Des pièges à ions multichargés dans la couronne solaire

Publié par Adrien le 25/04/2018 à 00:00
Source: CNRS-INSU
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Pourquoi l'atmosphère externe du Soleil: la couronne solaire, étendue mais très peu dense, est-elle beaucoup plus chaude que les couches de surface plus basses ? Cela reste une question posée aux scientifiques. Une nouvelle étude de G. Fleishman et al., parue le 17 avril 2017 dans The Astrophysical Journal et co-écrite par des membres du pôle solaire du Laboratoire d'études spatiales et d'instrumentation en astrophysique, montre à partir de cartographie UV et magnétique effectuées par le satellite Solar Dynamics Observatory (SDO, expériences AIA et HMI) qu'une partie seulement de la matière des boucles coronales est visible dans l'ultraviolet. De la matière reste cependant invisible aux observations. Le phénomène serait dû, selon les auteurs, au piégeage des ions multichargés dans un des pieds de la boucle. Ces ions, responsables de l'émission ultraviolette, viendraient s'y concentrer, au détriment du sommet et de l'autre pied de la boucle et échapperaient par conséquent à la détection des observateurs.


Région active AR 11158, au moment de l'éruption X2.2 du 15 février 2011. Superposition de la carte de composante verticale de la densité de courant électrique photosphérique (montant en rouge, descendant en bleu) et de l'émission UV observée par SDO/AIA dans la bande 171 Å (zones grises). La superposition a été réalisée par Sophie Musset en stage M2 au pôle solaire du LESIA. La carte de courant électrique a été réalisée au pôle solaire du LESIA de l'Observatoire de Paris en appliquant le code d'inversion UNNOFIT (Landolfi et al., 1984; Bommier et al., 2007) aux données de SDO/HMI.

La répartition des ions multichargés dans la couronne solaire serait rendue inhomogène par l'existence de ce piège. Cela expliquerait la densité globale des ions, plus faible que la densité mesurée par leurs émissions, qui est locale. Un écart notable avait en effet été noté dans l'abondance de certains éléments (ceux facilement ionisables) entre la surface solaire et la couronne, que l'existence de ce piège pourrait expliquer par les inhomogénéités spatiales qu'il induit.

Il y aurait aussi dans la couronne, des boucles et de la matière qui ne se manifestent pas de manière visible mais qui constituent néanmoins un réservoir d'énergie libre, suspectée par les théoriciens dans leurs bilans énergétiques des éruptions solaires (Aschwanden, Xu & Jing, 2014). En effet, les boucles coronales sont situées au-dessus des régions actives où se produisent les éruptions.

La présence du piège pourrait s'expliquer ainsi: il a été remarqué que les émissions UV se situent préférentiellement au-dessus des zones de courant électrique photosphérique(*) montant (composante de vecteur densité de courant Jz > 0). Dans leur article, Gregory Fleishman, du New Jersey Institute of Technology (USA), et ses collaborateurs ont proposé une explication théorique de cette dissymétrie. Le courant va du pôle + (Jz > 0) au pôle - (Jz 1, c'est-à-dire si l'ion est multichargé, la force d'entraînement domine. Alors ces ions descendent vers la photosphère à l'extrémité Jz > 0 de la boucle de courant. Comme les couches plus basses de l'atmosphère solaire sont plus froides que la couronne, les ions se recombinent alors avec les électrons qui les entraînaient et leur charge Z diminue. Lorsqu'ils atteignent l'état de charge Z=1, cela s'inverse, la force électrique devient dominante et ils sont renvoyés vers le haut (et vers le pôle -), où ils s'ionisent de nouveau sous l'effet de la température et tout recommence. C'est le piège à ions.

C'est en superposant des cartes d'émission UV des ions multichargés et de courant électrique photosphérique, que la dissymétrie +/- a été mise en évidence dans les rubans d'éruptions solaires. Cette superposition, procédé innovant, a été effectuée au pôle solaire du LESIA. Les cartes de champ électrique sont dues à l'analyse de la polarisation des raies spectrales émises par les atomes ou ions, ce qui fait donc intervenir la physique atomique. Ce procédé est le résultat d'une action pluridisciplinaire, au cours de laquelle des chercheurs de plusieurs spécialités (observations solaires, physique atomique) ont été réunis. En regardant le même objet sous deux aspects différents, le bénéfice est plus grand qu'un simple doublement de l'information.
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