Une étrange créature qui constitue un chaînon manquant

Publié par Michel le 16/03/2013 à 00:00
Source: Université de Montréal - William Raillant-Clark
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Deux spécimens de Harrimania planktophilus, un ver entéropneuste (harrimaniid) moderne. Proboscis – à gauche. Longueur totale d'un animal au repos, déroulé: environ 32 mm. Photo: C. B. Cameron, Université de Montréal
Christopher Cameron du Département de sciences biologiques de l'Université de Montréal et ses collègues ont fait une découverte scientifique d'importance majeure : une étrange créature évoquant un phallus, mise au jour dans le gisement de fossiles des schistes de Burgess du Canada, situé dans le parc national Yoho. Les fossiles ont été trouvés dans une section du gisement vieille de plus de 505 millions d'années.

Leur étude, publiée dans l'édition en ligne de Nature, le 13 mars 2013, confirme que le Spartobranchus tenuis fait partie de la famille du ver à gland, espèce que l'on voit rarement et qui prospère aujourd'hui dans le sable fin et la boue des eaux profondes et peu profondes. Le ver à gland fait lui-même partie des hémichordés, comprenant des espèces marines étroitement reliées aux étoiles de mer et aux oursins actuels. "Contrairement aux animaux dotés d'éléments durs comme des dents, des écailles et des os, ces vers ont un corps mou, alors il est extrêmement rare d'en trouver des fossiles, a affirmé l'auteur Christopher Cameron, de l'Université de Montréal. Notre description du Spartobranchus tenuis, créature jusqu'alors inconnue du monde scientifique, ajoute 200 millions d'années aux registres fossiles des entéropneustes, les faisant remonter jusqu'à la période cambrienne, ce qui change fondamentalement notre compréhension de la biodiversité de cette période."

Depuis la découverte des hémichordés au 19e siècle, les plus grandes questions au sujet de l'évolution de ce groupe étaient centrées sur leurs origines et les relations entre leurs deux principales branches : les entéropneustes et les ptérobranches, incluant les graptolites. "L'un des moments forts de mes recherches universitaires a été de prouver au niveau moléculaire que les entéropneustes et les ptérobranches sont étroitement reliés," a déclaré M. Cameron, spécialiste des questions de taxonomie, d'évolution et de biogéographie des hémichordés.

"Il est incroyable de voir à quel point les Spartobranchus tenuis fossilisés sont similaires aux vers à gland d'aujourd'hui, à l'exception du fait qu'ils formaient aussi des tubes fibreux". Ces tubes constituent le chaînon manquant, qui relie les deux principales familles d'hémichordés. "La radiation explosive des graptolites dans les écosystèmes planctoniques de l'ère paléozoïque est un fait connu seulement en raison de la diversité de leurs tubes. Nos découvertes suggèrent que les tubes ont disparu de la lignée menant aux entéropneustes actuels, mais qu'ils ont évolué chez les graptolites et qu'ils ont été conservés jusqu'à ce jour chez les ptérobranches," a ajouté M. Cameron.

Les hémichordés partagent aussi bien des caractéristiques avec les chordés - un groupe d'animaux qui inclut les humains, le mot hémichordé pouvant d'ailleurs se traduire librement par "une moitié de chordé".


Espèce non décrite d'un ver entéropneuste (ptychodera) moderne. Longueur totale d'un animal au repos, déroulé: environ 88 mm. Photo: C. B. Cameron, Université de Montréal
"Les travaux effectués à mon laboratoire ont démontré que les entéropneustes filtreurs s'alimentent grâce à leur pharynx perforé de fentes branchiales, tout comme les chordés invertébrés", a ajouté M. Cameron. Les Spartobranchus tenuis se nourrissaient probablement de petites particules tirées d'éléments filtrés depuis l'eau de mer. "On en trouve des milliers de spécimens à la carrière Walcott, dans le parc national Yoho, alors il est possible que les Spartobranchus tenuis aient joué un rôle important dans le transfert du carbone de la colonne d'eau aux sédiments dans l'environnement initial des schistes de Burgess", a déclaré M. Cameron.

Une analyse détaillée suggère que les Spartobranchus tenuis avaient un corps flexible, composé d'un proboscis court, d'un collet et d'un étroit tronc allongé se terminant par un appendice bulbeux, qui pourrait avoir servi d'ancre. Les plus grands spécimens complets examinés mesuraient dix centimètres de longueur, leur proboscis comptant pour environ un demi-centimètre. Une grande partie de ces vers était préservée dans des tubes, dont certains étaient subdivisés, suggérant qu'ils servaient d'habitation.

Les autres membres de l'équipe de recherche sur les Spartobranchus tenuis sont Jean-Bernard Caron, du Musée royal de l'Ontario, auteur principal de l'étude, et Simon Conway Morris, de l'Université de Cambridge.
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