Souffrir jusqu'au dernier souffle ?

Publié par Adrien,
Source: Jean Hamann - Université LavalAutres langues:
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En fin de vie, la douleur physique est encore bien présente chez les personnes atteintes de cancer.

La médecine palliative parvient-elle à réfréner efficacement la douleur des patients cancéreux en fin de vie ? Pas toujours, répondent des chercheurs qui ont étudié la question dans huit centres de soins palliatifs au Canada. Les données publiées par cette équipe dans la revue scientifique Pain Research and Management indiquent que la douleur physique frappe 70 % des patients qui y sont soignés.

Chez le tiers des sujets qui ont pris part à l'étude, cette douleur atteint ou dépasse un degré d'intensité jugé modéré; 5 % des patients la qualifient même de sévère à extrême. "Ces résultats nous ont surpris parce que le contrôle de la douleur est une priorité dans les unités de soins palliatifs où l'étude a été menée et, en plus, 92 % des patients prenaient des opioïdes", souligne Pierre Gagnon, professeur à la Faculté de pharmacie, spécialiste en psycho-oncologie au Centre de recherche en cancérologie et coauteur de l'étude.

Menée auprès de 381 patients, cette recherche visait non seulement à chiffrer la prévalence et l'intensité de la douleur physique, mais aussi à établir des liens entre ces variables et 21 symptômes et craintes associés au cancer. Comparé aux patients qui éprouvaient peu ou pas de douleur physique, les patients souffrants étaient deux à trois fois plus sujets au malaise généralisé, à la somnolence, aux nausées et à la faiblesse. Les problèmes d'anxiété et de dépression étaient eux aussi de deux à trois fois plus courants dans le groupe des patients souffrants, tout comme les sentiments de perte de dignité, de perte de contrôle et d'isolement social.

Les patients qui rapportaient des douleurs allant de sévères à extrêmes étaient neuf ans plus jeunes que la moyenne (67 ans). La prévalence de la dépression (35 %) et de l'anxiété (50 %) était particulièrement élevée dans ce groupe. "L'épuisement et le découragement qu'entraîne la douleur peuvent conduire à la dépression, commente le professeur Gagnon. Il est aussi possible que des patients anxieux et dépressifs rapportent plus de douleurs."

Les statistiques présentées dans Pain Research and Management sont inquiétantes, reconnaît le psycho-oncologue, et la situation pourrait être pire dans les centres où il n'y a pas d'équipe spécialisée en soins palliatifs. Mais, précise-t-il, ces données ont été recueillies il y a plus de cinq ans et, si l'étude était reprise aujourd'hui, on constaterait sans doute une amélioration. "Il y a eu des progrès notables en maîtrise de la douleur, mais le problème n'est pas réglé pour autant. Les équipes spécialisées en soins palliatifs sont surchargées de sorte que seulement une minorité de patients profite de leurs services. C'est pour cette raison que les médecins de famille doivent aussi participer aux soins palliatifs. La formation actuelle des étudiants en médecine tient davantage compte de cet aspect."

En 2011, est-il utopique pour un patient atteint de cancer d'espérer vivre ses derniers jours sans être tourmenté par la douleur? "Non, répond sans hésitation le professeur Gagnon. Avec un bon soutien, on peut venir à bout de la douleur dans la majorité des cas. Il nous reste toutefois des choses à apprendre sur le plan scientifique et beaucoup de chemin à faire sur le plan de l'organisation des soins palliatifs avant que tous les patients puissent en bénéficier."
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