Pendesinialessandro a écrit : ↑01/04/2020 - 12:01:45
Hello
Roger Penrose, affirme que seule la mécanique quantique peut rendre compte de la conscience et du libre arbitre. Penrose, aux côtés de l’anesthésiste Stuart Hameroff, défend l’idée que le cerveau est un ordinateur quantique. Selon eux, au cours de son évolution, le cerveau humain serait parvenu à exploiter une propriété fondamentale des systèmes quantiques : la superposition des états quantiques. Cela lui permettrait d’explorer un nombre gigantesque d’hypothèses en un temps limité et expliquerait, on ne sait pas trop comment !, la faculté des mathématiciens à déjouer les complexités du théorème de Gödel. Ces propositions baroques ne reposent toutefois pas sur la moindre donnée de neurobiologie ou de sciences cognitives !
Je ne nie pas qu’il faille expliquer l’intuition du libre arbitre, cette impression que nous partageons tous que notre esprit prend ses décisions en toute liberté et sans contrainte. Cependant, la physique quantique n’est d’aucun secours. La plupart des physiciens s’accordent à penser que le milieu humide et chaud dans lequel s’ébattent nos neurones est incompatible avec le calcul quantique, car celui-ci nécessite des températures extrêmement basses afin d’éviter la dissipation ultrarapide de la cohérence quantique. L’échelle de la femtoseconde (10-15 seconde) qui régit la décohérence des états quantiques est également sans commune mesure avec le temps qu’il nous faut pour prendre conscience d’un aspect du monde extérieur (de l’ordre d’un tiers de seconde). Enfin, même si on découvrait des phénomènes quantiques dans le cerveau, leur caractère strictement imprévisible ne permettrait pas d’expliquer notre conception (même si illusoire) du libre arbitre.
NB -Comme l’a bien montré le philosophe Daniel Dennett, l’aléatoire pur ne confère à nos cerveaux « aucune forme valable de liberté » (any kind of freedom worth having). Souhaitons-nous vraiment que nos corps soient secoués de mouvements aléatoires et incontrôlables engendrés au niveau subatomique, qui rapprocheraient nos décisions des convulsions et des tics des patients souffrant du syndrome de Gilles de La Tourette, ou la fameuse « danse de Saint-Guy » ? Rien n’est plus éloigné de notre conception de la liberté. La maladie de Tourette ne rend pas libre, bien au contraire. Jamais un coup de dés n’engendrera d’esprit libre…Devrions-nous lui donner tort ?
Bien à vous
Bonjour,
Et tout d'abord, un grand merci pour votre réponse. C'est rare !
Mais vous n'avancez aucune PREUVE, seulement des opinions à partir de données justes mais, de nos jours, incomplètes.
Je ne vois pas ce que vient faire les théorèmes d'incomplétude de Kurt Gödel ! Leur démonstration n'est certes pas simples mais il n'est nul besoin d'être un génie pour en comprendre la complexité !
De plus, on met Gödel à toutes les sauces alors que ses théorèmes ne traitent que de la théories des nombres et assimilées.
Ce que démontre Gödel est que le système d'axiomes de la théorie des nombres devrait être en nombre infini pour que cette théorie soit complète. C'est tout !
Reste un problème qui est bel et bien là : La décohérence, principal obstacle à la conception du calculateur quantique, sans même aller jusqu'à évoquer l'ordinateur quantique !
En effet, au problème posé par la décohérence, il faut ajouter le fait qu'un calculateur quantique à n qbits fournit 2 puissance n (2^n) résultats auxquels sont associées des probabilité de vraisemblance. Si un calculateur quantique fonctionne avec 10 qbits seulement, il donne donc 2^10 résultats et on choisit le résultat qui présente la plus haute probabilité. De plus, la somme de ces 2^n probabilités doit être égale à 1. C'est dire combien il est difficile de faire un choix car plusieurs probabilités parmi les plus élevées ont des valeurs très voisines.
Je sais qu'il a été trouvé des correcteurs d'erreurs mais j'ignore comment ils fonctionnent.
Cette décohérence se produit en temps variables dépendant d'un certain environnement et de paramètres qui ne sont pas tous connus. Il est donc prématuré de nier l'existence de phénomènes quantiques à faible durée de vie dans les microtubules. Cela dit, j'avoue n'avoir aucune connaissance dans les neurosciences et me déclare tranquillement incompétent en ce domaine.
Mais je crois personnellement, donc peu de valeur, que Roger Penrose dans ses derniers travaux et sans résoudre le problème, propose des pistes de recherches qui devraient retenir l'attention des spécialistes. L'ennui, et qu'il n'existe peut-être pas de scientifiques à la fois maîtrisant la neurologie et la mécanique quantique et peut-être aussi quelques autres disciplines…
Pour finir, je signale que la théorie de la décohérence est très complexe, je m'en suis aperçu naguère en étudiant l'ouvrage technique du physicien français Roland Omnes intitulé : The 'Interpretation of the Quantum Mechanics" publié par Princeton University Press.
Par exemple, il a fallu créer un nouvel outil mathématique appelé "Calcul pseudo-différentiel" par les mathématiciens et "Analyse micro-locale" par les physiciens.
Alors, phénomènes quantiques dans le cerveau ou non ? En l'état actuel de la Science, personne ne peut se prononcer avec certitude mais il y a quand même des indices qui ont mis Penrose sur la voie et qu'il développe dans son dernier ouvrage que j'ai déjà cité : "Les Ombres de l'esprit".
Pour ce qui concerne les philosophes, je ne vois vraiment pas quel rôle ils y pourraient jouer, même épistémologique, alors qu'ils n'ont pas le bagage suffisant en mathématiques indispensable pour comprendre la théorie de mécanique quantique elle-même très complexe !
C'est Niels Bohr qui affirmait : "Quiconque apprend la mécanique quantique et n'est pas saisi de vertige n'y a rien compris !"
L'immense physicien américain Richard Feynman déclarait : "Personne ne comprend la mécanique quantique". Il voulait dire par là que l'on ne comprend pas ce que signifient vraiment ses équations ! Aussi, alors qu'un jour un de ses étudiants lui demandait la signification d'une équation il répondit : "Shut up and calculate !"
Mathématicien (à la retraite !) je ne peux que tenter de comprendre de quoi il s'agit vraiment, même aidé par un niveau de connaissance assez élevé en mécanique quantique (par la théorie et non par sa vulgarisation qui ne vulgarise rien du tout !).
Ave mes sentiments les plus amicaux.