Comprendre comment les événements d'hybridation entres espèces proches permettent une évolution rapide de la diversité génétique est une question fondamentale en biologie. Des travaux publiés dans la revue
Nature Genetics permettent de jeter un nouveau regard sur cette question grâce au
séquençage (En biochimie, le séquençage consiste à déterminer l'ordre linéaire des...) du
génome (Le génome est l'ensemble du matériel génétique d'un individu ou d'une...) entier de la cacahuète cultivée qui est issue de l'hybridation entre deux espèces sauvages. Ils permettent également de retracer de manière très précise quand et où la cacahuète cultivée est apparue pour la première fois.
Il est bien connu que les événements d'hybridation/polyploidisation sont accompagnés d'une diversification morphologique rapide qui n'est pas uniquement le résultat de l'addition du patrimoine
génétique (La génétique (du grec genno γεννώ = donner naissance) est...) des deux espèces parentes. L'origine de ces innovations biologiques est une question qui taraude les généticiens, sélectionneurs et botanistes depuis très longtemps. C'est le cas notamment de la cacahuète ou
arachide (L’arachide (Arachis hypogaea) (aussi appelée cacahuète (ou cacahouète en...), qui est une
plante (Les plantes (Plantae Haeckel, 1866) sont des êtres pluricellulaires à la base de la...) hybride (En génétique, l'hybride est le croisement de deux individus de deux variétés,...) issue d'un croisement entre deux espèces sauvages d'arachide et qui montre une grande diversité de taille, de forme et de
couleur (La couleur est la perception subjective qu'a l'œil d'une ou plusieurs fréquences d'ondes...) de grains que l'on n'observe pas chez les plantes parentes.
Figure: A) La cacahuète cultivée, ici par les Caiabi, population autochtone du Brésil, présente une diversité de forme, de taille et de couleur.
B) Photos de fleurs de cacahuètes hybrides générées au laboratoire après croisement entre deux espèces d'arachides sauvages. Après sept générations seulement, trois nouvelles couleurs de fleurs sont apparus spontanément.
© David Bertioli & Fabio de Oliveira Freitas
Dans le cadre d'un projet international, les chercheurs ont réussi à percer les mystères de la cacahuète grâce au déchiffrage de son génome (l'
ensemble (En théorie des ensembles, un ensemble désigne intuitivement une collection...) des chromosomes) qui, de par sa nature polyploide, contient en réalité deux génomes -ou sous-génome- très similaires qui cohabitent. La séquence produite consiste en plus de deux milliards et demi de paires de bases d'ADN organisées en vingt paires de chromosomes, dix paires de chacune des espèces ancestrales. L'étude du génome d'une centaine de variétés cultivées montre que la majorité des différences génétiques entres ces variétés ne sont pas dues aux mutations classiques mais à des échanges de segments d'ADN entre les "sous-génomes" et à l'élimination totale ou délétion d'autres segments. Ces changements se sont produits de différentes manières dans différents types ou variétés d'arachides, générant ainsi une grande
biodiversité (La biodiversité est la diversité naturelle des organismes vivants. Elle s'apprécie...). À l'aide d'hybrides formés au laboratoire entre les espèces ancestrales, les chercheurs ont pu observer ces phénomènes en "
temps (Le temps est un concept développé par l'être humain pour appréhender le...) réel". Après seulement sept générations, trois différentes colorations de fleurs sont apparues spontanément.
Finalement, les chercheurs ont aussi découvert que toutes les variétés de cacahuète moderne sont très probablement issues d'un seul événement d'hybridation qui aurait eu lieu il y a 9400 ans en Amérique du Sud grâce aux migrations d'agriculteurs qui auraient transporté des graines d'un des deux ancêtres de la cacahuète de la Bolivie vers l'Argentine ou l'hybridation a eu lieu avec une
espèce (Dans les sciences du vivant, l’espèce (du latin species, « type »...) locale.
Pour en savoir plus
The genome sequence of segmental allotetraploid peanut Arachis hypogaea.
Bertioli DJ, Jenkins J, Clevenger J, Dudchenko O, Gao D, Seijo G, Leal-Bertioli SCM, Ren L, Farmer AD, Pandey MK, Samoluk SS, Abernathy B, Agarwal G, Ballén-Taborda C, Cameron C, Campbell J, Chavarro C, Chitikineni A, Chu Y, Dash S, El Baidouri M, Guo B, Huang W, Kim KD, Korani W, Lanciano S, Lui CG, Mirouze M, Moretzsohn MC, Pham M, Shin JH, Shirasawa K, Sinharoy S, Sreedasyam A, Weeks NT, Zhang X, Zheng Z, Sun Z, Froenicke L, Aiden EL, Michelmore R, Varshney RK, Holbrook CC, Cannon EKS, Scheffler BE, Grimwood J, Ozias-Akins P, Cannon SB, Jackson SA, Schmutz J.
Nat Genet. 2019 May;51(5):877-884. doi:
10.1038/s41588-019-0405-z. Epub 2019 May 1.