Découverte de deux "gardes du corps" des télomères

Publié par Michel le 18/12/2009 à 00:00
Source: CNRS
Illustration: Wikipedia
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Dans une cellule normale, les télomères coiffent l'extrémité des chromosomes, tels les embouts des lacets de chaussures. En protégeant ainsi les chromosomes, les télomères garantissent la reproduction correcte de l'ADN. A l'Institut Curie (L'Institut Curie est une fondation, dont les activités principales sont d'une part la...), l'équipe d'Arturo Londoño-Vallejo vient de mettre en évidence le rôle de deux protéines qui protègent les télomères contre la dégradation subie au fil des divisions cellulaires. En l'absence des protéines WRN et POT1, les télomères raccourcissent beaucoup plus vite à chaque division (La division est une loi de composition qui à deux nombres associe le produit du premier par...) cellulaire, accélérant le vieillissement (La notion de vieillissement décrit une ou plusieurs modifications fonctionnelles diminuant...) et augmentant le risque de cancer. Ces résultats sont publiés dans la revue Genes&Development du 15 décembre 2009.


Télomères

Au cœur de nos cellules, les chromosomes sont de minuscules bâtonnets faits d'un enroulement de deux brins d'ADN. Ils portent l'information génétique (La génétique (du grec genno γεννώ = donner naissance) est...) nécessaire au bon fonctionnement de la cellule et à plus grande échelle (La grande échelle, aussi appelée échelle aérienne ou auto échelle, est un...) de l'organisme. Le maintien des chromosomes en bon état fait partie des défis que doit relever la cellule. Et ce défi, elle doit l'assurer à chaque division, quand la cellule duplique son matériel génétique et le sépare en deux parts égales pour donner deux cellules filles.
Comment les chromosomes se protègent-ils de la dégradation au fil des divisions ? Cette découverte a valu le Prix Nobel de médecine 2009 à Carol Greider (Carol W. Greider, né le 15 avril 1961 à San Diego, États-Unis, est une...), Jack Szostak (Jack W. Szostak, né le 9 novembre 1952 à Londres, est un biologiste...) et Elizabeth Blackburn (Elizabeth H. Blackburn, née le 26 novembre 1948 à Hobart en Tasmanie, est une...). Dans les années 80, ces trois biologistes ont en effet montré comment les télomères et la télomérase protègent les chromosomes du vieillissement.

Situés à l'extrémité des chromosomes, les télomères sont constitués de séquences répétées d'ADN. Ils raccourcissent au fil des divisions. "Les télomères sont comme les embouts des lacets de chaussures. Si vous les perdez, les extrémités des lacets commencent à s'effilocher" aime à expliquer Elizabeth Blackburn, qui a d'ailleurs effectué un séjour sabbatique de trois mois en 2007 dans l'équipe d'Arturo Londoño-Vallejo.

La télomérase, dite protéine du vieillissement, empêche quant à elle le rétrécissement des télomères. Mais cette dernière n'est présente que dans les cellules souches adultes et les cellules germinales. Pour les autres, pas de télomérase et le raccourcissement des télomères s'apparente à une horloge biologique. Quand l'heure a sonné, à savoir quand les télomères sont devenus trop courts, la cellule n'est plus capable de se diviser et elle devient sénescente ou elle meurt.

De l'art de bien conserver ses télomères

A chaque division, il est donc primordial de limiter les pertes au niveau des télomères. A l'Institut (Un institut est une organisation permanente créée dans un certain but. C'est...) Curie, l'équipe d'Arturo Londoño-Vallejo vient de mettre à jour le rôle de deux protéines "gardes du corps" assurant leur maintien. Le point de départ de leur recherche (La recherche scientifique désigne en premier lieu l’ensemble des actions entreprises en vue...): la protéine WRN, capable de "dérouler" les deux brins d'ADN pour permettre leur réparation ou réplication. Le dysfonctionnement de cette protéine est à l'origine du syndrome (Un syndrome est un ensemble de signes cliniques et de symptômes qu'un patient est susceptible...) de Werner. Cette maladie rare (Les maladies rares ou maladies orphelines sont des maladies dont la prévalence est faible,...) se caractérise par un vieillissement prématuré associé à une prédisposition aux cancers.

Rappelons que les chromosomes sont formés de deux brins d'ADN enroulés, soit deux lacets. Lors de la réplication de l'ADN, ces deux lacets doivent être séparés et reproduits à l'identique. "Or en l'absence de la protéine WRN, explique Arturo Londoño-Vallejo, l'un des deux lacets reproduits est systématiquement plus court et moins solide."

Si la protéine POT1 vient à manquer elle aussi, alors ce sont les deux lacets qui sont affectés: les télomères des deux brins nouvellement formés sont anormalement courts. Or le raccourcissement des télomères entraîne un vieillissement prématuré des cellules.

"Mais les conséquences de cette absence ne s'arrêtent pas là, ajoute Arturo Londoño-Vallejo, car le raccourcissement des télomères crée un risque d'instabilité du génome et pourrait contribuer à l'apparition des cancers: pour preuve, le risque de cancer est plus élevé chez les personnes âgées et chez les personnes souffrant d'un dysfonctionnement de la télomérase qui développent des cancers plus précocement." Plusieurs études ont également mis en évidence une association directe entre un tel raccourcissement et certains cancers de la vessie, du sein, des bronches, du rein ou des ovaires. D'autres mettent en évidence des anomalies de la protéine POT1 dans certains cancers gastriques.

Ce qui pourrait sembler contradictoire car, d'un côté, ces résultats montrent l'implication du raccourcissement des télomères dans les cancers et, de l'autre, on sait déjà depuis une dizaine d'années que la réactivation de l'activité télomérase joue un rôle dans le processus tumoral.

En fait, les cellules cancéreuses "immortelles" détournent la télomérase pour leur croissance incontrôlée. Mais cette fameuse télomérase n'entrerait en jeu que lorsque les cellules ont déjà subi un certain nombre de dommages, et notamment une diminution excessive de la taille de leurs télomères.

Ainsi, le scénario pourrait être le suivant: en raison de mutations dans son matériel génétique, la cellule tumorales ignore les alarmes extérieures qui la somment d'arrêter de se diviser. Elle continue à proliférer. Ses télomères raccourcissent dramatiquement - éventuellement en raison de la mutation d'une des deux protéines étudiées par les chercheurs de l'Institut Curie. Les erreurs génétiques s'accumulent. La cellule atteint un "point de non-retour" mais au lieu d'entrer en sénescence, réactive la télomérase. Les télomères, bien qu'extrêmement courts, sont conservés envers et contre tout, et les cellules fortement endommagées deviennent immortelles, marque des cellules cancéreuses.

Arturo Londoño-Vallejo conclut que "l'un des défis de la recherche sur les télomères est désormais de définir précisément les liens entre le raccourcissement des télomères, l'instabilité du génome et la transformation tumorale."

Mais les télomères touchent bien d'autres maladies pour lesquelles la prolifération cellulaire ou le vieillissement précoce sont impliqués. Elizabeth Blackburn souligne d'ailleurs dans un entretien accordé à Nobelprize.org peu après l'annonce du Prix Nobel qu'"il est devenu très intéressant d'observer comment évoluent les télomères humains, parce qu'ils semblent réellement refléter notre état de santé général et nos risques pathologiques."
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