le jour <<M >> du jugement dernier
Publié : 09/09/2006 - 18:42:10
Le jour << M >> du jugement dernier
A la fin de la scolarité de tous les pays du monde, il existe une sorte de jugement dernier appelé baccalauréat, certificat de fin d’étude classique auquel tous les élèves doivent faire face. Les pédagogues parlent de ce jugement comme une évaluation sommative à interprétation critérielle ; ce qui ne nous contredit pas, puisque évaluer dans le contexte scolaire consiste toujours à apprécier, à porter un jugement sur un élève à partir d’informations quantitatives et de critères précis en vue d’une prise de décision. Mais laissons de coté le jargon des pédagogues et évertuons nous à faire la lumière sur ce jour particulier.
Pourquoi devrions mettre en exergue un jour particulier de cette traversée obligée que tous les élèves doivent emprunter au sommet de leurs études classiques. La raison est simple, pour la majeure partie de ces élèves ce fameux jour que nous désignons par le grand <<M>> , représente une véritable pierre d’achoppement, c’est à ce moment que nous auditionnons tous les vieux refrains qui désabusent les esprits mathématiques :<< ouf ! les maths je n’y vois que du feu..., ces x et ces y je n’y ai jamais rien compris..., tout ça n’est que du mandarin chinois…>> Ce n’est là qu’un condensé de cette répugnance manifeste à l’endroit de ce jour M qui correspond à l’épreuve de mathématique. A travers le baccalauréat les mathématiques apparaissent comme un grand mur qui isole de la masse des élèves quelques exceptions qui ne se sont pas noyés dans la marre des équations et des fonctions. En claire il s’agit du petit nombre d’élève que nous appelons des matheux et qui se sentent susceptibles de comprendre les mathématiques. En effet ces derniers connaissent bien des truc et des procédures, ils ne cherchent que des indices pour les appliquer ou mieux les restituer et grâce à dieu ça marche quand il s’agit d’appliquer des formules et non de résoudre de véritables problèmes mathématiques, disons de préférences de véritables exercices, ce qui hélas est le cas de nos examen du baccalauréat. Plus d’un de nos matheux qui constituent une élite ignorent tout le sens d’un domaine de définition, de la valeur limite d’une fonction et j’en passe. Pourtant ils effectuent ces calculs avec aisance à longueur de journée. D’ailleurs le contrat tel qu’il est dressé en salle de classe ne demande pas à ce qu’on pose trop de questions autour des notions de mathématiques. On ne fait que découvrir les formules au lieu de les redécouvrir, les théories et les concepts sont justifiés par des techniques stéréotypées que l’élève doit suivre à la lettre s’il veut réussir. Dans ce royaume l’enseignant est le << maître>>, il ne faut pas remettre en question ses recettes. Ainsi dans une pareille salle ne pénètre que le résidu formel de tout ce que l’étude de certaines notions mathématiques ont pu évoquer dans l’esprit humain. Un résidu formé de démonstrations formelles et d’exercices d’applications.
Le dressage d’un tel portrait de l’enseignement mathématique dans nos salles de classe ne vise pas à acculer le corps enseignant, car eux aussi sont le produit de cette manière de faire les mathématiques, nous n’avons pas non plus la prétention d’être un maître à penser dans le monde mathématique. Mais toutefois nous pensons être en mesure d’attirer l’attention des acteurs du système éducatif, plus particulièrement les enseignants, sur certains facteurs qui pourraient expliquer la résistance des x et de y à prendre place au confort des cellules grises. Pour y parvenir nous chercherons en premier lieu à élucider la question du <<qu’est ce que faire les mathématiques ? >>, une question qui est en droit ligne avec la nature des objets mathématiques. En seconde étape nous aborderons la valeur du sens des modèles et pour finir nous pointerons du doigt le rigorisme avec laquelle on veut transmettre le savoir mathématique. Qu’est ce qui fait la particularité de ce langage des sciences que sont les mathématiques ?
