Découverte d'une des causes génétiques d'infertilité masculine

Publié par Michel,
Source: CNRS
Illustration: © Pierre Ray, CNRSAutres langues:
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Pour comprendre les causes de l'infertilité masculine et afin d'y remédier, de nombreuses recherches portent sur les gènes impliqués dans la formation des spermatozoïdes. C'est dans ce domaine que l'équipe du laboratoire AGeing, Imagery and Modeling (AGIM, CNRS/Université Joseph Fourier/Ecole pratique des hautes études Paris), dirigée par Pierre Ray et Christophe Arnoult, vient de réaliser une avancée importante. Les chercheurs ont identifié le gène responsable de l'un des syndromes d'infertilité masculine, la globozoocéphalie spermatique, caractérisé par la production de spermatozoïdes à tête ronde incapables de féconder l'ovule. Ce gène s'est avéré jouer un rôle fondamental dans la spermatogénèse, et pourrait de ce fait devenir une cible pour de nouveaux contraceptifs. Ce travail vient d'être publié dans le numéro de mars de l'American Journal of Human Genetics.

La globozoocéphalie spermatique est une pathologie rare caractérisée par des spermatozoïdes à tête ronde dépourvus d'acrosome, la vésicule contenant les enzymes permettant au spermatozoïde de percer la membrane pellucide de l'ovocyte.

Pour en découvrir les causes génétiques, les chercheurs ont analysé, à l'aide de puces à ADN, le génome de 20 personnes atteintes de ce syndrome. Ils ont ainsi découvert que 75% des patients avaient en commun la délétion homozygote (1) d'une séquence d'ADN de 200 000 paires de bases. Sur cette séquence se trouve un seul gène: DPY19L2. La perte de cette séquence génétique est le fruit d'une "recombinaison homologue non allélique": lors de la méiose, la division produisant deux cellules sexuelles à partir d'une cellule germinale, les chromosomes homologues s'échangent des séquences d'ADN. Ces échanges contribuent à l'évolution de notre espèce. Mais elles se produisent parfois à partir de séquences homologues localisées à différents endroits du génome, ce qui peut entraîner des duplications et des délétions de gènes comme dans le cas de la globozoocéphalie.


Spermatozoïde globozoocéphale (à gauche) et spermatozoïde témoin (à droite)
observés en microscopie électronique à balayage.

Cette étude a permis de découvrir que le gène DPY19L2 est nécessaire à l'élongation du spermatozoïde et à la formation de l'acrosome. On savait que chez le ver nématode C. elegans, le gène analogue à DPY19L2 joue un rôle important dans l'établissement de la polarité cellulaire, l'asymétrie dans l'organisation des composants de la cellule, indispensable au développement des embryons. Les recherches de l'équipe du laboratoire AGIM conduisent à penser que chez l'humain, DPY19L2 joue aussi un rôle fondamental dans l'établissement d'une polarité cellulaire, mais dans ce cas, lors de la formation des spermatozoïdes. Ce serait ainsi le premier gène connu remplissant cette fonction.

Ces travaux permettent de proposer un diagnostic génétique pour les patients porteurs de spermatozoïdes globozoocéphales, et, à terme, d'imaginer des solutions thérapeutiques contre ce syndrome. Par ailleurs, DPY19L2 pourrait devenir une cible pour de nouveaux contraceptifs masculins non hormonaux. En effet, en bloquant son expression, ou l'action de la protéine, on pourrait empêcher la formation de spermatozoïdes féconds. Un brevet protégeant ce concept a été déposé en novembre 2009.


Note:

(1) Délétion des 2 allèles identiques d'un gène.


Référence:

A recurrent deletion of the DPY19L2 gene causes infertility in man by blocking sperm head elongation and acrosome formation.
Radu Harbuz,1,2,3 Raoudha Zouari,4 Virginie Pierre,2,5 Mariem Ben Khelifa,1,2,3 Mahmoud Kharouf,4
Charles Coutton,1,2,3 Ghaya Merdassi,6 Farid Abada,1,2,3 Jessica Escoffier,5 Yorgos Nikas,7
François Vialard,8 Isabelle Koscinski,9,10 Chema Triki,11 Nathalie Sermondade,12 Thérèse Schweitzer,13
Amel Zhioua,6 Fethi Zhioua,6 Habib Latrous,4 Lazhar Halouani,4 Marrakchi Ouafi,4 Mounir Makni,4
Pierre-Simon Jouk,1,2 Bernard Se'le,1 Sylviane Hennebicq,1 Véronique Satre,1,2 Stéphane Viville,9,10
Christophe Arnoult,2,5 Joe¨l Lunardi,1,3,5 and Pierre F. Ray1,2,3,*
1Faculté de Médecine-Pharmacie de Grenoble, Université Joseph Fourier, Domaine de la Merci, 38706 Grenoble, France;
2 Laboratoire AGIM, FRE 3405 CNRS - UJF, Equipe Génétique Infertilité et Thérapeutique (GIT), Domaine de la Merci, 38706 Grenoble, France;
3 UM de Biochimie et Génétique Moléculaire, DBTP, CHU de Grenoble, 38700 Grenoble, France;
4 Clinique de la Reproduction les Jasmins, 23, Av. Louis BRAILLE, 1002 Tunis, Tunisia;
5 Grenoble Institut des Neurosciences, INSERM U836, BP170, 38042 Grenoble, France;
6Unité de Procréation Médicalement Assistée, Hôpital Aziza Othmana, 1004 Tunis, Tunisia;
7 Athens Innovative Microscopy Skra 36,Voula 16673, Greece;
8 Department of Reproductive Biology, Centre Hospitalier Poissy Saint Germain, 78300 Poissy, France;
9 Service de Biologie de la Reproduction, Centre Hospitalier Universitaire, Strasbourg F 67000 France;
10 Institut de Génétique et de Biologie Moléculaire et Cellulaire (IGBMC), Institut National de Santé et de Recherche Médicale (INSERM) U964/Centre National de Recherche Scientifique (CNRS) UMR1704/Université de Strasbourg, 67404 Illkirch, France;
11CMRDP, 5, rue Ibn Hazem, 1002 Tunis Beledère, Tunisia;
12Histologie Embryologie Cytogénétique CECOS, CHU Jean Verdier, 93143 BONDY, France;
13Centre d'AMP, Hôpital Maternité de Metz, 1/5 Place Sainte Croix, 57045 Metz, France
Am. J. Hum. Genet. 88 (11 mars 2011).
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