Logée discrètement dans notre cerveau se trouve une petite zone appelée aire tegmentale ventrale, ou ATV. Cette région est essentielle dans notre vie quotidienne, car c'est elle qui régit notre rapport aux récompenses et à la motivation. Son secret ? La dopamine, une substance chimique que le cerveau libère lorsqu'il anticipe quelque chose d'agréable.
Une équipe internationale composée de chercheurs des universités de Genève (UNIGE), Harvard et McGill vient de révéler que cette petite région cérébrale a des capacités encore plus étonnantes qu'on ne le pensait. Grâce à un algorithme innovant, ils ont découvert que l'ATV prévoit non seulement l'arrivée d'une récompense, mais indique aussi précisément quand celle-ci est attendue.
Cette recherche passionnante, publiée dans la revue Nature, montre l'importance grandissante de la collaboration entre neurosciences et intelligence artificielle.
Jusqu'à présent, les scientifiques pensaient que l'ATV se contentait d'indiquer si une récompense allait arriver ou non. En effet, des études réalisées dans les années 1990 avaient montré que cette zone libère de la dopamine dès qu'un signe (comme une lumière ou un son) annonce une récompense future, et non au moment de la récompense elle-même.
Une prédiction encore plus élaborée
Cette capacité du cerveau à prévoir les récompenses futures est aussi à la base de nombreuses techniques utilisées dans l'intelligence artificielle, comme celle qui a permis à Alpha Go de battre le champion mondial du jeu de Go. Les chercheurs ont donc voulu explorer cette similitude plus en profondeur.
Leur découverte a été surprenante: l'ATV ne se contente pas de prévoir une récompense globale, elle sait aussi précisément à quel moment chaque récompense sera obtenue. Certains neurones de cette zone se concentrent sur les récompenses proches (dans quelques secondes), d'autres sur celles qui arriveront dans quelques minutes, et d'autres encore anticipent des événements beaucoup plus éloignés.
Cette diversité permet à notre cerveau d'être très flexible, capable de privilégier soit une satisfaction immédiate, soit une récompense différée, selon les circonstances et les besoins du moment.
Quand neurosciences et intelligence artificielle collaborent
Pour arriver à ces résultats étonnants, l'équipe a combiné deux approches très différentes. Alexandre Pouget et son équipe avaient mis au point un algorithme mathématique capable de prévoir précisément le moment des récompenses. Les chercheurs de Harvard, eux, avaient enregistré l'activité réelle de l'ATV chez des animaux en situation d'attente de récompenses.
En appliquant l'algorithme à ces données réelles, ils ont observé une parfaite correspondance entre la théorie et la réalité. Cette expérience montre à quel point les techniques d'intelligence artificielle peuvent non seulement s'inspirer du fonctionnement du cerveau humain, mais aussi aider les neurosciences à mieux comprendre nos propres mécanismes internes.
Une découverte qui ouvre la porte à de nouvelles pistes pour comprendre comment nous prenons nos décisions et comment nous gérons nos attentes face aux événements futurs.