Qui est en mesure de lire les petits caractères imprimés ? "Plus l'acuité visuelle est grande, mieux l'oeil est capable de distinguer les détails. Les personnes avec une acuité supérieure à 10 perçoivent donc les objets plus petits comme les caractères imprimés sur les contenants de médicaments", affirme le professeur Jocelyn Faubert, directeur du Laboratoire de psychophysique et de perception visuelle de l'École d'optométrie de l'
Université de Montréal.
L'acuité visuelle désigne la capacité de voir de petits objets en fonction de leur éloignement par rapport au sujet qui regarde, indique le professeur. "On mesure généralement cette aptitude à partir d'une charte d'acuité où sont représentés de petits caractères noirs, des optotypes, sur un fond blanc afin d'obtenir un contraste maximal."
C'est l'ophtalmologiste Ferdinand Monoyer qui a mis au point en 1875 cette échelle de mesure encore utilisée de nos jours. Ce test consiste à présenter au sujet un
tableau comportant une série de lettres écrites dans un ordre aléatoire et réparties sur 10 lignes. La taille des lettres de chaque ligne décroît au
fur et à mesure. Le résultat du test est déterminé en fonction de la petitesse des lettres discernées. Un score de 10/10 sur l'échelle de Monoyer correspond à la
moyenne de l'acuité visuelle de la population. C'est la
norme. Mais il y a des gens qui obtiennent des résultats supérieurs à 10.
"L'acuité dépend principalement de la forme du cristallin, de l'oeil et de la cornée, mais aussi de la densité des photorécepteurs sur la
rétine et du traitement de l'image par le
cerveau", précise Jocelyn Faubert.
Grâce à l'échelle de mesure de Monoyer, on peut déterminer si le sujet est emmétrope (vision normale), myope (voit moins bien de loin) ou hypermétrope (voit moins bien de près). "On considère que la vue est de 10/10 lorsque le sujet peut voir des lettres de 7,3 millimètres environ à une distance de cinq mètres. Une personne qui reconnaît les lettres de 4 ou de 5 millimètres aura un résultat d'acuité de 16/10 dans le premier cas et de 14/10 dans le second", signale M. Faubert, qui rappelle que l'âge est aussi un facteur de la variabilité entre les individus.
Au cours de la vie, l'acuité visuelle va croître et décroître, explique-t-il. En naissant, l'enfant ne dispose pas de toutes les connexions neuronales que requiert une bonne vision. Son acuité est faible. Mais, progressivement, sous l'action des gènes et avec l'expérience, celle-ci va atteindre les 10/10 vers l'âge de 5 ans et souvent les dépasser à l'adolescence. Puis, à 40 ans passés, avec la presbytie qui s'installe, on revient graduellement aux 10/10. Sans lunettes, il est de plus en plus difficile de lire ou d'enfiler une aiguille. Le déclin se prolonge jusqu'à la vieillesse, notamment en raison du jaunissement du cristallin.
Selon M. Faubert, avoir une bonne vue ne se limite toutefois pas à une acuité de 10/10. "C'est aussi bien voir les mouvements, les contrastes et les reliefs de même qu'être capable d'apercevoir les objets en périphérie comme les passants et les voitures dans la
rue. Et ça, ce n'est pas lié à l'acuité visuelle. C'est surtout une fonction cérébrale."