Dans une récente étude publiée dans la revue PLOS Biology, Hung-Che Lin de l'Academia Sinica à Taipei, Taiwan, et son équipe révèlent des informations fascinantes sur les processus moléculaires utilisés par un champignon carnivore, l'Arthrobotrys oligospora, lorsqu'il détecte, capture et consomme un ver. Ce champignon, qui se nourrit habituellement de matière organique en décomposition, peut former des pièges pour capturer et digérer des vers, notamment en cas de famine ou de présence de vers à proximité.
Pièges luminescents. Crédit: Hung-Che Lin (CC-BY 4.0, creativecommons.org/licenses/by/4.0/)
Cette étude s'appuie sur des expérimentations en laboratoire, examinant les gènes et les processus impliqués à différentes étapes de la prédation d'Arthrobotrys oligospora sur une espèce de ver nématode, Caenorhabditis elegans. Une technique clé, la RNAseq, a permis de mesurer l'activité de divers gènes du champignon à différents moments. Les résultats indiquent une augmentation de la réplication de l'ADN et de la production de ribosomes (structures cellulaires de synthèse des protéines) lorsque le champignon détecte un ver. S'ensuit une hausse d'activité de plusieurs gènes codant pour des protéines facilitant la formation et la fonction des pièges, tels que les protéines adhésives aux vers et une nouvelle famille de protéines, nommées "trap enriched proteins" (TEP).
Après l'extension des structures filamenteuses, les hyphes, dans le ver pour le digérer, l'activité augmente pour les gènes codant diverses enzymes protéases, notamment les métalloprotéases. Ces protéases, qui décomposent d'autres protéines, suggèrent que le champignon les utilise pour aider à la digestion du ver.
Différentes étapes du carnivorisme par un champignon piégeant les nématodes
Ces découvertes pourraient servir de base pour de futures recherches sur les mécanismes moléculaires impliqués dans la prédation d'Arthrobotrys oligospora et d'autres interactions prédateur-proie fongiques.
Les auteurs soulignent que leurs analyses transcriptomiques et fonctionnelles mettent en lumière le rôle de l'augmentation de la réplication de l'ADN, de la traduction et de la sécrétion dans le développement et l'efficacité des pièges. De plus, une famille de gènes, largement développée dans le génome des champignons piégeant les nématodes, a été trouvée enrichie dans les pièges et est essentielle pour l'adhésion aux nématodes. Ces résultats approfondissent notre compréhension des processus clés requis pour la carnivorie fongique.