Du Chaos surgit l'Ordre: des physiciens font une découverte déconcertante

Publié par Michel le 06/04/2006 à 00:00
Source: Université de Washington à St Louis (Douglas M. Main)
Illustration: David Kilper / WUSTL
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Selon une étude informatique entreprise par un groupe de physiciens de l'université de Washington à St Louis, il est possible de créer de l'ordre dans un système en y introduisant le désordre.

En travaillant sur un réseau de pendules interconnectés ou "oscillateurs", les chercheurs avaient remarqué que lorsque les divers pendules étaient pilotés par des forces bien ordonnées le système finissait par avoir un comportement chaotique, comme un groupe de nageuses synchronisées un peu ivres. Ce phénomène est déjà en lui-même plutôt étrange, des forces synchrones ne devaient-elles pas conduire à des pendules synchrones ? Mais ce n'est qu'ensuite qu'est apparue la véritable surprise: en introduisant le désordre dans le système (par application de forces aléatoires à chaque oscillateur), le système est repassé dans un état ordonné et synchronisé.

Les travaux des chercheurs sont non seulement difficiles à comprendre pour un non scientifique, mais sont également très déconcertants pour un physicien. Les recherches sur le rôle du désordre dans les systèmes complexes sont encore récentes et loin d'être complètement comprises. Ralph Wessel, professeur de physique à l'université de Washington, espère qu'un jour viendra où lui-même pourra mieux comprendre ces phénomènes.

Les chercheurs pensent que ce modèle pourrait servir hors du domaine de la physique théorique. Les neurones, par exemple, ont été modélisés comme des oscillateurs interconnectés ou "couplés", en raison de la manière dont ils interagissent. Dans le modèle, les oscillateurs accouplés peuvent être pensés comme étant rattaché à leur voisin plus proche, qui de ce fait influence leur mouvement. Les neurones, quant à eux, peuvent montrer une activité électrique répétitive qui peut être influencée par l'activité des neurones voisins.

Bien que l'étude soit un peu une extrapolation, admet Babette K. Dellen, elle peut aider à comprendre des observations auparavant non expliquées. B. Dellen avait d'abord étudié le système dans un contexte neuronal. Brandt en rejoignant le groupe de recherche a été intrigué par le concept de la synchronisation induite par le désordre et a étudié plus profondément le sujet. Finalement, les trois chercheurs ont publié le résultat de leurs travaux.


Wessel, Brandt et B. Dellen
et leurs pendules oscillants

B. Dellen explique que les neurones peuvent montrer une activité synchrone en réponse à un stimulus. Et personne n'a encore proposé une explication convaincante de ce phénomène. Wessel ajoute qu'il est possible que cela n'ait rien à voir avec les neurones et que ce ne soit qu'une propriété des oscillateurs.

Un enfant sur sa balançoire

La similitude essentielle entre le système modélisé et les neurones est qu'ils sont tous les deux "non linéaires", ce qui signifie qu'il n'y a pas de corrélation linéaire, proportionnelle, entre la force appliquée et le déplacement. En d'autres termes, les oscillateurs du modèle peuvent être comparés à un enfant sur une balançoire. Au début, l'enfant se déplacera proportionnellement à la force utilisée pour le pousser: si on le pousse deux fois plus fort, il ira deux fois plus loin. Mais presque tous les systèmes complexes dans la nature, comme le modèle des physiciens, sont non linéaires. Passé une certaine hauteur, une poussée deux fois plus forte n'entraîne plus l'enfant deux fois plus loin. "De la même façon, lorsque vous entendez votre musique préférée deux fois plus fort, vous ne ressentez pas un plaisir double", indique Brandt, en expliquant comment un aspect du cerveau, l'audition, est non linéaire.

D'autres recherches ont déjà prouvé que le désordre pouvait conduire à l'ordre, mais ces études impliquaient souvent de manipuler des paramètres dans les systèmes tels que la longueur variable des pendules. Les travaux des chercheurs sont originaux en ce sens que les variations concernent des forces externes. Leurs résultats pourraient avoir plus de potentialité dans le monde réel, où il est difficile de changer des paramètres internes (pour les neurones, par exemple), mais où il serait relativement simple d'appliquer des actions extérieures.

"Tout ceci est naturellement du domaine de la recherche fondamentale", remarque Brandt. "Mais nous pouvons en conclure que les systèmes complexes... se comportent parfois d'une façon très inattendue, complètement à l'opposé de notre intuition ou de nos prévisions... Il sera intéressant de voir si le mécanisme que nous avons découvert sera un jour d'une quelconque utilité".

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