Ricochet se lance dans la course à l'étude de l'interaction neutrino/noyau

Publié par Adrien le 16/06/2019 à 08:00
Source: CNRS IN2P3
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C'est un des sujets brûlants du moment: l'interaction Neutrino/Noyau. A la dizaine d'expériences qui lui sont aujourd'hui consacrées à travers le monde, une nouvelle vient s'ajouter. Dénommée Ricochet, elle est conduite par Julien Billard, chercheur (Un chercheur (fem. chercheuse) désigne une personne dont le métier consiste à faire de la...) à l'IPNL, et Joe Formaggio, professeur au MIT. Leur stratégie (La stratégie - du grec stratos qui signifie « armée » et ageîn qui signifie...) ? S'appuyer sur les techniques de la chasse à la matière noire (En astrophysique, la matière noire (ou matière sombre), traduction de l’anglais...) pour mieux scruter l'interaction (Une interaction est un échange d'information, d'affects ou d'énergie entre deux agents au sein...).

Cela faisait 40 ans que les théoriciens avaient prédit le phénomène du "rebond" des neutrinos sur les noyaux atomiques. Un rebond très spécial que les physiciens appellent "la diffusion cohérente élastique neutrino-noyau" (CeνNS), et dont l'observation (L’observation est l’action de suivi attentif des phénomènes, sans volonté de les...) fournirait une nouvelle façon d'explorer les propriétés du neutrino. Un rebond qui est resté surtout insaisissable durant des décennies avant qu'en 2017 la collaboration Coherent ne l'observe. Dès lors, le monde de la physique est entré en effervescence, et pas loin d'une dizaine de collaborations se sont lancées dans l'étude de cette interaction. Aujourd'hui, l'Institut de Physique Nucléaire (La physique nucléaire est la science qui étudie non seulement le noyau atomique en tant...) de Lyon (IPNL) rejoint le concert à la faveur d'une ERC Starting Grant décrochée par l'un de ses chercheurs Julien Billard. Le coup d'envoi du projet Ricochet a été donné lors d'une réunion inaugurale qui s'est tenue les 6 et 7 mai dernier à l'IPNL en présence d'une trentaine de physiciens de laboratoires du CNRS et de laboratoires russes et américains.


La réunion inaugurale de Ricochet s'est tenue les 6 et 7 mai dernier à l'IPNL en présence d'une trentaine de physiciens de laboratoires du CNRS et de laboratoires russes et américains.

Pour bien comprendre l'engouement autour de l'interaction neutrino/noyau, il faut savoir que son étude précise pourrait ouvrir une brèche dans le tout puissant modèle standard. Une éventualité, qui remettrait en selle nombre de théories alternatives impliquant de nouvelles particules médiatrices. Reste que, détecter et mesurer avec précision un rebond de neutrino de basse énergie sur un noyau n'a rien de trivial. Loin de là ! Le choc en question, en plus d'être extrêmement rare, provoque un ridicule échauffement d'1 millionième de Kelvin... Imperceptible pourrait-on penser, mais pas pour les chercheurs de Ricochet. "Dans l'expérience Edelweiss (L'Edelweiss (Leontopodium alpinum), pied-de-lion, Gnaphale à pied de lion dans le Tyrol,...) de détection de la matière noire" explique Alexandre Juillard (Ingénieur de recherche (La recherche scientifique désigne en premier lieu l’ensemble des actions entreprises en vue...) à l'IPNL), "nous avions créé des détecteurs capables de mesurer des dissipations de chaleur de l'ordre de quelques dizaines de micro-K. C'est donc ce même système que nous allons adapter et perfectionner pour mesurer la diffusion du neutrino." Leur système est un cristal parfait de quelques dizaines de grammes de Germanium, de Silicium, de Zinc ou bien d'Aluminium, et refroidi dans un cryostat pour que ses atomes cessent de vibrer. Résultat le cristal affiche un "encéphalogramme énergétique" totalement plat et il ne reste plus qu'à attendre qu'un neutrino y laisse sa trace. Quand un neutrino interagit avec un noyau du cristal, il déplace le noyau, provoque un réarrangement du cristal, et le petit échauffement que l'équipe cherche à mesurer.


Cryostat de R&D fourni par le Labex LIO pour le développement des bolomètres de l'expérience Ricochet. Photo IPNL

Il faut ensuite que l'événement se produise. Hélas, les neutrinos interagissant très peu avec la matière, et la probabilité que le cristal capte un événement est juste infime. Certes les chasseurs de matière noire sont les rois de la patience, eux qui étaient à l'affut d'un événement qui ne devait se produire statistiquement qu'une fois par an dans leur détecteur (Un détecteur est un dispositif technique (instrument, substance, matière) qui change...), mais il ne faut pas exagérer. Les physiciens vont donc forcer le destin en allant s'installer auprès d'un réacteur nucléaire (Un réacteur nucléaire est un dispositif dans lequel une réaction en chaîne est...), là où les neutrinos sont produits en masse à raison d'un flux de 10^12 neutrinos par cm² et par seconde. Un déluge qui ramène la probabilité d'interaction avec un cristal d'un kilo à une dizaine d'événements par jour. Nettement plus alléchant. L'équipe de la collaboration Ricochet est donc à la recherche d'un hébergement de quelques mètres carrés avec vue imprenable sur un coeur de réacteur (Un réacteur peut désigner :). Plusieurs options sont étudiées dont celle de succéder à l'expérience Stereo de mesure de l'oscillation (Une oscillation est un mouvement ou une fluctuation périodique. Les oscillations sont soit à...) des neutrinos auprès du réacteur de l'Institut Laue-Langevin (L'Institut Laue-Langevin (ILL), nommé ainsi en l'honneur des physiciens Max von Laue (physicien...) à Grenoble. Cependant des mesures in situ doivent être conduites pour vérifier que le bruit de fond (Dans son sens courant, le mot de bruit se rapproche de la signification principale du mot son....), de neutrons notamment, ne risque pas d'aveugler l'expérience. "L'idéal serait de placer le détecteur sous le réacteur d'une centrale. Il y a là des espaces protégés des neutrons et des rayons cosmiques qui s'y prêteraient parfaitement" précise Alexandre Juillard.


Modélisation du détecteur CryoCube qui sera au coeur de l'expérience Ricochet / Image IPNL

En attendant que le site soit définitivement choisi, les équipes vont commencer la mise au point du détecteur. L'objectif est de disposer d'un prototype fonctionnel d'ici 2 ans, d'en produire une trentaine l'année suivante. La collecte de données, prévue pour une durée d'un an devrait commencer d'ici 4 ans après l'installation de l'expérience et sa mise en service. Le modèle standard a donc encore quelques années de répit avant que le couperet ne tombe.
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