Peut-on produire de l'hydrogène avec du basalte ?
Publié : 07/02/2019 - 22:35:42
Alain Prinzhofer et Eric Deville décrivent dans leur livre « L’hydrogène naturel. La prochaine révolution énergétique ? » (1) les émissions d’hydrogène présentes à la surface de la Terre. Une des sources probables de cet hydrogène naturel est la réaction de serpentinisation. Cette réaction a lieu lorsque de l’eau entre en contact avec des péridotites.
La thèse de Benjamin Malvoisin « Conditions réductrices associées à la serpentinisation » (2) étudie cette réaction. Elle produit de l’hydrogène par oxydation du Fe2+ contenu dans la roche par l’eau. La thèse montre que deux paramètres contrôlent la cinétique de cette réaction : la température et le pH. Le pH élevé nécessaire à la réaction est créé par la forte teneur en Mg2+ des péridotites. M. Malvoisin a ensuite testé la validité des deux paramètres, température et pH, sur un autre matériau : un laitier sidérurgique. Un laitier mis en contact avec de l’eau à haute température émet du gaz hydrogène. L’eau oxyde le Fe2+ contenu dans le laitier sidérurgique. Le pH élevé nécessaire à la réaction est généré dans ce cas par la forte teneur en Ca2+ du laitier.
Je vous propose d’appliquer la réaction de serpentinisation à une autre source de Fe2+, les basaltes, pour produire de grands volumes d’hydrogène.
Les basaltes sont les roches ignées les plus abondantes à la surface de la Terre, alors que les péridotites sont peu présentes dans la croûte terrestre. La teneur en Fe2+ de ces deux types de roches est similaire (3) mais les basaltes n’ont pas la forte teneur en Mg2+ des péridotites. La concentration en Mg2+ des basaltes ne permet pas à ces roches de réagir au contact de l’eau comme les péridotites. Pour produire de l’hydrogène avec de l’eau et du basalte il faut augmenter le pH par un moyen extérieur.
Pour exploiter le Fe2+ contenu dans les basaltes, la séquence pourrait être la suivante :
- forage vertical pour atteindre une couche souterraine de basalte,
- forage horizontal dans la couche de basalte suivi d’une fracturation hydraulique,
- envoi dans le puits d’un lait de chaux.
Le lait de chaux est la base la moins chère et confère à l’eau en contact avec le basalte un pH de plus de 12 (4). Ce devrait être un pH suffisant pour permettre l’oxydation du Fe2+ de la roche. Les ions OH- apportés par le lait de chaux n’étant pas consommés, l’entretien de la réaction devrait se faire par un ajout régulier d’eau dans le puits.
L’autre paramètre contrôlant la réaction, la température, est déterminé par la profondeur du puits. Si la couche de basalte forée est à plus de 5000 mètres de profondeur, la température de la roche devrait être supérieure à 200°C. Selon la cinétique établie dans la thèse de M. Malvoisin, cette température devrait permettre une vitesse de réaction suffisante d’autant que cette chaleur est fournie gratuitement par la Terre.
Un autre élément pourrait être favorable à l’entretien de la réaction dans le puits : la réaction de serpentinisation transforme l’olivine et le pyroxène contenus dans la roche en serpentine et magnétite. Comme cela est montré dans la thèse de M. Malvoisin, ce passage d’un minéral à l’autre produit un gonflement et génère une pression de cristallisation de 300 MPa. Cette pression est supérieure à la pression lithostatique jusqu’à des profondeurs de 10 km. Cette situation pourrait rendre le puits autofracturant.
La courbe de production d’hydrogène pourrait être similaire à celle d’un puits de gaz de schiste et donc durer plusieurs années. Après la fin de la production, le puits reste utilisable pour le captage de CO2 ou pour la géothermie.
(1) Alain Prinzhofer et Eric Deville, « L'hydrogène naturel. La prochaine révolution énergétique ? », éditions Belin
(2) https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00934238
(3) http://www.geolalg.com/chabou/cours4.pdf
(4) https://fr.wikipedia.org/wiki/Eau_de_chaux
La thèse de Benjamin Malvoisin « Conditions réductrices associées à la serpentinisation » (2) étudie cette réaction. Elle produit de l’hydrogène par oxydation du Fe2+ contenu dans la roche par l’eau. La thèse montre que deux paramètres contrôlent la cinétique de cette réaction : la température et le pH. Le pH élevé nécessaire à la réaction est créé par la forte teneur en Mg2+ des péridotites. M. Malvoisin a ensuite testé la validité des deux paramètres, température et pH, sur un autre matériau : un laitier sidérurgique. Un laitier mis en contact avec de l’eau à haute température émet du gaz hydrogène. L’eau oxyde le Fe2+ contenu dans le laitier sidérurgique. Le pH élevé nécessaire à la réaction est généré dans ce cas par la forte teneur en Ca2+ du laitier.
Je vous propose d’appliquer la réaction de serpentinisation à une autre source de Fe2+, les basaltes, pour produire de grands volumes d’hydrogène.
Les basaltes sont les roches ignées les plus abondantes à la surface de la Terre, alors que les péridotites sont peu présentes dans la croûte terrestre. La teneur en Fe2+ de ces deux types de roches est similaire (3) mais les basaltes n’ont pas la forte teneur en Mg2+ des péridotites. La concentration en Mg2+ des basaltes ne permet pas à ces roches de réagir au contact de l’eau comme les péridotites. Pour produire de l’hydrogène avec de l’eau et du basalte il faut augmenter le pH par un moyen extérieur.
Pour exploiter le Fe2+ contenu dans les basaltes, la séquence pourrait être la suivante :
- forage vertical pour atteindre une couche souterraine de basalte,
- forage horizontal dans la couche de basalte suivi d’une fracturation hydraulique,
- envoi dans le puits d’un lait de chaux.
Le lait de chaux est la base la moins chère et confère à l’eau en contact avec le basalte un pH de plus de 12 (4). Ce devrait être un pH suffisant pour permettre l’oxydation du Fe2+ de la roche. Les ions OH- apportés par le lait de chaux n’étant pas consommés, l’entretien de la réaction devrait se faire par un ajout régulier d’eau dans le puits.
L’autre paramètre contrôlant la réaction, la température, est déterminé par la profondeur du puits. Si la couche de basalte forée est à plus de 5000 mètres de profondeur, la température de la roche devrait être supérieure à 200°C. Selon la cinétique établie dans la thèse de M. Malvoisin, cette température devrait permettre une vitesse de réaction suffisante d’autant que cette chaleur est fournie gratuitement par la Terre.
Un autre élément pourrait être favorable à l’entretien de la réaction dans le puits : la réaction de serpentinisation transforme l’olivine et le pyroxène contenus dans la roche en serpentine et magnétite. Comme cela est montré dans la thèse de M. Malvoisin, ce passage d’un minéral à l’autre produit un gonflement et génère une pression de cristallisation de 300 MPa. Cette pression est supérieure à la pression lithostatique jusqu’à des profondeurs de 10 km. Cette situation pourrait rendre le puits autofracturant.
La courbe de production d’hydrogène pourrait être similaire à celle d’un puits de gaz de schiste et donc durer plusieurs années. Après la fin de la production, le puits reste utilisable pour le captage de CO2 ou pour la géothermie.
(1) Alain Prinzhofer et Eric Deville, « L'hydrogène naturel. La prochaine révolution énergétique ? », éditions Belin
(2) https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00934238
(3) http://www.geolalg.com/chabou/cours4.pdf
(4) https://fr.wikipedia.org/wiki/Eau_de_chaux