Comment le cerveau participe au cancer

Publié par Adrien le 17/05/2019 à 08:00
Source: CEA
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Réseau de nerfs adrénergiques (en rouge) dans des tumeurs à haut risque du cancer de la prostate.
@Science
Des neurones voient le jour au sein même du microenvironnement tumoral, contribuant au développement du cancer. Ces cellules nerveuses dérivent de progéniteurs provenant du cerveau (Le cerveau est le principal organe du système nerveux central des animaux. Le cerveau traite...) et sont acheminés via la circulation sanguine (La circulation sanguine est un type de système circulatoire en circuit fermé qui assure...). Cette découverte étonnante ouvre la voie à tout un nouveau champ de recherche (La recherche scientifique désigne en premier lieu l’ensemble des actions entreprises en vue...), relatif au rôle du système nerveux (Le système nerveux est un système en réseau formé des organes des sens, des...) dans le développement des cancers et aux interactions entre les systèmes vasculaires, immunitaires et nerveux dans la tumorigenèse.

La production de nouveaux neurones est un événement plutôt rare chez l'adulte, cantonné à deux régions particulières du cerveau: le gyrus denté dans l'hippocampe et la zone sous-ventriculaire. Mais voilà que l'équipe Inserm Atip-Avenir dirigée par Claire Magnon* à l'Institut de Radiobiologie (La radiobiologie est l'étude des effets biologiques des rayonnements, notamment des...) Cellulaire et Moléculaire, dirigé par Paul-Henri Roméo (CEA, Fontenay-aux-Roses), vient de montrer que ce phénomène se produit également en dehors du système nerveux central: dans les tumeurs !

En 2013, cette chercheuse avait déjà mis en évidence, dans des tumeurs de la prostate, que l'infiltration de fibres nerveuses, issues de prolongements d'axones de neurones préexistants, était associée à la survenue et à la progression de ce cancer. Depuis, d'autres études ont permis de confirmer le rôle inattendu, mais apparemment important, des fibres nerveuses dans le microenvironnement tumoral de nombreux cancers solides.

Soucieuse de comprendre l'origine du réseau neuronal tumoral, Claire Magnon a une idée surprenante: et si le réseau nerveux impliqué dans le développement des tumeurs provenait de nouveaux neurones se formant (Dans l'intonation, les changements de fréquence fondamentale sont perçus comme des variations de...) sur place ? Et dans ce cas, comment pourrait être initiée cette neurogenèse tumorale ?

Des cellules neurales souches dans les tumeurs

Pour tester cette hypothèse, Claire Magnon a étudié les tumeurs de 52 patients atteints de cancer de la prostate (Le cancer de la prostate est un cancer fréquent touchant la prostate et donc exclusivement...). Elle y a découvert des cellules exprimant une protéine (Une protéine est une macromolécule biologique composée par une ou plusieurs...), la doublecortine (DCX), connue pour être exprimée par les cellules progénitrices neuronales, lors du développement embryonnaire et chez l'adulte dans les deux zones du cerveau où les neurones se renouvellent. De plus, dans les tumeurs étudiées, la quantité (La quantité est un terme générique de la métrologie (compte, montant) ; un scalaire,...) de cellules DCX+ est parfaitement corrélée à la sévérité du cancer. "Cette découverte étonnante atteste de la présence de progéniteurs neuronaux DCX+ en dehors du cerveau chez l'adulte. Et nos travaux montrent qu'ils participent bien à la formation de nouveaux neurones dans les tumeurs", clarifie-t-elle.

Une migration du cerveau vers la tumeur

Pour déterminer l'origine de ces progéniteurs neuronaux, Claire Magon a utilisé des souris transgéniques, porteuses de tumeurs. Elle a quantifié les cellules DCX+ présentes dans les deux régions du cerveau où elles résident habituellement. Elle a alors constaté que, lors de l'établissement d'une tumeur, leur quantité est réduite dans l'une d'elles: la zone sous-ventriculaire. "Il y avait deux explications: soit les cellules DCX+ mourraient dans cette région sans qu'on en connaisse la cause, soit elles quittaient cette zone, ce qui pouvait expliquer leur apparition au niveau de la tumeur".

Différentes expériences ont montré que cette seconde hypothèse était la bonne avec la mise en évidence du passage des cellules DCX+ de la zone sous-ventriculaire du cerveau dans la circulation (La circulation routière (anglicisme: trafic routier) est le déplacement de véhicules automobiles...) sanguine et de l'extrême similarité entre les cellules centrales et celles retrouvées dans la tumeur. "En pratique, nous constatons des anomalies de perméabilité de la barrière hématoencéphalique de la zone sous-ventriculaire chez les souris cancéreuses, favorisant le passage des cellules DCX+ dans le sang. Rien ne permet pour l'instant (L'instant désigne le plus petit élément constitutif du temps. L'instant n'est pas...) de savoir si ce problème de perméabilité précède l'apparition du cancer sous l'effet d'autres facteurs, ou si elle est provoquée par le cancer lui-même, via des signaux issus de la tumeur en formation.

Quoi qu'il en soit, les cellules DCX+ migrent dans le sang jusqu'à la tumeur, y compris dans les nodules métastatiques, où elles s'intègrent au microenvironnement. Là, elles se différencient en neuroblastes puis en neurones adrénergiques producteurs d'adrénaline. Or, l'adrénaline régule le système vasculaire et c'est probablement ce mécanisme qui favorise à son tour le développement tumoral. Mais ces hypothèses restent à vérifier".

Une piste thérapeutique

En attendant, cette recherche ouvre la porte à une nouvelle piste thérapeutique: De fait, des observations (L’observation est l’action de suivi attentif des phénomènes, sans volonté de les...) cliniques montrent que les patients atteints de cancer de la prostate qui utilisent des bêtabloquants (qui bloquent les récepteurs adrénergiques) à des fins cardiovasculaires, présentent de meilleurs taux de survie. "Il serait intéressant de tester ces médicaments en tant qu'anticancéreux (Un anticancéreux est un médicament permettant de lutter contre le cancer)" estime la chercheuse. Deux essais cliniques allant dans ce sens ont récemment ouvert aux Etats-Unis**. De façon plus générale, "l'étude de ce réseau nerveux dans le microenvironnement tumoral pourrait apporter des réponses sur le pourquoi des résistances à certains traitements et favoriser le développement de nouveaux médicaments", conclut-elle.

Notes:

* Laboratoire de Cancer et Microenvironnement, Equipe
Atip-Avenir, UMR967 Inserm/IBFJ-iRCM-CEA/Université Paris 11/Université
Paris Diderot, Fontenay-aux-Roses

** Beta Adrenergic Receptor
Blockade as a Novel Therapy for Patients With Adenocarcinoma of the
Prostate et Propranolol Hydrochloride in Treating Patients With Prostate
Cancer Undergoing Surger


Références

P. Mauffrey et coll., Progenitors from the central nervous system drive neurogenesis in cancer, Nature
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