Le Groupe Chronos, “observatoire de la chronomobilité”, rend compte dans son “Théma” du 26 juillet de deux pratiques apparemment contradictoires du téléphone en public: le montrer, ou le masquer.
"Je saisis mon téléphone et le colle à mon oreille, le regard vers le bas, marchant lentement en arabesques: je suis occupé, ne pas déranger". Le signal est clair et admis, au point, décrit la chercheuse Joëlle Menrath, de donner naissance à des “petites impostures”: “On s'en sert quand on n'a pas envie de parler, tout en faisant semblant de parler“, pour se donner une contenance, pour éviter d'être abordé(e)...
Autre attitude, bien connue également: montrer son téléphone dernier-cri, customisé (les Japonais sont les spécialistes), faire entendre sa sonnerie, afficher ses fonds d'écran...
Mais tout change quand on porte une oreillette sans fil: alors je ne porte rien, je ne montre rien, mon regard reste haut... et je semble parler tout seul, ce qui, semble-t-il, dérange bien plus (à nuisance sonore égale) mes voisins. Encore, aujourd'hui, les dispositifs Bluetooth ont-ils (si l'on peut dire) le bon goût d'être gros, assez visibles et assez laids: après quelques secondes d'étonnement, mes voisins comprennent vite la situation. Mais qu'en sera-t-il lorsque ces accessoires seront devenus invisibles ? Ou - à nouveau la même contradiction - visibles, mais comme des accessoires de mode, des lunettes ou des boucles d'oreille ?
Visible ou invisible, manifeste ou discret: la tension entre ces “manières d'être” des outils technologiques (et de leurs utilisateurs) ne fera que croître dans les années à venir. On parierait volontiers qu'elle deviendra même un sujet de débat assez central.