Depuis, les scientifiques ont compris que la cyanophycine est composée d’un polymère vert naturel que les bactéries utilisent comme une réserve d’azote et d’énergie, et dont les potentielles applications biotechnologiques seraient nombreuses. Malgré des tentatives de production de grandes quantités de cyanophycine en combinant l’enzyme responsable de sa catalysation (la cyanophycine synthétase) avec toutes sortes de biomatériaux, des bactéries E. coli au tabac, les résultats restaient décevants.
La biosynthèse de la cyanophycine rappelle le fonctionnement d’un essuie-glace. Les deux premiers domaines apportent respectivement de l’aspartate (Asp) et de l’arginine (Arg), deux acides aminés riches en azote. Le troisième domaine s’agrippe quant à lui à la chaîne de molécules de cyanophycine au fur et à mesure qu’elle se constitue.
Illustration: Schmeing lab
« Aucun scientifique n’était encore parvenu à comprendre comment les cellules des bactéries pouvaient fixer de l’azote dans la cyanophycine, tout simplement parce que personne n’avait été en mesure d’observer le processus, explique Martin Schmeing, professeur au Département de biochimie de McGill et auteur principal d’un récent article sur le sujet, paru dans Nature Chemical Biology. C’est en effectuant un montage d’images en 3D de l’enzyme en action que nous avons reconstitué le processus. Nous avons alors pu voir comment trois différentes unités structurelles (domaines) s’assemblaient pour produire de la cyanophycine synthétase. C’est un exemple à la fois étonnant et très élégant de biomécanique naturelle. »
Les prochaines étapes de l’étude concernent les autres enzymes interpellés dans le cycle complet de biosynthèse et de dégradation de la cyanophycine. L’observation de ce cycle permettra peut-être aux chercheurs de comprendre comment stimuler des cellules afin qu’elles synthétisent de grandes quantités de cyanophycine et de polymères de la même famille afin de les utiliser dans des processus biotechnologiques verts, comme la création d’agents biodégradables pour adoucir et détartrer l’eau ou la mise au point de nanovésicules sensibles à la chaleur pour la délivrance ciblée de médicaments.
Publication:
« Structures and function of the amino acid polymerase cyanophycin synthetase », par Itai Sharon et coll. a été publié dans dans Nature Chemical Biology. DOI: 10.1038/s41589-021-00854-y
Cette étude a été financée par la Chaire de recherche du Canada, le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada et par le Fonds national suisse de la recherche scientifique.
Source: Université McGill