Structure des nanotubes de Lanreotide.
A: Carte de densité du nanotube obtenue après traitement des images et reconstruction hélicoïdale ;
B: zoom sur une brique élémentaire de l'hélice constituée d’un octamère de peptide organisé en 2 tétramères. Les 8 molécules ont toutes des conformations différentes. Elles sont cependant regroupées en deux familles en fonction de la position du résidu naphtylalanine amino-terminal: la famille « rose » (molécules a, b, g & h) et la famille « verte » (molécules c, d e & f). Les cercles jaunes et oranges soulignent les coeurs hydrophobes des 2 tétramères de la brique élémentaire constitués par 4 valines en forte interaction.
C: Mise en évidence des différents types d’interaction maintenant la structure: interaction entre tétramères, interaction entre résidus aromatiques, feuillet β entre les molécules a, d, g & f et feuillet β entre les molécules c, b, h & e.
Parmi les peptides synthétiques formant des nanostructures bien définies, l'octapeptide Lanréotide a été considéré comme l'un des mieux caractérisés, tant en termes de structure que de processus d'auto-assemblage. Le Lanréotide est un peptide thérapeutique utilisé contre l’acromégalie et certains cancers neuro-endocriniens. Ce peptide s’auto-assemble spontanément dans l’eau sous forme de nanotubes de 24 nm de diamètre et extrêmement longs (de l’ordre du mm) expliquant la formation d’un hydrogel. Cet hydrogel permet au Lanréotide non seulement d’être protégé contre les dégradations chimiques mais également d’être libéré de façon contrôlée dans le temps (plus d’un mois après l’injection) assurant sa circulation continue dans le sang. La compréhension fine des règles chimiques et physicochimiques guidant les assemblages de peptides permettrait de concevoir de nouvelles formulations à libération contrôlée dans lesquelles, comme dans le cas du Lanréotide, le médicament serait sa propre formulation. Les scientifiques ont élucidé la structure atomique des nanotubes de Lanréotide obtenue à une résolution de 2,5 Å par cryo-EM. Cette structure révèle une complexité que rien ne laissait soupçonner dans les nombreux travaux antérieurs et qu’il aurait été impossible de prédire par les méthodes dont nous disposons aujourd’hui.
Le récent et phénoménal succès du logiciel d’intelligence artificielle AlphaFold pour la prédiction de la structure tertiaire des protéines n’a été possible que grâce à la base de données de structures atomiques de protéines déterminées expérimentalement. Cependant, AlphaFold n’est pas à ce stade capable de prédire les repliements et les assemblages de peptides. La vérification expérimentale de modèles à un niveau de résolution proche de l'atome doit donc devenir la norme dans ce domaine. Ce sera une étape essentielle vers le développement de méthodes prédictives fiables qui ouvrira la voie à la conception de novo de matériaux peptidiques dont les propriétés contrôlées trouveront ainsi des applications dans de nombreux domaines de la biologie, de la pharmacie et de la médecine et pourront inspirer des développements dans le domaine des nanotechnologies.
Publication:
Atomic structure of Lanreotide nanotubes revealed by cryo-EM
Laura Pieri, Fengbin Wang, Ana-Andreea Arteni, Matthijn Vos, Jean-Marie Winter, Marie-Hélène Le Du, Franck Artzner, Frédéric Gobeaux, Pierre Legrand, Yves Boulard, Stéphane Bressanelli, Edward H. Egelman, Maité Paternostre.
PNAS 25 janvier2022. https://doi.org/10.1073/pnas.2120346119
Laboratoire:
Institut de biologie intégrative de la cellule-I2BC (CNRS/Université Paris-Saclay/CEA)
1 avenue de la Terrasse,
91191 Gif-sur-Yvette.
Source: CNRS INSB