Les réseaux de transmission quantique promettent de devenir des systèmes de communication fortement sécurisés. En transportant l'information grâce aux photons ou aux atomes, qui sont enchevêtrés de telle sorte que le comportement de l'un affecte l'autre, le réseau pourra facilement détecter n'importe quelle oreille indiscrète essayant de pénétrer le système.
Les physiciens de l'Institut de technologie de Géorgie viennent de franchir une étape importante dans le développement de ces systèmes en enchevêtrant un photon et un atome unique situé dans un nuage atomique. Selon les chercheurs, c'est la première fois qu'un enchevêtrement entre un photon et une excitation collective d'atomes a passé avec succès un test rigoureux du comportement quantique connu sous le nom de "violation de l'inégalité de Bell". Ces résultats sont une étape significative pour le développement de communications quantiques à longue distance.
Schéma de l'installation expérimentale
En s'appuyant sur des photons ou des atomes pour diffuser une information d'un endroit à un autre, la sécurité du réseau se fonde sur une méthode connue sous le nom de "distribution de clé quantique cryptée". Dans cette méthode, les deux particules porteuses de l'information, qubit photonique ou qubit atomique, sont enchevêtrées. En raison de cet enchevêtrement et d'une règle en physique quantique qui implique que la mesure d'une particule la perturbe, une éventuelle interception serait facilement détectée en ceci que l'acte d'écoute produirait des modifications du système.
Cependant beaucoup de défis subsistent pour développer de tels systèmes. L'un d'eux est de parvenir à ce que les particules stockent les informations suffisamment longtemps pour assurer leur acheminement vers la destination voulue (voir notre news). Les qubits photoniques sont de bons transporteurs et pourraient voyager sur de longues distances avant d'être absorbés, mais ils ne sont pas aussi aptes à stocker l'information très longtemps. Les qubits atomiques, pour leur part, peuvent stocker l'information pendant plus longtemps. Ainsi un système enchevêtré d'atomes et de photons offre le meilleur des deux mondes. L'astuce est d'obtenir l'enchevêtrement d'une manière simple exigeant le moins de matériel possible.
Les physiciens Alex Kuzmich et Brian Kennedy pensent qu'il faut pour cela adopter une approche collective. Au lieu d'essayer d'isoler un atome pour le faire passer dans l'état excité nécessaire pour l'enchevêtrer avec un photon, ils ont décidé d'essayer d'exciter un atome parmi un nuage d'atomes.
"Utiliser un qubit atomique collectif est beaucoup plus simple qu'un d'atome unique", explique Kuzmich, professeur de physique au Géorgia Tech. "Cela exige moins de matériel parce que nous ne devons pas isoler un atome. En fait, nous ne savons même pas, et n'avons pas besoin de savoir, quel atome dans le groupe est le qubit. Nous savons que le système est enchevêtré parce qu'il viole l'inégalité de Bell".
"Avec les atomes uniques, il est beaucoup plus difficile de contrôler le système parce qu'il y a énormément de préparation à effectuer", précise Kennedy, également professeur de physique à l'Institut. "Pour une excitation collective, la préparation initiale des atomes est minimale. On ne doit pas jouer trop sur leur état interne, ce qui est habituellement un souci énorme".
Non contents d'avoir fait passer à leur système le test rigoureux de l'inégalité de Bell, les chercheurs ont affirmé qu'ils pouvaient augmenter la durée pendant laquelle le nuage atomique pouvait stocker l'information jusqu'à plusieurs microsecondes. C'est cinquante fois plus long que le temps pris pour préparer et mesurer l'enchevêtrement atome-photon.