoir de signes d'ébriété. Il semble disposer de mécanismes de métabolisation de l'alcool particulièrement efficaces.

La découverte de ces scientifiques ouvre de nouvelles perspectives quant à la compréhension de l'alcoolisme chez l'Homme. Jusqu'ici, les théories sur l'alcoolisme considéraient que les Hommes et leurs ancêtres n'avaient été exposés qu'aux petites quantités d'alcool présentes dans les fruits blets avant la découverte de la brasserie il y a environ 9.000 ans. Cette théorie permettrait d'expliquer que l'alcool ait un effet particulièrement fort sur l'organisme humain. Celui-ci ne se serait pas encore habitué à la consommation d'alcool qui est survenue tardivement dans l'évolution humaine.

Le phénomène observé chez la musaraigne de Malaisie montre qu'il en est tout autrement. En effet, comme l'explique F. Wiens, "les musaraignes consommatrices d'alcool appartiennent aux plus proches parents des primates encore en vie et présentent une écologie et un comportement très semblables à ceux de nos ancêtres qui vivaient il y a 55 millions d'années." Ainsi, la forte consommation d'alcool pourrait être apparue très tôt dans l'évolution des primates.

Le fait que la musaraigne ne soit pas ivre n'exclut cependant pas un effet de la présence - certes faible - d'alcool dans son sang. Au contraire, pour F. Wiens, l'alcool pourrait avoir des effets psychologiques positifs: "la consommation d'alcool chez les musaraignes est le fruit de la sélection naturelle. C'est pourquoi elle devrait avoir au final une utilité pour les animaux. Nous voulons chercher des preuves à cela dans de prochaines études. Nous espérons mieux comprendre par ce biais le comportement de boisson chez l'homme", conclut-il.

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