La nature des mathématiques
Les mathématiques ont une spécificité qui les différencient grandement des autre sciences. Pour les autres disciplines de littératures, de langues, d’anthropologies, etc. On peut expliquer au grand public d’une manière relativement simple, en quoi consiste la vaccination, qu’est-ce que le socialisme, le capitalisme, comment est organisé la matière et comment fonctionne un ordinateur. Le lecteur d’un ouvrage de vulgarisation sur ces notions n’a pas besoin de prendre l’attitude d’un médecin, d’un linguiste, d’un sociologue pour comprendre l’exposé qu’il lit. En revanche pour tirer profit d’une explication d’un théorème d’Euler, de Leibniz ou de Pythagore, il faut véritablement passer par toutes les étapes de la demonstration et refaire pour son compte personnel les raisonnements du mathématicien, car ce sont précisément ces raisonnements qui sont mathématiques, le résultat final, c’est-à-dire le théorème formulé par le mathématicien, n’est qu’une sorte de prime obtenue en récompense de ces raisonnements. Cela signifie que si l’on veut comprendre les mathématiques, il faut participer activement à l’élaboration de ce savoir et non pas l’enregistrer passivement comme un enfant qui écoute une histoire. Faire les mathématiques c’est entrer dans une activité d’essais, de problématisation, d’élaboration, de conjectures, d’approximation, de rectification, de formulation. Dans une pareille activité, l’intuition est fort souvent sollicité. Soulignons au passage que même si nous ne nous inscrivons pas dans le sillage de Poincaré et Brouwer qui ont voulu instaurer dans leur combat contre les formalistes une mathématique intuitionniste, il reste et demeure que l’intuition est sollicité à maintes reprises dans la résolution des problèmes de mathématique et la formulation des théorèmes. C’est dans cette quête aussi que les modèles de mathématique prennent tout leur sens.
La valeur du sens en mathématique
Si nous voulons en venir à bout de cette sempiternelle <<beurk ! >> lancé à tout bout de champs par les élèves en face des modèles mathématiques, nous devons travailler pour qu’ils puissent avoir un sens aux yeux de ces derniers et cela devrait commencer au moment où ils abordent ces notions de mathématiques que nous disons élémentaires, comme pour marquer leur insignifiance, mais qui sont fondamentales dans la construction du savoir mathématique. Prenons l’exemple d’une équation telle que 2x + 8 = x + 12 soumis à un élève de la 8ième année fondamentale, il s’empressera de grouper la variable x à gauche et les nombre à droite, ensuite il divisera par le facteur de x et le tour est joué ; notre élève sort gagnant du combat parce que qu’il a su bien reprendre sa procédure.
Mais a-t-il le sens de ce qu’il vient de faire ? Comprend-t-il que l’équation 2x + 8 = x + 12 n’est pas une égalité, mais qu’il s’agit de préférence d’une question qui est ici posée sur une égalité. En d’autres termes il lui est demandé s’il existe un ou des nombres x qui vérifient cette égalité. Ainsi donc ce nombre peut exister ou pas, tout comme il peut exister plusieurs valeurs qui vérifient cette égalité. Les techniques et les procédures stéréotypées sans contrôle de sens que nous enseignons résolvent bien des exercices. Mais ils paralysent une réelle activité mathématique. Dans une introduction à l’équation, qu’est ce qui nous empêcherait de demander aux élèves de tester des valeurs pour la variable x, ce faisant nous leur offrons la possibilité d’expérimenter, de valider la nécessité d’une méthode de travail. Nous imposons souvent une démarche aux élèves alors qu’il peut exister de multiples esquisses possibles pour aborder le problème. Nous leur demandons trop souvent de répéter les mêmes mécanismes. Pour revenir à notre équation, si par malheur la variable x se trouve à droite comme dans l’équation 7 = 2x – 9, notre élève est dérouté puisqu’à force de répétitions il s’est fait l’idée qu’un variable x doit toujours se placer à gauche, nous avons-nous même rencontré de pareil victime d’apprentissage des procédures en classe terminale. Si l’on doit reconnaître que pour développer une certaine aisance à résoudre des problèmes de mathématique, qu’il en faire beaucoup car ainsi s’acquiert l’automatisme. Mais l’automatisme sans contrôle de sens peut causer bien des dégâts. Il induit fort souvent l’élève en erreur dans sa volonté à généraliser, l’élève élabore ses propres théories. Cette quête de sens des modèles mathématiques est essentielle si nous ne souhaitons pas enseigner que des trucs des procédures, mais expérimenter, investir, reconstruire avec les élèves des modèles mathématiques.
