Le mystère de l'anguille résolu ?

Publié par Adrien,
Source: Jean Hamann - Université LavalAutres langues:
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Grâce à des émetteurs satellites, les chercheurs ont recueilli de nouvelles informations sur le trajet emprunté par l'anguille d'Amérique lors de sa migration reproductrice.
Il a fallu plus d'un siècle, mais la preuve est maintenant faite: la migration reproductrice des anguilles d'Amérique les conduit bel et bien à la mer des Sargasses. En effet, dans le dernier numéro de la revue Nature Communications, une équipe dirigée par le professeur Julian Dodson, du Département de biologie, rapporte avoir établi la route migratoire de cette espèce grâce à des émetteurs satellites fixés à 28 anguilles. L'un de ces poissons a atteint la limite nord de la mer des Sargasses, lieu présumé de reproduction de l'espèce situé dans le triangle des Bermudes.

Cette démonstration met fin aux spéculations qui circulaient au sujet de la route migratoire et de la localisation de l'unique site reproducteur des anguilles d'Amérique. "Des larves d'anguilles ont été observées dans la mer des Sargasses dès 1904, ce qui laissait supposer que l'espèce se reproduisait dans cette zone, mais aucune anguille adulte n'avait jamais été observée dans cette partie de l'océan Atlantique", souligne Julian Dodson.

Les nombreuses expéditions visant à capturer des anguilles dans leur mystérieux site de rassemblement avaient toutes échoué, mais le développement d'émetteurs satellites a ouvert de nouvelles possibilités aux chercheurs. "Il fallait toutefois que ces appareils puissent mesurer et enregistrer la température et la profondeur de l'eau étant donné que, contrairement aux mammifères marins, ces poissons restent toujours sous l'eau. Il fallait aussi qu'on puisse programmer le détachement de l'émetteur pour que celui-ci remonte à la surface pour transmettre ses données à un satellite. Les premiers modèles qui possédaient toutes ces fonctions tout en étant assez petits pour être installés sur une anguille sont apparus il y a quelques années seulement", précise le professeur Dodson.

Entre 2012 et 2014, Julian Dodson et ses collaborateurs ont installé des émetteurs satellites sur 22 anguilles capturées en Nouvelle-Écosse et sur 16 autres provenant de la région de Rivière-Ouelle dans l'estuaire du Saint-Laurent. Ces dernières ont été transportées par camion puis par bateau jusqu'au large de la Nouvelle-Écosse afin de réduire les risques de prédation. Dans les semaines qui ont suivi la libération de ces anguilles, 28 émetteurs ont refait surface dans différentes zones de l'Atlantique et sont parvenus à transmettre les données qu'ils avaient enregistrées.

Les analyses ont révélé que toutes les anguilles adoptent des trajectoires et des patrons migratoires similaires. Près des côtes, elles semblent utiliser les gradients de salinité et de température pour gagner la haute mer. Une fois au large, un autre système de guidage semble prendre la relève. Ainsi, la seule anguille qui a fait toute la migration a maintenu une trajectoire rectiligne jusqu'à la mer des Sargasses. En 45 jours, cette anguille, capturée au Québec, a parcouru 2400 km. "Cela suggère l'existence d'un mécanisme de navigation qui fait probablement appel à la détection des champs géomagnétiques", avance Julian Dodson.

Le chercheur admet qu'il serait prématuré de tirer de grandes conclusions à partir d'une trentaine d'anguilles dont une seule a fait tout le trajet migratoire. "Nos données nous apprennent tout de même que les anguilles ne migrent pas en longeant les côtes, qu'elles peuvent faire cette migration en quelques semaines seulement et qu'elles se rendent bien à la mer des Sargasses. On savait depuis plus d'un siècle que des millions d'anguilles d'Amérique faisaient une migration reproductrice, mais personne n'avait encore observé d'adultes en haute mer ou dans la mer des Sargasses. Pour un scientifique, il s'agissait d'un mystère fascinant."

L'article paru dans Nature Communications est signé par Mélanie Béguer-Pon, José Benchetrit et Julian Dodson, du Département de biologie, Martin Castonguay, de Pêches et Océans Canada, et Shiliang Shan, de l'Université Dalhousie.
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