Les restes d'un des plus anciens marsupiaux connus dans le monde ont été découverts dans un gisement de Charente-Maritime, par une équipe de scientifiques du Muséum, du CNRS, et de l'Université de Rennes. Cette découverte permet de proposer une nouvelle hypothèse des voies de migration des premiers mammifères marsupiaux. Les résultats sont publiés cette semaine dans la revue PNAS.
Arcantiodelphys marchandi, molaire supérieure du plus ancien mammifère de type moderne trouvé en Europe. L'espèce, encore mal connue, est documentée par un matériel très rare provenant d'un gisement français daté de 99 ma (Cénomanien).
Dans l'histoire des premiers mammifères de type moderne (marsupiaux et placentaires), au Crétacé, l'Europe est une quasi Terra incognita. Aucun fossile n'est connu entre 125 et 84 millions d'années (ma), et très peu jusqu'à la limite Crétacé-Tertaire (65 ma).
La découverte de l'équipe de scientifiques lève le voile sur cette page blanche de l'histoire européenne dans le Cénomanien (99 ma) de Charente-Maritime. Il s'agit de quelques dents, récoltées après lavage-tamisage de 5 tonnes de sédiments, d'un nouveau mammifère de taille minuscule, appelé Arcantiodelphys marchandi, qui est l'un des marsupiaux les plus anciens et plus primitifs connus dans le monde. Il est aussi le plus ancien représentant connu en Europe des mammifères de type moderne.
Cette découverte a été réalisée dans le cadre d'un programme de recherches et de fouilles de l'Université de Rennes sur les gisements à vertébrés du Crétacé des Charentes, auquel collabore le Muséum.
Arcantiodelphys marchandi renouvelle notre connaissance des premiers temps de l'histoire des marsupiaux, jusque là essentiellement nord-américaine d'après les fossiles connus. Sa découverte montre que l'Europe a joué un rôle méconnu dans l'origine et le tout début de l'évolution des marsupiaux. Elle conforte également d'anciennes relations entre l'Europe et l'Amérique du Nord.
C'est à partir de ces marsupiaux archaïques du Crétacé "euraméricain", que le groupe va coloniser les continents du sud, Amérique du Sud et surtout Australie où ils sont aujourd'hui les plus diversifiés. Les opossums et les kangourous sont les représentants actuels de cette lointaine origine nordique des marsupiaux.
Carte du monde au Cénomanien (99 ma) qui résume les hypothèses des voies de migrations des premiers mammifères marsupiaux à partir de leur centre d'origine asiatique. La découverte d'Arcantiodelphys marchandi montre qu'on peut envisager à cette époque un passage direct entre l'Asie et l'Europe (1'-2'), alternativement à l'hypothèse classique d'un passage par la voie nord-américaine (1-2). Elle conforte également les relations fauniques et géographiques anciennes entre l'Amérique du Nord et l'Europe, qu'on reconnaît comme témoins d'une grande paléo-province continentale euraméricaine.