Du Big Bang à la mission Planck: Décalage vers le rouge ou redshift

Publié par Publication le 15/11/2013 à 00:00
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Nous poursuivons notre série sur la mission Planck avec le chapitre: Premier pilier du Big Bang, le décalage vers le rouge ou redshift.

Edwin Hubble


Edwin Hubble
Illustration: Western Washington University

Edwin Powell Hubble est né en 1889. Juriste de formation et diplômé de l'Université de Chicago en 1910, il se rend compte qu'il est passionné d'astronomie. Il obtient son doctorat en 1917 et passe alors le plus clair de son temps à l'observation. Il travaille à l'observatoire le plus puissant de l'époque: le télescope du Mont Wilson en Californie. Ce télescope, don de John D. Hooker, se trouve à 1742 mètres d'altitude, a un miroir principal de 2.5 mètres de diamètre, et fut le plus grand télescope du monde jusqu'en 1949, année où le télescope Hale le destitue avec un diamètre de 5 m.


Le télescope du Mont Wilson en Californie.
Illustration: Photograph © Andrew Dunn, 1989 - Wikipedia

Hubble était intrigué par des objets que l'on appelle des nébuleuses, dont la nature n'était pas très bien comprise. En effet, ce sont des objets répertoriés dans le catalogue de Messier, et cette catégorie était très hétérogène, l'on appelait nébuleuse aussi bien les rémanents d'une supernova (comme par exemple la nébuleuse du Crabe), qu'une galaxie (la nébuleuse d'Andromède). A l'époque, l'on ne comprenait pas ces objets. Emmanuel Kant pensait que les nébuleuses, tâches floues vues d'un télescope de l'époque, étaient des univers-îles.

Rappels de spectroscopie


Schéma de la décomposition de la lumière blanche à travers un prisme.
Illustration: Wikimedia Commons

La spectroscopie est l'étude de la lumière émise par une source lumineuse. Il suffit de mettre un prisme sur le trajet de la lumière émise et de l'observer à l'aide d'un goniomètre. Vers la fin du XIXème siècle, l'on savait qu'un élément chimique pouvait être identifié sans équivoque en observant simplement ses raies d'absorption ou d'émission. Par exemple le sodium est connu pour émettre une double raie à 5890.0 et 5895.9 Angström. De même l'on avait répertorié en long et en large les raies de l'hydrogène, observant même une certaine régularité portant des noms tels que: série de Balmer, Paschen, Lymann, etc... Ceci permit d'établir une carte d'identité des atomes et molécules. C'est d'ailleurs de cette façon que l'on a découvert l'hélium en 1868, en identifiant des raies provenant du Soleil jusqu'alors inconnues.

Au début du XXème siècle s'est développée la théorie quantique qui permettait enfin d'expliquer les raies d'absorption et d'émission des atomes. C'est alors que l'on comprit que les électrons se répartissent différemment autour d'un atome, cette répartition différente induit une énergie différente. Lorsque les électrons se réarrangent différemment, la différence d'énergie est alors prélevée, ou restituée au milieu environnant.

Le décalage vers le rouge ou redshift

L'analyse du spectre d'absorption de ces objets montrait alors qu'ils étaient tous décalés vers le rouge (à l'exception de la galaxie d'Andromède). Pourtant les astres que l'on voyait étaient composés des mêmes éléments chimiques. L'interprétation la plus simple est d'ordre cinématique, par analogie avec une sirène d'ambulance qui chante un "la" à 440 Hz, lorsque l'ambulance se rapproche de nous, le son émis semble plus aigu, et lorsque l'ambulance s'éloigne de nous, le son émis semble plus grave. De la même façon, lorsqu'une étoile se rapproche de nous, les radiations émises se trouvent dans des longueurs d'onde plus faibles, donc décalées vers le bleu, et lorsque l'étoile s'éloigne de nous, ces mêmes radiations se trouvent dans des longueurs d'onde plus grandes, donc décalées vers le rouge. La conclusion est donc que toutes les galaxies s'éloignent de nous (exceptée Andromède).


