Selon les résultats d'une étude publiée dans The Journal of Pain, l'anxiété pourrait être bien plus qu'un passage obligé pour les adolescents à la faible sécurité affective. Des chercheurs de l'Université de Montréal, du CHU Sainte-Justine et de l'Université McGill ont en effet découvert que les adolescents aux liens d'attachement anxieux (ou insécurisés) ressentent des douleurs plus intenses et notamment des maux de tête, douleurs abdominales et douleurs articulaires plus fréquents. Ils sont aussi plus susceptibles d'être déprimés que leurs pairs dont les liens d'attachement sont plus sécurisants.
Isabelle Tremblay, chercheuse à l'Université de Montréal et au CHU Sainte-Justine, et Michael Sullivan, professeur de psychologie à l'Université McGill ont mené cette étude pour approfondir les résultats d'études antérieures ayant constaté que les expériences vécues pendant l'enfance jouent un rôle essentiel dans les liens affectifs que l'on noue à l'âge adulte et que l'insécurité affective des nourrissons perdure à l'adolescence et à l'âge adulte.
"Bien que les études antérieures menées chez l'adulte aient montré que le niveau de sécurité de l'attachement était influencé par les expériences douloureuses, nous ne savions pas vraiment quel pouvait être son rapport avec la douleur, explique Isabelle Tremblay. Nous avons découvert que les adolescents avec un mode d'attachement anxieux tendent à être plus alarmistes sur leurs symptômes douloureux; ils ont aussi tendance à amplifier le degré de menace ou de sévérité de leurs douleurs. Cette amplification se traduit par des douleurs plus intenses et des symptômes dépressifs plus sévères."
Près de 382 étudiants de la deuxième à la cinquième secondaire ont été recrutés pour cette étude dans une école secondaire de Montréal. Les participants ont été invités à répondre à des questionnaires sur la fréquence et l'intensité de leurs douleurs émotionnelles et physiques.
"Il est possible que les personnes aux liens d'attachement anxieux (ou insécurisés) perçoivent le monde qui les entoure comme plus menaçant et plus stressant et que cela se traduise par des symptômes physiques, explique le professeur Sullivan. Il est aussi possible que le manque de sécurité affective favorise "l'expression" d'une détresse plus intense pour obtenir l'attention de l'environnement social."
Pour les chercheurs, les facteurs interpersonnels doivent être pris en considération dans la prise en charge de la douleur et de la dépression des adolescents. "Les adolescents ont des besoins de santé physique et mentale différents des adultes. Bien que les facteurs interpersonnels ne soient habituellement pas considérés comme faisant partie intégrante de la prise en charge de la douleur et de la dépression chez l'adulte, il faudrait peut-être en tenir compte dans le traitement des adolescents", insiste le professeur Sullivan.