Nous devons aussi reconnaître qu’ici figure un autre problème majeur ; car conjecturer, formuler, laisser faire réclame du temps, or le programme que le professeur doit couvrir est assez tendu. Si un professeur veut effectivement exercer de réelles activités mathématiques et non pas découvrir des réponses toutes faites, il n’aurait vraisemblablement pas le temps d’aborder toutes ces notions qui sont recommandées par les programmes officiels. A ce propos deux alternatifs s’offrent aux autorités compétentes en matière éducative. Augmenter le nombre d’heure de cours de maths par semaine ou effectuer une réduction du programme avec de nouveaux contenus adapté à notre temps. Après tout à quoi sert une tête bourrée de ramassis de théorèmes si elle n’est utilisée que pour reproduire. A ce problème s’ajoute le dernier handicap que nous appelons le Kidnapping des élémentaires mathématiques par tout un attirail conceptuel scientifique.
La rigueur
Elle constitue une véritable entorse à l’assimilation des notions mathématiques. Et pourquoi ce handicap s’empresseront très certainement de demander les puristes. D’ailleurs la rigueur n’est-elle pas une des particularités fondamentales de toutes sciences et qui plus est des mathématiques. Oui nous sommes aussi de cet avis qu’une bonne définition est celle qui correspond à une rigueur qui satisfait aux règles de la logique, ceci est vrai pour tout savant ou philosophe, mais vous m’excuserez les grands, dans l’enseignement il n’est pas du tout cela, une bonne définition est celle qui est comprise par les élèves et pour cela il faut se mettre à son niveau. Nous comprenons la difficulté d’un prof à enseigner ce qui ne satisfait pas entièrement, mais la satisfaction du maître n’est pas l’unique objet de l’enseignement. On doit se préoccuper de ce qu’est l’esprit de l’élève et de ce qu’on veut qu’il devienne. La science mathématique n’a jamais été cet art de dire de façon compliquée les choses simples. Pour paraphraser Molière dans les femmes savantes nous craignons que n’arrive le jour où nos élèves ne diront plus le libellé simple :<< 5 n’est pas le double d’un entier >>, mais où ils proclameront comme Snagarelle : << Oui cela était autrefois ainsi, mais nous avons changé tout cela, et nous faisons les mathématiques par une méthode toute nouvelle, nous disons aujourd’hui l’ensemble des x tel x est un élément de l’ensemble des nombres entiers et que 2x = 5 est l’ensemble vide >>.
Ce que nous oublions, c’est que les élèves disposent déjà d’un fond importants d’idée qui sont essentiellement des idées mathématiques, bien sure, ces idées ils les possèdent d’une manière qui est souvent floue, approximative, semi consciente. Cela signifie, qu’ils les possèdent d’une manière qui est une invitation en puissance à une prise de conscience, à une mise au point, à une élaboration, à un approfondissement, et à une exploration d’implications possibles ; bref une puissant invitation à se poser des questions. Cette avancée est partagée par le Médaille de Fields Alain CONNES, qui comme ses paires du passé croit à une réalité mathématique archaïque qui ne demande qu’à prendre forme ou mieux à être structurée par l’esprit humain. La rigueur mathématique se construit avec le temps, nous devons porter les modèles mathématiques à la dimension de l’esprit des élèves, il faut se mettre à leur place.
Il reste encore bien des paramètres qui conditionnent le développement d’une réelle activité mathématique dans nos salles de classe, s’il est vrai que nous ne pouvons les résoudre tous d’un seul coup, comme le problème des classes carnavalesques ; nous pouvons néanmoins essayer de rompre avec certaines pratiques qui ne développent que l’automatisme et la répétition. Nous espérons que cette publication soulèvera la conscience de plus sur la nécessité de se battre pour la pratique de réelles activités mathématiques. Entre temps bien d’autres points restent à élucider nous laissons donc le débat ouvert aux didacticiens et aux pédagogues les plus avisés
Dionel ETIENNE
Professeur du fondamental formé au CFEF de Port-au-Prince. Spécialiste de l’enseignement des mathématiques dans les écoles classiques et les centres d’études supérieures
Email : [email protected]
A la fin de la scolarité de tous les pays du monde, il existe une sorte de jugement dernier appelé baccalauréat, certificat de fin d’étude classique auquel tous les élèves doivent faire face. Les pédagogues parlent de ce jugement comme une évaluation sommative à interprétation critérielle ; ce qui ne nous contredit pas, puisque évaluer dans le contexte scolaire consiste toujours à apprécier, à porter un jugement sur un élève à partir d’informations quantitatives et de critères précis en vue d’une prise de décision. Mais laissons de coté le jargon des pédagogues et évertuons nous à faire la lumière sur ce jour particulier.
