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L'équipe de recherche, composée de scientifiques internationaux dont Emily Sanford de l'Université de Californie à Berkeley, a mené ses expériences au sanctuaire de chimpanzés de l'île de Ngamba en Ouganda. Les chercheurs ont présenté aux animaux deux boîtes, l'une contenant de la nourriture. Après avoir reçu un premier indice suggérant l'emplacement de la récompense, les chimpanzés ont ensuite obtenu une information plus fiable indiquant l'autre boîte. La majorité des primates ont alors changé leur choix initial pour se tourner vers la nouvelle option.
Crédit: Dr Jake Brooker.
Pour s'assurer que ces comportements reflétaient bien un raisonnement élaboré et non des réflexes simples, les scientifiques ont utilisé des modèles computationnels. Ces analyses ont permis d'éliminer des explications alternatives comme la tendance à privilégier la dernière information reçue ou à suivre le signal le plus évident. Les résultats montrent clairement que les décisions des chimpanzés correspondent à des stratégies rationnelles de mise à jour des opinions.
Cette découverte remet en question la vision traditionnelle selon laquelle la rationalité serait l'apanage exclusif de l'être humain. Les chercheurs observent que cette capacité à réviser ses convictions face à de nouvelles preuves apparaît chez les enfants vers l'âge de quatre ans, ce qui établit un pont entre le développement cognitif humain et les compétences des grands singes.
Les implications de ces travaux dépassent le cadre de la primatologie. Comprendre comment les primates révisent leurs croyances pourrait influencer notre approche de l'éducation précoce et même contribuer au développement de systèmes d'intelligence artificielle plus performants. L'équipe étend maintenant ses recherches aux jeunes enfants âgés de deux à quatre ans, cherchant à établir des comparaisons directes entre le développement cognitif humain et les capacités des chimpanzés.
Emily Sanford espère étendre ces investigations à d'autres espèces de primates pour cartographier les capacités de raisonnement à travers les différentes branches évolutives. Ces recherches s'inscrivent dans une perspective plus large qui reconnaît que les animaux développent des stratégies intelligentes et adaptatives pour naviguer dans des environnements difficiles, même s'ils ne maîtrisent pas les concepts scientifiques tels que nous les concevons.
La révision rationnelle des croyances
La révision rationnelle des croyances désigne la capacité d'un individu à modifier ses convictions initiales lorsqu'il est confronté à de nouvelles informations plus fiables ou plus complètes. Ce processus cognitif implique non seulement de reconnaître la valeur probante des nouvelles données, mais aussi de recalculer mentalement les probabilités associées à différentes hypothèses.
Chez l'être humain, cette capacité se développe progressivement durant l'enfance et atteint sa pleine maturité vers l'âge de quatre ans. Elle constitue un fondement essentiel de l'apprentissage et de l'adaptation à des environnements changeants. Les chercheurs en sciences cognitives étudient ce mécanisme depuis des décennies pour comprendre comment nous intégrons les informations contradictoires.
Dans le domaine de l'intelligence artificielle, la modélisation de la révision des croyances permet de créer des systèmes plus robustes capables de s'adapter à des données nouvelles. Les algorithmes bayésiens, par exemple, s'inspirent directement de ce principe en mettant à jour les probabilités en fonction de l'arrivée de nouvelles observations.
La découverte que les chimpanzés partagent cette capacité montre que les racines évolutives de la pensée rationnelle sont plus anciennes qu'on ne le pensait. Cela ouvre des perspectives nouvelles pour comprendre l'émergence de la cognition complexe dans le règne animal.