Surpasser les autres compte plus que réussir seul

Publié par Michel le 14/10/2011 à 12:00
Source: CNRS-INSB
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En étudiant le comportement de personnes jouant à une loterie, des chercheurs du Centre de neuroscience cognitive (CNC, CNRS/Université Claude Bernard Lyon 1) ont mis en évidence que la compétition avec un autre joueur influence le choix des participants de sorte que l'objectif de dépasser les gains de l'autre est parfois plus important que de maximiser leur propre gain. Ces travaux, publiés dans PNAS le 6 septembre 2011, dévoilent, grâce à l'imagerie, les mécanismes cérébraux de cet effet décisionnel.

Lorsque nous prenons une décision, telle que postuler à un emploi, choisir un téléphone ou un nouvel appartement, nous sommes souvent amenés à demander conseil à nos proches. Il nous arrive ainsi de comparer les conséquences que pourraient avoir notre décision à la situation d'autres personnes qui ont été confrontées à faire un choix similaire. Les théories décisionnelles les plus influentes considèrent que nous prenons nos décisions seuls. Pourtant, nous sommes constamment exposés à ces informations de comparaison sociale, qui sont susceptibles d'influencer chacune de nos décisions.

En collaboration avec l'Université du Minnesota, les scientifiques du CNC ont cherché à comprendre si les mécanismes cérébraux de la prise de décision et de l'évaluation de ses conséquences sont différents selon que le contexte est privé ou permet la comparaison sociale. Dans ce but, ils ont utilisé l'imagerie par résonance magnétique (IRM) pour mesurer l'activité cérébrale de personnes effectuant des paris monétaires. La tâche consistait à choisir entre deux loteries (type roue de la fortune) donnant lieu à des gains financiers, mais aussi à des pertes. Dans le contexte "privé", le participant pouvait comparer les gains et les pertes associés à sa décision aux résultats qu'il aurait obtenus s'il avait choisi l'autre loterie. Dans le contexte "social", toujours après avoir pris sa propre décision, le candidat observait les conséquences du choix, identique ou différent, fait par un autre participant, jouant simultanément dans une pièce adjacente.


Figure: Au cours de l'expérience, les candidats étaient amenés à appuyer sur le bouton correspondant à la loterie de leur choix. L'aiguille centrale de la loterie sélectionnée (carré vert) se mettait alors à tourner pendant quelques secondes puis s'arrêtait, affichant ainsi le gain du participant. Dans le contexte privé, le résultat de la loterie non-choisie était également révélé, permettant au joueur de comparer ce qu'il avait gagné avec ce qu'il aurait pu gagner en choisissant l'alternative. Dans le contexte social, le participant pouvait observer ce qu'un autre candidat avait choisi (carré jaune) pour une même paire de loteries et pouvait ainsi comparer ses gains avec ceux de l'autre joueur. L'IRM montre que certaines aires du cerveau sont beaucoup plus activées dans le contexte social que privé. © CNC, Nadège Bault

Les chercheurs ont tout d'abord remarqué que les choix effectués par les participants suivaient un pattern bien particulier: alors qu'ils avaient pour instruction de tenter de gagner le plus d'argent possible, leurs décisions indiquaient qu'ils prenaient des risques dans le but de gagner plus que dans la situation qu'ils étaient ensuite amenés à comparer avec la leur. Lorsqu'ils y parvenaient, le striatum, aire cérébrale appartenant au système de récompense, était plus activé en contexte social qu'en contexte privé pour la même somme d'argent gagnée. Leurs réponses émotionnelles, mesurées grâce à la sudation de la peau, étaient également amplifiée lors de la comparaison sociale.

En outre, au moment du choix, le cortex préfrontal médian, une région cérébrale connue pour traiter les informations de nature sociale, s'activait davantages lors de la situation à deux joueurs. Pourtant, la nature de la décision à prendre était identique dans les deux situations: choisir l'une ou l'autre des deux loteries. Par ailleurs, en contexte social, l'activité du cortex préfrontal médian était corrélée à la réaction du système de récompense, sensible aux différences de gains entre les deux joueurs. Elle prédisait également l'amplitude avec laquelle le participant anticipait les choix de son confrère en tentant de s'y ajuster.

Cette étude montre que dans un environnement social, la perspective de gagner plus qu'autrui peut motiver davantage que la peur de perdre. Et l'interaction de ces deux réseaux cérébraux, l'un impliqué dans le traitement des récompenses, l'autre dans celui du traitement des stimuli sociaux, propose une explication de la dimension compétitive existant au sein de nos interactions financières.


Référence:

Medial prefrontal cortex and striatum mediate the influence of social comparison on the decision process, Nadège Bault, Mateus Joffily, Aldo Rustichini, Giorgio Coricelli, PNAS, Published online before print September 6, 2011, doi: 10.1073/pnas.1100892108.
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