Pourquoi devrions mettre en exergue un jour particulier de cette traversée obligée que tous les élèves doivent emprunter au sommet de leurs études classiques. La raison est simple, pour la majeure partie de ces élèves ce fameux jour que nous désignons par le grand <<M>> , représente une véritable pierre d’achoppement, c’est à ce moment que nous auditionnons tous les vieux refrains qui désabusent les esprits mathématiques :<< ouf ! les maths je n’y vois que du feu..., ces x et ces y je n’y ai jamais rien compris..., tout ça n’est que du mandarin chinois…>> Ce n’est là qu’un condensé de cette répugnance manifeste à l’endroit de ce jour M qui correspond à l’épreuve de mathématique. A travers le baccalauréat les mathématiques apparaissent comme un grand mur qui isole de la masse des élèves quelques exceptions qui ne se sont pas noyés dans la marre des équations et des fonctions. En claire il s’agit du petit nombre d’élève que nous appelons des matheux et qui se sentent susceptibles de comprendre les mathématiques. En effet ces derniers connaissent bien des truc et des procédures, ils ne cherchent que des indices pour les appliquer ou mieux les restituer et grâce à dieu ça marche quand il s’agit d’appliquer des formules et non de résoudre de véritables problèmes mathématiques, disons de préférences de véritables exercices, ce qui hélas est le cas de nos examen du baccalauréat. Plus d’un de nos matheux qui constituent une élite ignorent tout le sens d’un domaine de définition, de la valeur limite d’une fonction et j’en passe. Pourtant ils effectuent ces calculs avec aisance à longueur de journée. D’ailleurs le contrat tel qu’il est dressé en salle de classe ne demande pas à ce qu’on pose trop de questions autour des notions de mathématiques. On ne fait que découvrir les formules au lieu de les redécouvrir, les théories et les concepts sont justifiés par des techniques stéréotypées que l’élève doit suivre à la lettre s’il veut réussir. Dans ce royaume l’enseignant est le << maître>>, il ne faut pas remettre en question ses recettes. Ainsi dans une pareille salle ne pénètre que le résidu formel de tout ce que l’étude de certaines notions mathématiques ont pu évoquer dans l’esprit humain. Un résidu formé de démonstrations formelles et d’exercices d’applications.
Le dressage d’un tel portrait de l’enseignement mathématique dans nos salles de classe ne vise pas à acculer le corps enseignant, car eux aussi sont le produit de cette manière de faire les mathématiques, nous n’avons pas non plus la prétention d’être un maître à penser dans le monde mathématique. Mais toutefois nous pensons être en mesure d’attirer l’attention des acteurs du système éducatif, plus particulièrement les enseignants, sur certains facteurs qui pourraient expliquer la résistance des x et de y à prendre place au confort des cellules grises. Pour y parvenir nous chercherons en premier lieu à élucider la question du <<qu’est ce que faire les mathématiques ? >>, une question qui est en droit ligne avec la nature des objets mathématiques. En seconde étape nous aborderons la valeur du sens des modèles et pour finir nous pointerons du doigt le rigorisme avec laquelle on veut transmettre le savoir mathématique. Qu’est ce qui fait la particularité de ce langage des sciences que sont les mathématiques ?
