Impossible de protéger toute la biodiversité... Néanmoins, les terres cultivées, qui occupent plus d'1 million de km de l'Union européenne, hébergent des écosystèmes et des espèces de grande valeur qu'il est important de préserver. Mais comment surveiller cette
biodiversité agricole à l'échelle européenne, et surtout à quel prix ? Une équipe européenne à laquelle a participé Ilse R. Geijzendorffer de l'
Institut Méditerranéen de Biodiversité et d'Ecologie marine et continentale (IMBE, CNRS / Aix Marseille / Avignon
Université / IRD), propose aujourd'hui un programme de suivi concret et chiffré dans le
Journal of Applied Ecology.
Pour préserver la biodiversité, il existe les parcs naturels. Mais d'autres milieux, comme les terres agricoles, offrent une grande variété d'organismes vivants et d'écosystèmes qu'il serait bon de protéger. Car les pressions existent, comme l'explique Ilse R. Geijzendorffer, écologue à l'Institut Méditerranéen de Biodiversité et d'Ecologie marine et continentale de Aix-Marseille: "Par exemple, si une exploitation intensifie sa production laitière sous la pression du marché en laissant ses vaches à l'étable plutôt que dans les champs, ou si une mesure politique interdit l'utilisation d'un produit
pesticide, la biodiversité sur les terrains agricoles s'en trouvera modifiée". Ainsi, pour évaluer l'impact, négatif ou positif, des différentes méthodes de production et de certaines mesures politiques sur la biodiversité agricole, la seule solution est de mettre en place un suivi.
Les chercheurs des projets "Indicateurs de biodiversité dans les systèmes d'agriculture biologique et à faible niveau d'intrants" (BioBio) et "Construire le
réseau d'
observation de la biodiversité européen" (EU BON) ont donc commencé par identifier un bouquet d'indicateurs susceptibles de révéler l'état de
santé des parcelles. Au total, 23 indicateurs ont été retenus, appartenant à 4 catégories (génétique,
espèce, habitat et gestion agricole) ; pour la catégorie "espèce", on trouve par exemple les plantes à fleurs, les vers de terre, les abeilles et les araignées. "Ces indicateurs sont d'autant plus pertinents qu'ils ont été choisis avec l'
ensemble des acteurs du secteur agricole", souligne Ilse R. Geijzendorffer.
Une fois la méthodologie définie, encore fallait-il que le projet soit acceptable d'un
point de vue budgétaire. Ce qui est le cas ! Les différents scénarios de ce programme de suivi consommeraient entre 0,01% et 0,74% du
budget total de la PAC et entre 0,04% et 2,48% du budget de la PAC alloué aux objectifs environnementaux. "Aujourd'hui, nous faisons des recommandations concrètes et accessibles financièrement. Nous devons désormais convaincre, au niveau national et européen, que ce suivi est indispensable si l'on veut réellement préserver la biodiversité agricole", conclu Ilse R. Geijzendorffe.