🦴 Ce que nous révèle la découverte d'un écosystème marin de 249 millions d'années

Publié par Cédric,
Auteur de l'article: Cédric DEPOND
Source: Science
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Une couche blanchâtre striant les falaises arctiques du Spitzberg livre un témoignage exceptionnel sur la capacité de régénération du monde vivant.

Cette accumulation d'ossements, vieille de 249 millions d'années, est une capture du moment précis où la vie marine a retrouvé son dynamisme après la pire crise biologique de notre planète. Les milliers de fragments découverts racontent l'émergence rapide d'un écosystème complexe dans un environnement pourtant ravagé.

Cette découverte majeure remet en cause les scénarios établis concernant la récupération des écosystèmes après l'extinction de masse de la fin du Permien. Les travaux publiés dans Science par des paléontologues scandinaves démontrent que la renaissance marine fut un processus rapide plutôt qu'une lente reconquête. L'analyse méthodique de ce gisement exceptionnel ouvre une fenêtre inédite sur une période clé de l'histoire de la Terre.


Écosystème marin de tétrapodes datant de 249 millions d'années.
Grippia longirostris, un petit ichthyoptérygien, chasse des ammonoïdes proches des calmars (en haut à gauche).
L'amphibien marin Aphaneramma attrape le poisson osseux Bobastrania (au premier plan).
Le gigantesque ichthyosaure Cymbospondylus rôde dans les profondeurs (en bas à droite).
Ces fossiles ont été découverts sur l'île de Spitsbergen, dans l'archipel du Svalbard.
Crédit: Robert Back.


Une biodiversité en milieu hostile


La configuration des lieux à l'époque du Trias inférieur correspondait à des latitudes élevées, baignées par les eaux froides d'un océan bordier de la Panthalassa. Les conditions y étaient considérées comme difficiles pour le développement d'une faune diversifiée. Pourtant, le gisement du Spitzberg révèle une communauté marine étonnamment riche, avec des prédateurs de différentes tailles occupant différentes niches écologiques.

La méthode de fouille employée, organisée en carrés d'un mètre couvrant 36 mètres carrés, a permis une collecte systématique de tous les éléments fossiles. Cette rigueur a assuré la préservation d'indices fragiles comme les écailles de poissons et les coprolithes (déjections fossilisées). L'étude fine de ces restes a reconstitué les relations trophiques au sein de cet écosystème ancien.

Parmi les découvertes les plus significatives figure la présence d'ichtyosaures de différentes dimensions, comprenant des superprédateurs dépassant 5 mètres de longueur. Ces reptiles marins cohabitaient avec des archosauromorphes, apparentés aux crocodiles modernes, et diverses espèces d'amphibiens. Cette coexistence démontre une complexité écologique que les scientifiques ne soupçonnaient pas pour cette époque.

Les implications pour la compréhension des crises biologiques


La datation stratigraphique précise situe ce dépôt fossilifère à seulement 3 millions d'années après l'extinction de masse du Permien-Trias. Cet intervalle court contredit l'hypothèse d'un rétablissement marin étalé sur 8 millions d'années. La rapidité de cette reconstitution questionne les modèles évolutifs concernant l'adaptation des vertébrés au milieu marin.

L'analyse comparative menée à l'échelle globale positionne le gisement du Spitzberg parmi les assemblages de vertébrés marins du Trias inférieur les plus diversifiés connus à ce jour. Cette richesse montre que les lignées de reptiles marins pourraient avoir une origine plus ancienne, antérieure même à l'extinction de masse. La crise aurait ainsi accéléré leur radiation plutôt que initié leur apparition.

La concentration remarquable des fossiles en un même niveau géologique indique que cet écosystème s'est développé sur une courte échelle de temps. Cette instantanéité préservée offre aux scientifiques un cas d'étude unique pour comprendre les mécanismes de recolonisation post-crise. Les leçons de ce passé lointain éclairent les dynamiques écologiques face aux perturbations environnementales.

Pour aller plus loin: Qu'est-ce que l'extinction du Permien-Trias ?


Cette crise biologique, survenue il y a 252 millions d'années, représente la plus sévère de l'histoire terrestre. Elle a éliminé environ 95% des espèces marines et 70% des vertébrés terrestres.

Le déclencheur principal fut une activité volcanique massive en Sibérie, libérant d'énormes quantités de gaz à effet de serre. Le réchauffement climatique qui en résulta provoqua l'acidification et la désoxygénation des océans.

Les écosystèmes marins furent particulièrement affectés, avec l'effondrement des récifs coralliens et la disparition de nombreuses lignées d'invertébrés. Le rétablissement complet demanda plusieurs millions d'années, mais les nouvelles découvertes montrent qu'elle débuta plus rapidement qu'estimé.
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