Les aveugles et la sensibilité thermique et olfactive

Publié par Isabelle le 17/04/2011 à 00:00
Source: Daniel Baril - Université de Montréal
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Plus d'une quarantaine de travaux de recherche ont été présentés à la 8e Journée scientifique de l'École d'optométrie.
Beaucoup d'études ont été réalisées sur la récupération du cortex visuel au profit de l'audition chez les aveugles, mais jusqu'ici presque rien n'avait été fait sur le développement des autres sens, notamment l'odorat et les sensations thermiques. Des étudiants de l'École d'optométrie de l'Université de Montréal ont donc exploré ces nouveaux domaines de recherche et livré les résultats de leurs travaux à un colloque scientifique tenu le 1er avril.

"Nous savons que le cortex visuel est multimodal, mais cette plasticité n'a été étudiée que pour les perceptions tactiles et auditives, a souligné Hocide Slimani. Aucune étude ne s'est penchée sur la perception de la chaleur et de la douleur."

Selon l'étudiant, les aveugles se servent des différences de chaleur ambiante dans leurs déplacements, de la même façon que les voyants utilisent plus ou moins consciemment la chaleur du soleil pour s'orienter. "Il existe même des livres pour apprendre aux aveugles à cuisiner au moyen de leur perception thermique", nous apprend-il. En partant de ces faits, il a pensé que les sensations thermiques et nociceptives pouvaient présenter chez les non-voyants des caractéristiques plus développées que chez les voyants.

Ses travaux, dirigés par le professeur Maurice Ptito, ont ouvert une porte dans un secteur peu étudié et ont confirmé que les aveugles de naissance ont une sensibilité plus fine à la chaleur et à la douleur, qu'ils peuvent distinguer plus facilement des nuances de température et qu'ils réussissent mieux à localiser une source de chaleur.

"Les seuils de détection de la chaleur et du froid sont beaucoup plus bas chez les aveugles que chez les voyants, ce qui veut dire qu'ils perçoivent des changements de température à des intensités plus faibles, affirme-t-il. Les aveugles ont aussi plus de facilité à situer une source de chaleur. Nos sujets étant droitiers, cette habileté s'est avérée plus forte pour la main droite."

Les mêmes constatations ont été faites pour le seuil de la douleur. Reste à vérifier si ces sensibilités plus vives sont corrélées avec une activation corticale particulière.

Un nez plus fin

Une autre étudiante de Maurice Ptito, Mylène Blanchette, s'est posé la même question que son collègue mais à propos de l'odorat, un monde tout aussi méconnu que celui des sensations thermiques chez les non-voyants.

Selon ce que rapporte la littérature scientifique, les aveugles de naissance sont plus conscients des odeurs grâce à la récupération d'une partie de leur cortex visuel.

"Pour les aveugles, l'odeur est un élément très important de leurs relations avec les autres; cela leur permet d'apprécier les gens autour d'eux et même de discerner leur beauté, signale la chercheuse. Mais on ne sait pas si cette récupération des aires cognitives de haut niveau les aide à mieux situer les odeurs."

Les études sur le sujet sont peu nombreuses et se limitent à tester les différences de perception olfactive entre la gauche et la droite. L'étudiante a conçu un appareil permettant de diffuser des odeurs sous divers angles, y compris de face, afin d'établir si les non-voyants parvenaient mieux que les voyants à en localiser la source.

L'odorat étant un sens peu développé chez l'être humain, le taux de succès n'a été que de 50 % dans les deux groupes de sujets. Malgré le fait que les aveugles accordent davantage d'attention aux odeurs et en aient une conscience plus grande, cela ne semble pas les avantager quant à leurs habiletés olfactives.

Mais Mylène Blanchette ne déclare pas forfait pour autant. Elle attribue ses résultats mitigés aux conditions de l'expérience, qui pouvaient être perturbantes pour les aveugles. Elle compte donc poursuivre ses travaux dans le domaine en s'assurant cette fois que ses sujets seront mieux entrainés et que les contraintes de la mise en situation ne les gêneront pas.

Jeux vidéos et santé oculaire

Geneviève Brassard et Marie-Andrée Morin se sont pour leur part intéressées aux effets des jeux vidéos sur la qualité du film lacrymal. Pour les besoins de la cause, 24 adeptes de ces jeux se sont livrés à leur passion pendant une heure et se sont soumis à diverses mesures d'évaluation: confort, sècheresse et picotements de l'oeil, clarté de la vision, quantité et qualité des larmes, fréquence des clignements, le tout avant et après la séance de jeu.

Sauf pour la quantité de larmes, tous ces éléments ont subi une dégradation. Les clignements sont passés de 23 par minute à moins de 9, une baisse qui peut causer la sècheresse de l'œil. La qualité des larmes a également diminué.

Comme la plupart des amateurs de jeux vidéos jouent pendant plusieurs heures d'affilée, cette activité a un effet non négligeable sur le confort des yeux, concluent les deux étudiantes qui travaillent sous la direction du professeur Etty Bitton.

Cette 8e Journée scientifique était organisée par l'École d'optométrie et le Groupe de recherche en sciences de la vision, qui réunit des chercheurs de diverses facultés de l'UdeM ainsi que de l'École Polytechnique, de l'Université McGill et de l'Université du Québec à Trois-Rivières. Plus d'une quarantaine de travaux de recherche ont été présentés.
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