L'aventure des interfaces graphiques (partie 8)

Publié par jyb le 15/03/2009 à 08:00
Illustration: IBM PC: Marcin Wichary sous licence Creative Commons 2.0
Restez toujours informé: suivez-nous sur Google Actualités (icone ☆)

Depuis le début de cette série d'articles, nous nous sommes intéressés à des laboratoires de recherche et à une petite entreprise. Changement de milieu cette semaine puisque nous allons commencer à parler d'IBM, le numéro un de l'informatique d'entreprise avant de nous intéresser à ce qui est à la fin des années 70 une petite PME: Microsoft.

Il était une fois la plus grande entreprise informatique du monde

Au début des années 80, IBM a déjà une sérieuse réputation dans le monde de l'informatique d'entreprise. Il faut dire que "Big Blue" est le principal fabriquant d'ordinateurs depuis les années 60, essentiellement des gros systèmes qui hébergent des programmes écrits en COBOL. Cependant, à la fin des années 70, l'ordinateur de bureau fait son apparition. Plus petit et moins cher, il peut être dédié à une seule personne qui dispose ainsi d'un outil de travail à temps complet, ce qui n'est pas le cas des grosses machines qui sont partagées entre plusieurs ingénieurs.

En 1981 et après quelques tentatives plus ou moins réussies dans les années 70, IBM débarque dans le monde des micro-ordinateurs et présente sa bombe: l'IBM PC. Qu'apporte le nouvel ordinateur d'IBM ? D'un point de vue technologique, le PC n'apporte à peu près aucune innovation technologique décisive. En réalité, le premier micro-ordinateur présentant une architecture du type du PC date de 1972. Il s'agit du MICRAL, le premier ordinateur construit autour d'un micro-processeur, l'Intel 8008, au lieu de transistors assemblés. Il s'agit d'un ordinateur... français et commandé par l'INRA pour des besoins agricoles !

Si l'IBM PC n'apporte aucune nouveauté technologique, le design de l'ordinateur n'est pas non plus des plus séduisants. Cela a d'ailleurs été pour les équipes d'Apple, alors leader du marché des micro-ordinateurs avec l'Apple II, une bonne surprise. Sans réelle innovation et avec un tel design, Apple ne voyait pas dans le PC un concurrent sérieux. Il se trompait.

La vraie nouveauté de l'IBM PC, c'est la standardisation, la compatibilité. Chaque génération de micro-ordinateurs IBM sera par la suite compatible avec la précédente. Diffusé par la plus grande entreprise du secteur, d'une architecture classique et standardisée, le PC va être un gros succès. Ce succès sera accompagné d'une librairie de logiciels de plus en plus grande. Les éditeurs vont être en effet attirés par la continuité architecturale des PC qui ne les oblige pas à réécrire entièrement un logiciel à chaque changement de modèle. Chez Apple, les Apple II, Lisa et Macintosh sont à l'inverse complètement incompatibles entre eux, cela va avoir des conséquences sur le nombre de logiciels compatibles avec les Macintosh.

Il était une fois une petite PME spécialisée dans le BASIC et les compilateurs

Les débuts de la société Microsoft ne présagent en rien de ce qu'elle deviendra par la suite. Créée par Bill Gates et Paul Allen en 1975, il s'agit tout d'abord d'une société spécialisée dans le langage BASIC. La toute jeune société Microsoft fabrique aussi une carte d'extension pour Apple II afin de rendre ce dernier compatible avec un système d'exploitation courant à l'époque: CP/M, créé par Gary Kildall et édité par Digital Research Inc. Mais à la fin des années 70, Microsoft ne s'intéresse pas aux interfaces graphiques et n'est pas vraiment implanté dans le monde des systèmes d'exploitation. La société de Bill Gates est tout simplement spécialisée dans les compilateurs et divers produits principalement destinés aux programmeurs.


