Des physicien·ne·s ont, pour la première fois, mesuré l'absorption par une boîte quantique unique d'une onde électromagnétique dans le domaine térahertz.
La lumière visible ou infrarouge interagit suffisamment fortement avec la matière pour permettre d'effectuer des mesures spectroscopiques sur des objets individuels comme des molécules ou des nano-objets tels que des boîtes quantiques. Il n'est hélas pas possible d'étendre ces techniques pour accéder au domaine des ondes térahertz, car leurs longueurs d'onde plus grandes interagissent trop peu avec la matière. Une équipe de l'Institute of Industrial Science de l'Université de Tokyo en collaboration avec des physiciens du Laboratoire Pierre Aigrain - LPA (CNRS/ENS/UPMC/Univ. Paris Diderot) vient de contourner cette difficulté et a pour la première fois mesuré l'absorption d'ondes térahertz par une nano-boîte quantique unique. Pour y parvenir, les chercheurs ont d'une part exalté l'interaction entre l'onde et la nano-boîte quantique à l'aide d'une antenne de taille micrométrique et d'autre part procédé à une détection électrique de l'absorption de photons térahertz en plaçant la boîte quantique au cœur d'un transistor. Ces travaux sont publiés dans la revue Nano Letters.
La boîte quantique étudiée par les physiciens est une boîte autoassemblée d'arséniure de gallium et d'indium d'un diamètre d'une centaine de nanomètres et d'une dizaine de nanomètres d'épaisseur. Après avoir repéré une telle boîte sur son substrat, les chercheurs ont déposé de part et d'autre deux électrodes en alliage de titane et d'or à 20nm de distance de la boîte. Ce faisant, ils ont ainsi réalisé un transistor sensible à la présence d'un seul électron à cause de sa très petite taille. Chaque photon térahertz absorbé par la boîte se traduit en un électron traversant le dispositif, ce qui permet une détection électrique directe des absorptions.
Les chercheurs ont donné aux électrodes une forme de "noeud papillon" haut de 12 micromètres et large de 25 micromètres, ce qui en fait une antenne concentrant le rayonnement térahertz dans la zone de la boîte quantique. Ils ont alors effectué leurs mesures en éclairant cet ensemble par une source thermique peu intense et en contrôlant le potentiel électrostatique de la boîte, et donc, le nombre d'électrons qui y résident. Les mesures, effectuées à 4.6 K leur ont permis d'identifier la nature des mécanismes responsables de l'apparition du photo-courant. Outre un photo-courant induit par la photo-ionisation classique où le photon promeut un des électrons de la boîte au-dessus du niveau de Fermi des électrodes, les expériences révèlent l'existence d'un mécanisme de photo-courant induit par les corrélations électroniques. Cette nouvelle méthode de détection établie dans le cas d'une boîte quantique de semi-conducteur pourra être appliquée à différents nano-objets comme les nanotubes de carbone, les nanofils et même des molécules et devrait se révéler un outil de choix pour caractériser des états électroniques en couplage fort avec les vibrations.
Image SEM d'un transistor à un électron inséré dans le gap d'une nano-électrode forme de nœud papillon.
Spectres de photo-courant en fonction de l'énergie des photons pour différentes occupations du pseudo-atome "plat".