Selon l'analyse de certains scientifiques, l'ignorance actuelle du relief de la surface de la Lune pourrait représenter un obstacle aux projets ambitieux de plusieurs nations d'y retourner s'y poser.
Reliefs lunaires observés par la sonde européenne SMART-1 en juillet 2005
Une douzaine d'astronautes ont déjà marché sur la Lune, mais la connaissance détaillée de la topographie de sa surface est bien moins bonne que celle de Mars. Cela pourrait causer des soucis quand les prochaines vagues d'astronautes y retourneront: les USA projettent de se poser sur la Lune d'ici à 2018 et la Chine, l'Inde et l'Europe ont toutes des projets de missions en développement.
Avec les connaissances actuelles, aucune tentative d'atterrissage "ne répondrait à des critères satisfaisants de sécurité", selon Maria Zuber et Ian Garrick-Bethell, deux scientifiques planétaires du Massachusetts Institute of Technology (MIT). Même pour des missions non habitées, un grand investissement dans ce domaine doit être réalisé au préalable. Les alunissages d'Apollo ont eu lieu sous la pression de la Guerre Froide. Selon Zuber peu de personnes réalisaient alors les risques réels: "Quand ils se sont posés et ont vu une mer de rochers, ce fut d'une certaine manière une surprise pour eux".
Rochers et crevasses
La mission des deux robots d'exploration sur Mars depuis 2004 fournit un bon modèle de la façon dont il faut procéder pour choisir des emplacements sûrs d'atterrissage pour les futures missions lunaires. Le relief, les caractéristiques du sol et d'autres facteurs doivent être analysés. Pour Zuber, les inégalités de la surface, les rochers et les crevasses, doivent être recensés au pire avec une résolution de seulement quelques mètres.
Des informations de ce genre sont disponibles pour Mars grâce aux années de travail de cartographie réalisé par les sondes en orbite autour de la planète rouge, dont trois sont encore en service, Mars Global Surveyor, Mars Odyssey, et Mars Express. La surface de Mars est désormais connue avec un précision de 1 mètre en altitude et de 100 m dans un plan horizontal et l'on possède de bonnes données sur la composition et la texture de sa surface.
Chaud et froid
Zuber et Garrick-Bethell font remarquer que la Lune est à l'inverse étonnamment mal cartographiée, en particulier pour sa face cachée. Quelques secteurs ont été relevés avec précision, mais seules des positions globales sont connues avec une précision de 100 mètres en altitude et de quelques kilomètres sur le plan horizontal.
Certaines des missions les plus scientifiquement intéressantes exigeront une amélioration substantielle de ces données afin d'assurer des atterrissages en toute sécurité. Les emplacements concernés sont les abords des cratères proches des pôles, qui bénéficient constamment de la lumière du Soleil ce qui sera utile pour fournir de l'énergie. A proximité immédiate, d'autres sites sont dans une ombre quasi-perpétuelle et peuvent donc abriter de la glace. Enfin, les pics déchiquetés au centre des cratères peuvent héberger des roches remontées depuis les profondeurs vers la surface lunaire.
Mais il y a toutefois de bonnes nouvelles. Si tout se passe bien avec tout un assortiment de missions de sondes orbitales, les données topographiques nécessaires devraient être recueillies d'ici à 2018. Ces missions incluent SMART-1 de l'ESA, déjà en orbite autour de la Lune, la sonde japonaise Selene prévue en 2006, les missions Chang'e 1 pour la Chine et Chandrayaan 1 pour l'Inde en 2007, et la sonde américaine Lunar Reconnaissance Orbiter (voir notre news) en 2008.