Les systèmes Micro-électro-mécaniques (MEMS, composants à l'échelle du micron) sont présents dans un nombre croissant d'appareils électroniques de la vie quotidienne. Leurs successeurs, les systèmes Nano-électro-mécaniques (NEMS, composants à l'échelle du nanomètre) sont en plein développement dans les laboratoires.
Jusqu'à présent, les NEMS étaient "passifs", c'est-à-dire qu'ils nécessitaient une source extérieure et encombrante (de l'ordre de quelques millimètres) de courant alternatif. Grâce à une idée ingénieuse, les chercheurs du laboratoire de physique de la matière condensée et nanostructures (CNRS/Université Lyon 1), ont trouvé le moyen de se débarrasser de cette source, en réalisant le premier NEMS actif, capable d'émettre un signal électrique périodique. Ils ont ainsi gagné six ordres de grandeurs d'un coup, passant de l'échelle du millimètre à celle du nanomètre.
Le fonctionnement de nombreux dispositifs électroniques nécessite la présence d'une "horloge", ou d'un générateur de courant alternatif qui donne le rythme. Les petits appareils (à l'échelle du millimètre), notamment les montres à quartz, sont alimentés par une pile électrique fournissant un courant continu et les oscillations sont générées par un cristal de quartz. En revanche à une échelle encore plus petite (l'échelle nanométrique), les composants sont "passifs", c'est-à-dire qu'ils nécessitent une source extérieure de signal variable, qui est toujours macroscopique, ce qui limite la miniaturisation.
Les chercheurs ont réalisé, pour la première fois, un système nano-électro-mécanique (NEMS) auto-oscillant, piloté par une source de tension continue. Il s'agit d'un nanofil de carbure de silicium (l'élément oscillant, comparable à un pendule), entouré d'un fil d'entrée du signal électrique et d'un fil de sortie. Pour rendre ce composant "actif", les chercheurs ont eu l'idée d'utiliser l'émission de champ: quand on applique une tension continue suffisante à un métal, on peut en extraire des électrons. Ici la tension est appliquée au nanofil, encore appelé résonateur. Le couplage introduit par l'émission de champ créé une instabilité, qui se traduit par des oscillations. Ces oscillations ont à leur tour un effet sur la tension, qui se répercute sur l'émission de champ, et ainsi de suite. Grâce à cette rétroaction, les oscillations s'auto entretiennent. Dans la vie de tous les jours, on peut observer un phénomène similaire avec un tuyau d'arrosage: si on augmente régulièrement le débit, il arrive un moment où le tuyau se met spontanément à osciller. La forme (voir figure) et la période des oscillations dépendent alors du débit. Le dispositif mis au point par les chercheurs est comparable au cas du tuyau, la tension électrique jouant le rôle du débit d'eau. Il émet ainsi, pendant l'auto-oscillation, un signal électrique périodique.
Lorsqu'on augmente régulièrement le débit dans un tuyau d'arrosage, celui-ci se met spontanément à osciller à partir d'une certaine valeur du débit. C'est le même phénomène que les chercheurs ont exploité pour créer des auto-oscillations dans un dispositif électrique
Grâce aux auto-oscillations, on sait désormais générer un signal alternatif à l'échelle nanométrique, à partir d'une simple tension continue. Ce résultat ouvre la voie au développement de générateurs de courant alternatif nanométriques, qui permettraient de transformer les NEMS en composants actifs, pleinement autonomes. Les débouchés de tels composants seraient alors nombreux, notamment dans l'industrie des télécommunications (téléphones portables, wifi ...), où l'on a besoin de signaux variables à des fréquences de l'ordre du gigahertz.