Spectres d'absorptions d'un même composant.
En haut, le composant est immobile par rapport à nous.
Au milieu, le composant s'éloigne de nous, son spectre est décalé vers le rouge (redshift).
En bas, le composant se rapproche de nous, son spectre est décalé vers le bleu (bleushift).
Illustration: http://coolcosmos.ipac.caltech.edu

Pour établir la distance des galaxies, Hubble utilise des étoiles dont on sait relier la luminosité à la période de variation de la luminosité: les Céphéides. C'est comme si l'on mesurait la luminosité d'un phare, plus l'on est près du phare, et plus il est brillant, plus on s'éloigne et plus il sera faiblement lumineux. Cependant, en mer, si nous voyons deux phares de même intensité, nous ne savons pas si nous sommes plus près de l'un ou de l'autre, puisque cela dépend de la luminosité du phare. De la même façon, connaissant la luminosité intrinsèque des Céphéides (grâce à leur période de variation), il suffit de mesurer leur luminosité, ensuite leur rapport donne la distance, puisque l'intensité de la lumière diminue avec le carré de la distance.

La loi de Hubble et l'expansion de l'univers (1929)

Le résultat obtenu est le suivant:


La loi de Hubble
Illustration: imagine.gsfc.nasa.gov

Ces nébuleuses sont donc des objets extragalactiques, puisque leur distance se mesure en méga parsec (en millions d'années-lumière). De plus il existe une relation simple de proportionnalité entre leur décalage vers le rouge et leur distance. Hubble interprète ce décalage comme une vitesse de fuite des galaxies. Donc les galaxies s'éloignent de nous d'autant plus vite que leur distance est élevée. Cela ne fait pas de nous le centre de l'Univers, puisque si on se plaçait sur une autre galaxie, on verrait exactement la même chose.

Interprétation du décalage vers le rouge

L'interprétation de Hubble n'est pas tout à fait exacte. Si nous nous laissons guider par cette interprétation, nous arrivons rapidement à une contradiction. En effet, si la vitesse d'un objet est proportionnelle à sa distance, alors au delà d'une certaine distance, un objet se déplace plus vite que la lumière par rapport à nous, ce qui contredit la théorie de la relativité. L'expansion est en fait une expansion de l'espace lui-même, et non un déplacement des objets. En effet, les équations de Friedmann débouchent sur un facteur d'échelle, qui augmente au cours du temps, c'est l'expansion. Cela veut dire que pour une distance donnée entre deux corps célestes, après une certaine durée, la valeur de ce facteur d'échelle va doubler, ce qui veut dire que la distance entre ces objets aura également doublé.

Si l'on supprime une dimension, alors l'espace est représenté par la membrane d'un ballon de baudruche, dont les galaxies seraient sur la surface du ballon et immobiles (l'on pourrait par exemple faire une marque au feutre, marque représentant une galaxie). A mesure que le ballon gonfle, les galaxies s'éloignent les unes des autres, avec une vitesse proportionnelle à leur distance. Cette expansion de l'espace ne se fait pas à partir d'un point, elle se fait de partout. Dans l'exemple du ballon de baudruche, l'on pourrait penser que le ballon gonfle depuis le centre du ballon. Cependant, c'est une illusion d'optique due à la perspective de la représentation, puisque ce point est en dehors de la membrane du ballon et n'existe pas. (c'est comme le point vers où se rejoignent des lignes parallèles sur une photographie, ce point imaginaire est dû à la projection en 2 dimensions d'un espace en 3 dimensions).

Prochain article à venir sur notre série Planck: Deuxième pilier du Big Bang, la nucléosynthèse primordiale.
Voir notre précédent article: Du Big Bang à la mission Planck: La relativité générale

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