La transition peut être difficile à encaisser quand on revient chez soi après un séjour d'études à l'étranger.
Originaire du Cameroun, Paul a étudié pendant deux ans en génie civil à l'Université Laval de Québec. Depuis bientôt un mois qu'il est de retour dans son pays, rien ne va plus. Lui qui était
tout heureux de retrouver sa famille et ses amis se sent presque un étranger parmi les siens. Le malaise intérieur qu'il vit est si grand qu'il songe même à repartir, au Québec ou ailleurs. "Avant d'aller vers de nouveaux départs, il faut prendre le
temps d'atterrir", dit Annie Lord, consultante spécialisée dans l'adaptation des individus au changement, qui a donné une conférence sur le sujet à l'intention des étudiants étrangers, le 3 mai.
Des priorités différentes
Vivre dans une autre culture peut transformer le parcours d'une vie et aucun séjour à l'étranger ne laisse indifférent", a expliqué Annie Lord, elle-même revenue transformée par un séjour de travail au Mexique effectué au début des années 1970. "Essentiellement, je n'abordais plus la vie de la même façon, le temps ne comptait plus autant à mes yeux et mes priorités étaient différentes, a-t-elle expliqué. Ce sont des choses tout à fait normales; on ne ressort pas indemne d'une telle expérience." Selon Annie Lord, le retour au pays s'apparente à ce qu'on a vécu en arrivant dans son pays d'accueil.
Passée la période d'euphorie où tout nous apparaît nouveau et passionnant suit l'étape d'insertion ou de réinsertion, avec tous les ajustements que cela suppose. Car une fois qu'on a décrit en long et en large son séjour, montré des photos, bref qu'on est devenu le centre d'intérêt pour la famille et les proches, la vie courante reprend ses droits. C'est à cette étape que se fait sentir plus durement le choc du retour. Par exemple, on peut regretter ce temps où on jouissait d'une grande liberté dans son pays d'accueil. Des gens jugés intéressants avant l'envol vers d'autres cieux peuvent maintenant apparaître franchement ennuyeux. Pour vaincre ce malaise intérieur qui nous empêche de reprendre pied, le temps demeure encore le meilleur allié, estime Annie Lord.
"Donnez-vous du temps d'atterrir avant de prendre de nouveaux départs, a insisté la conférencière. Il est tout à fait normal qu'un séjour à l'étranger ait un effet sur la perception de soi et sur notre façon d'entrer en relation avec les autres. Dans tous les cas, gardez le cap sur vos projets tout en vous demandant s'ils répondent encore à vos attentes. Restez ouvert à tout ce qui peut se présenter et n'ayez pas peur de prendre des risques. Souvenez-vous que vous avez pris des risques en quittant votre pays pour venir étudier à l'étranger, et que votre bagage culturel et humain est sans aucun doute beaucoup plus riche aujourd'hui." Parmi les conseils pratiques destinés à amoindrir le choc, Annie Lord mentionne la fréquentation de blogues tenus par des gens ayant vécu une expérience similaire. Rester en contact avec les amis qu'on a quittés peut aussi aider à panser ses plaies.