La nature des mathématiques
Les mathématiques ont une spécificité qui les différencient grandement des autre sciences. Pour les autres disciplines de littératures, de langues, d’anthropologies, etc. On peut expliquer au grand public d’une manière relativement simple, en quoi consiste la vaccination, qu’est-ce que le socialisme, le capitalisme, comment est organisé la matière et comment fonctionne un ordinateur. Le lecteur d’un ouvrage de vulgarisation sur ces notions n’a pas besoin de prendre l’attitude d’un médecin, d’un linguiste, d’un sociologue pour comprendre l’exposé qu’il lit. En revanche pour tirer profit d’une explication d’un théorème d’Euler, de Leibniz ou de Pythagore, il faut véritablement passer par toutes les étapes de la demonstration et refaire pour son compte personnel les raisonnements du mathématicien, car ce sont précisément ces raisonnements qui sont mathématiques, le résultat final, c’est-à-dire le théorème formulé par le mathématicien, n’est qu’une sorte de prime obtenue en récompense de ces raisonnements. Cela signifie que si l’on veut comprendre les mathématiques, il faut participer activement à l’élaboration de ce savoir et non pas l’enregistrer passivement comme un enfant qui écoute une histoire. Faire les mathématiques c’est entrer dans une activité d’essais, de problématisation, d’élaboration, de conjectures, d’approximation, de rectification, de formulation. Dans une pareille activité, l’intuition est fort souvent sollicité. Soulignons au passage que même si nous ne nous inscrivons pas dans le sillage de Poincaré et Brouwer qui ont voulu instaurer dans leur combat contre les formalistes une mathématique intuitionniste, il reste et demeure que l’intuition est sollicité à maintes reprises dans la résolution des problèmes de mathématique et la formulation des théorèmes. C’est dans cette quête aussi que les modèles de mathématique prennent tout leur sens.
La valeur du sens en mathématique
Si nous voulons en venir à bout de cette sempiternelle <<beurk ! >> lancé à tout bout de champs par les élèves en face des modèles mathématiques, nous devons travailler pour qu’ils puissent avoir un sens aux yeux de ces derniers et cela devrait commencer au moment où ils abordent ces notions de mathématiques que nous disons élémentaires, comme pour marquer leur insignifiance, mais qui sont fondamentales dans la construction du savoir mathématique. Prenons l’exemple d’une équation telle que 2x + 8 = x + 12 soumis à un élève de la 8ième année fondamentale, il s’empressera de grouper la variable x à gauche et les nombre à droite, ensuite il divisera par le facteur de x et le tour est joué ; notre élève sort gagnant du combat parce que qu’il a su bien reprendre sa procédure.
Mais a-t-il le sens de ce qu’il vient de faire ? Comprend-t-il que l’équation 2x + 8 = x + 12 n’est pas une égalité, mais qu’il s’agit de préférence d’une question qui est ici posée sur une égalité. En d’autres termes il lui est demandé s’il existe un ou des nombres x qui vérifient cette égalité. Ainsi donc ce nombre peut exister ou pas, tout comme il peut exister plusieurs valeurs qui vérifient cette égalité. Les techniques et les procédures stéréotypées sans contrôle de sens que nous enseignons résolvent bien des exercices. Mais ils paralysent une réelle activité mathématique. Dans une introduction à l’équation, qu’est ce qui nous empêcherait de demander aux élèves de tester des valeurs pour la variable x, ce faisant nous leur offrons la possibilité d’expérimenter, de valider la nécessité d’une méthode de travail. Nous imposons souvent une démarche aux élèves alors qu’il peut exister de multiples esquisses possibles pour aborder le problème. Nous leur demandons trop souvent de répéter les mêmes mécanismes. Pour revenir à notre équation, si par malheur la variable x se trouve à droite comme dans l’équation 7 = 2x – 9, notre élève est dérouté puisqu’à force de répétitions il s’est fait l’idée qu’un variable x doit toujours se placer à gauche, nous avons-nous même rencontré de pareil victime d’apprentissage des procédures en classe terminale. Si l’on doit reconnaître que pour développer une certaine aisance à résoudre des problèmes de mathématique, qu’il en faire beaucoup car ainsi s’acquiert l’automatisme. Mais l’automatisme sans contrôle de sens peut causer bien des dégâts. Il induit fort souvent l’élève en erreur dans sa volonté à généraliser, l’élève élabore ses propres théories. Cette quête de sens des modèles mathématiques est essentielle si nous ne souhaitons pas enseigner que des trucs des procédures, mais expérimenter, investir, reconstruire avec les élèves des modèles mathématiques.
