L'énigme des Treptichnus de la limite Précambrien-Cambrien résolue

Publié par Michel,
Source: CNRS
Illustrations: © Vannier et al. Geology 2010Autres langues:
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La transition Précambrien-Cambrien (540 millions d'années) est marquée par d'innombrables traces fossiles, présentes sur l'ensemble du globe dont certaines connues sous le nom de Treptichnus. Leur origine était jusqu'alors inconnue. Des chercheurs de Lyon, Hambourg et Varsovie viennent d'élucider le mystère: ces traces fossiles typiques proviennent de vers priapuliens. C'est grâce à des expériences réalisées avec des priapuliens actuels, vivants dans des milieux boueux très pauvres en oxygène, que le décryptage de ces traces énigmatiques a pu être fait. Ces travaux viennent de paraître dans la revue Gelology.

La transition Précambrien-Cambrien datant d'environ 540 millions d'années est marquée par un événement exceptionnel dans l'histoire de la Vie: l'apparition relativement soudaine dans le registre fossile des premiers animaux proches de ceux que nous connaissons dans la nature actuelle et la construction d'écosystèmes complexes.


Treptichnus de Holy Cross Mountains, Pologne (Cambrien supérieur).


Treptichnus Mickwitzia Sandstone, Suède (Cambrien inférieur).

Les traces laissées par les premiers animaux marins sont assez nombreuses dès la fin du Précambrien et témoignent d'un début d'activité animale sur les fonds océaniques (déplacement, recherche de nourriture etc..). Toutefois, les animaux responsables de ces traces restent souvent inconnus ou très hypothétiques. C'est le cas de ceux ayant laissé dans les sédiments marins des réseaux de traces que les paléontologues appellent Treptichnus et qui sont utilisés comme marqueurs de la limite Précambrien-Cambrien car ils sont présents partout dans le monde à cette époque.



Mécanisme de locomotion observé sur des vers priapuliens récents de Suède.
Les traces laissées dans le sédiments son analogues aux Treptichnus du Cambrien,
à ceci près que les Treptichus en seraient les contres empreintes remplies de sédiment.

Des expériences menées avec des vers priapuliens actuels montrent d'étonnantes similitudes avec ces traces fossiles longtemps restées énigmatiques. Ces vers forment un phylum très réduit de moins de 15 espèces vivant encore actuellement. Le groupe était par contre beaucoup plus diversifié et dominant dans l'écosystème marin du Cambrien.

Les expériences ont été réalisées en Suède à la Station Marine de Kristineberg, l'une des rares localités où survivent ces véritables "fossiles vivants". Les traces de leur déplacement sur le sédiment boueux observées en vidéo sont pratiquement identiques aux traces fossiles de la limite Précambrien-Cambrien.


La locomotion des vers priapuliens laisse des traces montrant des changements réguliers de direction (ici 23),
changements de direction typiques de Trepticnhus.

Pour les auteurs, ceci met fin à l'énigme "Treptichnus" et révèle que les vers priapuliens furent parmi les premiers colonisateurs des fonds marins. Leur activité de fouissage relativement superficielle est à mettre en relation avec la recherche de nourriture. En effet, un autre volet de ce projet de recherche, conduit en collaboration avec le Royal Ontario Museum de Toronto, montre que les contenus stomacaux des vers priapuliens des célèbres Schistes de Burgess, d'âge Cambrien moyen, contiennent une grande variété de petits animaux vivants sur le fond marin (mollusques, trilobites, brachiopodes, etc..). Preuve que les priapuliens se déplaçaient pour capturer des proies, preuves directes aussi de l'existence d'une chaine alimentaire déjà complexe.

Plus généralement, les auteurs de cette étude s'intéressent à cette révolution écologique sous plusieurs aspects: les premières colonisations de l'espace marin, l'occupation des niches écologiques, et le fonctionnement des premières chaines alimentaires complexes.


Références:

Priapulid worms: Pioneer horizontal burrowers at the Precambrian-Cambrian boundary, Jean Vannier(1), Ivan Calandra(1, 2), Christian Gaillard(1), and Anna Zylinska(3) GEOLOGY, August 2010, v. 38; no. 8; p. 711-714; doi: 10.1130/G30829.1

Notes:

(1) Paléoenvironnements et Paléobiosphère, (CNRS-INSU, Université de Lyon 1).

(2) Biozentrum Grindel und Zoologisches Museum, Université de Hambourg (Allemagne).

(3) Faculty of Geology, Université de Varsovie (Pologne).
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