Paul Allen et Bill Gates dans les années 70. Ils sont ici entourés d'ordinateurs
pouvant faire fonctionner des compilateurs du langage BASIC

Lorsque IBM propose son PC, il n'est alors pas question pour l'entreprise de se lancer dans la réalisation d'un système d'exploitation pour cette petite plate-forme. La société se tourne tout d'abord vers Digital Resarch Inc qui domine le marché des systèmes pour micro-ordinateurs avec son CP/M. Cependant, les négociations commerciales engagées entre les deux entreprises échouent et IBM renonce à livrer ses PC avec le système CP/M.

Contrairement à ce que l'on pourrait croire, lorsque IBM se tourne vers Microsoft, Bill Gates n'est pas spécialement intéressé. Il faut dire que les conditions imposées par IBM sont des plus contraignantes: pas de royalties, droit exclusif. Mais voilà, Microsoft n'édite pas de système d'exploitation. La société de Bill Gates va se fournir auprès d'une autre société: SCP. Il va ainsi acheter le droit de modifier et distribuer une version modifiée de QDOS, un système d'exploitation créé par SCP et s'inspirant de CP/M. C'est le résultat de ce portage qui va donner naissance à PC-DOS, la première version de MS-DOS. Du fait de ce contrat de Licence entre Microsoft et SCP, IBM n'a pas pu avoir l'exclusivité sur MS-DOS.

Microsoft se lance dans les logiciels de bureautique

Cependant, si ce contrat est le socle du futur succès de Microsoft, celui-ci n'est pas encore d'actualité au début des années 80. L'IBM PC est alors un micro-ordinateur parmi d'autres et MS-DOS n'est qu'un produit parmi d'autres pour Microsoft. Le vrai déclic va se produire en deux temps. Le premier fut le recrutement par Microsoft de Charles Simonyi, le créateur de l'éditeur de texte Bravo au Xerox PARC ainsi que Richard Brodie, l'un de ses collaborateurs. Au sein de Microsoft, ces deux chercheurs vont créer les premières versions du logiciel Microsoft Word. Le logiciel est tout d'abord disponible pour Xenix, un système "maison" de type UNIX, avant d'être disponible en 1983 pour MS-DOS. Mais il n'est pas encore question de faire un environnement de travail graphique complet.


Microsoft Word pour MS Dos (ici, la version 5.5).
La faible puissance des premiers PC ne permet pas à Microsoft de développer d'outils dotés d'interfaces graphiques dignes de ce nom.

Cette même année 1983 se produit le second et vrai déclic: de plus en plus réputé pour ses outils bureautiques, Microsoft reçoit un prototype du Macintosh d'Apple afin de pouvoir porter Word et Multiplan, l'ancêtre d'Excel, sur cet ordinateur. C'est là que Bill Gates a l'idée de développer un concurrent à l'interface graphique d'Apple. Cependant, les PC de l'époque ne sont pas conçus pour faire fonctionner de tels systèmes et Microsoft va surtout se concentrer à développer ce qui va être un très gros succès: Word et Excel pour Macintosh.

Et Windows ? Microsoft va tout de même entreprendre en 1983 les premiers travaux sur un environnement de travail complètement graphique. Mais, contrairement à Macintosh, Microsoft n'a pas la maîtrise des composants techniques des PC. Ces derniers sont avant tout conçus pour afficher du texte et leur puissance graphique s'en retrouve limitée. Mais nous verrons plus en détail la montée en puissance des environnements Microsoft la semaine prochaine.

Voir aussi les autres parties:

Le Mac a 25 ans, l'aventure des interfaces graphiques (partie 1) lien
L'aventure des interfaces graphiques (partie 2) lien
L'aventure des interfaces graphiques (partie 3) lien
L'aventure des interfaces graphiques (partie 4) lien
L'aventure des interfaces graphiques (partie 5) lien
L'aventure des interfaces graphiques (partie 6) lien
L'aventure des interfaces graphiques (partie 7) lien
L'aventure des interfaces graphiques (partie 9) lien
Page générée en 0.491 seconde(s) - site hébergé chez Contabo
Ce site fait l'objet d'une déclaration à la CNIL sous le numéro de dossier 1037632
A propos - Informations légales | Partenaire: HD-Numérique
Version anglaise | Version allemande | Version espagnole | Version portugaise