Nous devons aussi reconnaître qu’ici figure un autre problème majeur ; car conjecturer, formuler, laisser faire réclame du temps, or le programme que le professeur doit couvrir est assez tendu. Si un professeur veut effectivement exercer de réelles activités mathématiques et non pas découvrir des réponses toutes faites, il n’aurait vraisemblablement pas le temps d’aborder toutes ces notions qui sont recommandées par les programmes officiels. A ce propos deux alternatifs s’offrent aux autorités compétentes en matière éducative. Augmenter le nombre d’heure de cours de maths par semaine ou effectuer une réduction du programme avec de nouveaux contenus adapté à notre temps. Après tout à quoi sert une tête bourrée de ramassis de théorèmes si elle n’est utilisée que pour reproduire. A ce problème s’ajoute le dernier handicap que nous appelons le Kidnapping des élémentaires mathématiques par tout un attirail conceptuel scientifique.
La rigueur
Elle constitue une véritable entorse à l’assimilation des notions mathématiques. Et pourquoi ce handicap s’empresseront très certainement de demander les puristes. D’ailleurs la rigueur n’est-elle pas une des particularités fondamentales de toutes sciences et qui plus est des mathématiques. Oui nous sommes aussi de cet avis qu’une bonne définition est celle qui correspond à une rigueur qui satisfait aux règles de la logique, ceci est vrai pour tout savant ou philosophe, mais vous m’excuserez les grands, dans l’enseignement il n’est pas du tout cela, une bonne définition est celle qui est comprise par les élèves et pour cela il faut se mettre à son niveau. Nous comprenons la difficulté d’un prof à enseigner ce qui ne satisfait pas entièrement, mais la satisfaction du maître n’est pas l’unique objet de l’enseignement. On doit se préoccuper de ce qu’est l’esprit de l’élève et de ce qu’on veut qu’il devienne. La science mathématique n’a jamais été cet art de dire de façon compliquée les choses simples. Pour paraphraser Molière dans les femmes savantes nous craignons que n’arrive le jour où nos élèves ne diront plus le libellé simple :<< 5 n’est pas le double d’un entier >>, mais où ils proclameront comme Snagarelle : << Oui cela était autrefois ainsi, mais nous avons changé tout cela, et nous faisons les mathématiques par une méthode toute nouvelle, nous disons aujourd’hui l’ensemble des x tel x est un élément de l’ensemble des nombres entiers et que 2x = 5 est l’ensemble vide >>.
Ce que nous oublions, c’est que les élèves disposent déjà d’un fond importants d’idée qui sont essentiellement des idées mathématiques, bien sure, ces idées ils les possèdent d’une manière qui est souvent floue, approximative, semi consciente. Cela signifie, qu’ils les possèdent d’une manière qui est une invitation en puissance à une prise de conscience, à une mise au point, à une élaboration, à un approfondissement, et à une exploration d’implications possibles ; bref une puissant invitation à se poser des questions. Cette avancée est partagée par le Médaille de Fields Alain CONNES, qui comme ses paires du passé croit à une réalité mathématique archaïque qui ne demande qu’à prendre forme ou mieux à être structurée par l’esprit humain. La rigueur mathématique se construit avec le temps, nous devons porter les modèles mathématiques à la dimension de l’esprit des élèves, il faut se mettre à leur place.
Il reste encore bien des paramètres qui conditionnent le développement d’une réelle activité mathématique dans nos salles de classe, s’il est vrai que nous ne pouvons les résoudre tous d’un seul coup, comme le problème des classes carnavalesques ; nous pouvons néanmoins essayer de rompre avec certaines pratiques qui ne développent que l’automatisme et la répétition. Nous espérons que cette publication soulèvera la conscience de plus sur la nécessité de se battre pour la pratique de réelles activités mathématiques. Entre temps bien d’autres points restent à élucider nous laissons donc le débat ouvert aux didacticiens et aux pédagogues les plus avisés
Dionel ETIENNE
Professeur du fondamental formé au CFEF de Port-au-Prince. Spécialiste de l’enseignement des mathématiques dans les écoles classiques et les centres d’études supérieures
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