Bien que les "gènes" soient perçus par tout un chacun comme les briques de base de l'hérédité, de nouvelles recherches ont montré que les scientifiques eux-mêmes rencontrent de grandes difficultés à convenir de quels éléments ils sont effectivement constitués. Ce manque de consensus est si grand que le concept même de
gène est excessif, affirme le Dr.Karola Stotz, un des responsables du
projet "Representing Genes".
Pour le professeur Paul Griffiths, de l'Université du Queensland qui a également travaillé sur le projet, "la réalité de la structure de génome défie aujourd'hui l'image conventionnelle du gène de la même manière que la réalité de la
physique des particules défie l'image traditionnelle de la
matière. Les 'particules' du
monde quantique peuvent ne pas posséder certaines propriétés apparemment essentielles telles que le fait de posséder une
masse ou d'être localisable en un endroit précis. De la même manière, certaines des prédictions qui pourraient raisonnablement être faites à propos des gènes ne sont pas respectées par certaines classes importantes de séquences d'ADN".
"Les physiciens ont modifié et adapté le concept de particule en fonction du monde étrange que proposait la physique quantique", continue le professeur Griffiths. "De la même façon, les scientifiques du monde 'post-génomique' continuent à parler de gènes pour désigner quelque chose qui n'a plus vraiment de rapport avec ce que l'on peut trouver dans les manuels scolaires".
Une vision courante d'un gène est celle de séquences continues de bases d'ADN qui seraient responsables de telle ou telle caractéristique. Mais il y a de nombreux exemples de "gènes" de qui ne se conforment pas à cette configuration. Un gène unique peut se composer d'ADN à différents emplacements, voire se trouver sur différents chromosomes. Cet ADN est coupé et collé pour produire une fonction. Aucun pris séparément n'est un gène attribué à cette fonction. Par exemple, une caractéristique éliminée par sélection naturelle peut réapparaître grâce à de nouveaux gènes capables de la produire.
"Le mot 'gène' est un des plus puissants de la biologie moderne mais les scientifiques doivent reconnaître plus explicitement que leurs études sur les gènes moléculaires, les gènes évolutionnaires et les gènes statistiques divergent de plus en plus", indique Paul Griffiths. "Les gènes 'égoïstes', les gènes responsables d'une
maladie ou les gènes comportementaux ont, par exemple, des significations radicalement différentes. Il y aura des malentendus massifs si ce que l'on comprend de l'un est appliqué dans le domaine d'étude d'un autre".