Des nuages blancs, probablement de glace d’ammoniac, photographiés par la caméra JunoCam, lors d’un orage jovien.
© NASA / JPL-Caltech / SwRI / MSSS / Gerald Eichstädt
Une observation a permis de confirmer ce mécanisme de formation d’orages. Elle a été réalisée par une petite caméra de la sonde Juno, appelée caméra SRU et qui au départ était simplement prévue pour positionner le satellite. Elle a détecté, un peu par hasard, la présence d’éclairs du coté nuit de la planète. Des éclairs avaient déjà été détectés sur Jupiter par le passé, mais à des profondeurs où les températures avoisinent 0°C et où l’on peut donc trouver de l’eau liquide. En effet, la présence des trois phases de l'eau (solide, liquide et vapeur) est essentielle à la formation d’éclairs. La nouveauté ici est que certains des éclairs détectés par la caméra SRU proviennent de niveaux où la température est inférieure à -70°C. Seule la présence d’ammoniac peut expliquer l’existence d’un liquide à ces températures - le mélange eau-ammoniac à la base des grêlons - et donc la formation d’éclairs dans cette zone.
Suite à ces découvertes, des chercheurs ont réalisé un modèle de mélange atmosphérique sur Jupiter. Résultat: la présence d’orages et la formation de grêlons d’ammoniaque permettent d’expliquer l’assèchement de l’atmosphère profonde en ammoniac et rendent compte des variations observées par Junoen fonction de la latitude. Mais des questions cruciales subsistent. En particulier: jusqu’où les courants descendants liés à l’évaporation de la grêle d’ammoniaque pénètrent-ils ? Juno devrait poursuivre la mission jusqu’en 2025, et au-delà, la missionJuice de l’ESA pourra permettre de continuer le suivi de ces orages. Mais une autre planète pourrait apporter les clés de la compréhension de ces atmosphères abyssales: il s’agit d’Uranus, qui devrait être l’objet d’une mission commune de la NASA et de l’ESA pour une mise en orbite à l’horizon 2045.
Comparaison à l’échelle d’un cumulo-nimbus sur Terre (à gauche) et d’un nuage à la base d’un orage violent sur Jupiter (à droite). Les températures, altitudes et pressions indiquées font référence à l’atmosphère de Jupiter.
© NASA / JPL-Caltech / SwRI / CNRS.
1 Une fois dissous dans l'eau, l'ammoniac (NH3) donne de l'ammoniaque dont la formule chimique est NH4OH.
Auteur:
Tristan Guillot, chercheur CNRS au laboratoire Lagrange - OCA.
Source: CNRS INSU