Un nanomoteur biologique qui "marche" le long de l'ADN

Publié par Michel,
Source: CNRSAutres langues:
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A l'échelle microscopique, comment les nanomoteurs convertissent-ils l'énergie chimique en mouvement ? En travaillant sur une enzyme de virus, des chercheurs du CNRS ont montré que ces molécules utilisent l'agitation thermique pour avancer.

Le monde vivant renferme des molécules qui se comportent comme des moteurs: elles se déplacent le long d'un brin d'ADN en "brûlant" de l'énergie. À cette échelle (1/10 000e du diamètre d'un cheveu), on ignore comment de tels nanomoteurs convertissent l'énergie en mouvement.


Les chercheurs ont fixé l'ARN polymérase (en gris, à gauche)
sur une lamelle de microscope.
Avec un piège optique contenant une bille de silice (à droite),
ils ont exercé sur l'ADN une traction qui s'oppose
au mouvement de la polymérase.
Ce dispositif expérimental a permis de montrer que
l'ARN-polymérase était un "moteur brownien".

Les chercheurs du Laboratoire Pierre Aigrain ont travaillé sur les ARN-polymérases. Ces enzymes sont impliquées dans la transcription (la première étape de la synthèse des protéines à partir de l'ADN): elles se déplacent le long de l'un des brins d'ADN à une vitesse de l'ordre de la centaine de nucléotides (1) par seconde, en copiant le code génétique dans des molécules d'ARN qu'elles synthétisent à mesure de leur avancée.

Jusqu'à présent, deux hypothèses concurrentes ont cohabité: soit l'enzyme convertit directement l'énergie chimique des nucléotides qu'elle polymérise en énergie mécanique, soit elle est "poussée" par les molécules qui baignent avec elle dans la cellule et qui la percutent de façon aléatoire du fait de l'agitation thermique, un phénomène connu sous le nom de "mouvement brownien".

Les chercheurs ont travaillé sur l'ARN polymérase d'un virus de bactérie, car c'est une molécule simple (constituée d'une seule protéine) et facile à préparer. Ils ont fixé l'ARN polymérase sur une surface solide et, en même temps, ils ont exercé sur l'ADN une traction qui s'oppose au mouvement de la polymérase le long de cet ADN. Ils ont ainsi estimé la vitesse de l'enzyme en fonction de la concentration en nucléotides du milieu et de la force appliquée. Les résultats sont surprenants. Quand le milieu est fortement concentré en nucléotides, la vitesse de l'enzyme n'est pas affecté par la traction. En revanche, quand le milieu est faiblement concentré en nucléotides, le mouvement est ralenti.

A l'aide d'un modèle simple et à partir de ces données expérimentales, les chercheurs ont estimé la variation d'énergie du système, associée au mouvement de la polymérase le long de l'ADN. Cette variation est faible comparée à la variation d'énergie associée à la polymérisation des nucléotides, mais elle est très proche de l'énergie liée au mouvement brownien. Ainsi, on peut presque considérer que le mouvement de la polymérase est lié à l'agitation thermique, faisant de celle-ci un "moteur brownien".

Pourquoi la molécule avance-t-elle dans un sens plutôt que dans l'autre, puisque les chocs se produisent de façon aléatoire ? Parce que la polymérisation des nucléotides crée de l'irréversibilité, répondent les chercheurs: lors de leur polymérisation, ils sont clivés vers une forme plus stable que celle où ils se trouvaient, ce qui empêche l'ARN polymérase de revenir en arrière.

(1) Les nucléotides sont les briques élémentaires de l'ARN ou de l'ADN.

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