Les altérations physiologiques des coraux soumis à des stress biotiques et/ou abiotiques sont largement méconnues. Une étude initiée par le laboratoire Ecologie et Evolution des Interactions a permis de montrer qu'une bactérie, dont la virulence est thermo-dépendante, était capable de subvertir les défenses immunitaires du corail. Ces résultats sont à paraître dans la revue The Journal of Biological Chemistry (numéro de Juillet 2011).
Les changements globaux affectent de nombreuses espèces d'invertébrés marins parmi lesquels les coraux scléractiniaires présentent un intérêt majeur tant d'un point de vue écologique que socio-économique. Dans ce contexte et compte tenu du manque de connaissances dans le domaine, de nombreux travaux ont été engagés ces dernières années afin de mieux cerner les perturbations physiologiques subies par les coraux en situation de stress (abiotiques et biotiques).
Le laboratoire d'Ecologie et d'Evolution des Interactions de Perpignan (2EI, UMR 5244) s'intéresse à cette question dans un cadre collaboratif impliquant des chercheurs de différents horizons (Centre Scientifique de Monaco, IRD, Universités de Liège, Montpellier 2, et Lille 1). Ensemble, ces scientifiques viennent de découvrir un élément clé de la défense antimicrobienne de Pocillopora damicornis, le premier peptide antimicrobien décrit chez un corail constructeur de récif. Au travers de la publication consacrée à cette découverte, cette équipe de chercheurs a montré que ce peptide, nommé damicornine, présente une structure moléculaire apparentée aux toxines d'anémones, ce qui suggère que ces molécules descendent d'un ancêtre commun. Dans la même étude, il est également montré qu'un vibrion pathogène du corail (Vibrio coralliilyticus) perturbe l'expression de cet élément clé de la défense innée du corail, et ce dès la pénétration de la bactérie dans les tissus coralliens.
Cette bactérie, dont la virulence est induite par l'augmentation de la température, va inhiber la production de la damicornine, affaiblissant de fait les défenses du corail et permettant alors à la bactérie de se multiplier et de lyser les tissus coralliens, jusqu'à ce que mort s'en suive... De tels mécanismes ont déjà été décrits par le passé pour d'autres bactéries pathogènes, mais c'est une première pour une bactérie du genre Vibrio.
Ces résultats sont importants à plus d'un titre car ils ouvrent de nombreuses perspectives qui pourront déboucher à terme vers une meilleure protection de cet écosystème corallien si important et aujourd'hui si menacé avec l'augmentation en fréquence et en intensité des agressions abiotiques et biotiques lesquelles sont intimement liées dans ce modèle d'étude.
Contact chercheur
Mitta Guillaume, Professeur UPVD -UMR 5244 CNRS Université de Perpignan Via Domitia
Ecologie et Evolution des Interactions (2EI)