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Vers la création d'embryons chimériques animal-humain ?
Publié par Adrien, Source: BE Japon numéro 652 (21/06/2013) - Ambassade de France au Japon / ADIT - http://www.bulletins-electroniques.com/ ... /73394.htmAutres langues:
Le professeur Hiromitsu Nakauchi de l'Université de Tokyo mène des études impliquant des embryons chimériques animal-humain, et leur aboutissement se heurte au cadre bioéthique actuel. Elles viennent de franchir une étape importante en parvenant à se faire examiner par le comité de bioéthique dans le domaine biomédical placé sous l'autorité du CSTP (Conseil pour la Politique des Sciences et de la Technologie du Japon) dépendant directement du Premier ministre. Ce comité réunit des scientifiques, légistes et journalistes qui rendent un avis sur les enjeux d'éthique et de dignité humaine.
L'équipe du professeur Nakauchi a montré à plusieurs reprises au cours des dernières années qu'il était possible de générer un organe à partir de cellules iPS dans un embryon incapable de générer son propre organe. Cela résulte en la création d'une chimère, terme désignant de manière générale un organisme composé de tissus d'origines différentes et aux patrimoines génétiques différents. L'objectif avoué est de faire se développer des organes humains dans un animal tel que le porc pour pouvoir procéder à un prélèvement de l'organe arrivé à maturité. L'organe se développe à partir d'une cellule iPS dérivé d'un patient en attente de greffe, ainsi l'organe ne devrait pas provoquer de rejet une fois transplanté chez le patient. Compte tenu du faible nombre de donneurs au Japon et du nombre croissant de personnes nécessitant une greffe, ce type d'expérimentation apparaît comme une solution très intéressante.
Au Japon comme dans de nombreux pays, les expériences impliquant des embryons humains sont sujettes à des restrictions très contraignantes pour des raisons éthiques. La découverte des cellules iPS a permis de contourner ce problème en générant des cellules souches à partir de cellules somatiques différenciées telles que les cellules de la peau. En ce qui concerne les embryons chimériques, le Japon est l'un des rares pays possédant un cadre réglementaire sur ce sujet. Celui-ci a été mis en place en 2001 par le MEXT (Ministère de l'éducation, la culture, les sports, la science et la technologie) et il permet d'étudier les chimères animal-animal assez librement et même de laisser les embryons arriver à terme. Il est néanmoins plus restrictif envers les embryons animal-humain dont il autorise l'étude en recherche fondamentale pour les greffes, mais il interdit de réimplanter ces embryons dans l'utérus d'un animal ou de les laisser se développer au delà de deux semaines.
Les recherches du professeur Nakauchi se heurtent à présent aux limites de la loi de 2001. Après ses récents succès il souhaite aller de l'avant et se rapprocher du véritable but de ses recherches: la création d'organes humains matures facilement utilisables pour les greffes. Le gouvernement a chargé son comité d'éthique d'examiner le projet et de proposer un nouveau cadre réglementaire. La presse rapporte que le comité s'est déjà accordé sur le bien fondé de ce projet d'expériences. Le comité prévoit néanmoins un contrôle rigoureux de ce type de recherche. Les autorisations seraient accompagnées de nombreuses restrictions et leur délivrance n'aurait lieu qu'au cas par cas. Les questions qui subsistent concernent la levée des interdictions de la réimplantation d'un embryon chimérique animal-humain dans un utérus animal, ainsi que l'autorisation aux chercheurs de laisser la chimère arriver à terme. Dans un proche avenir, le comité pourrait considérer la question de l'élargissement du champ de recherche aux applications pour le développement de médicaments et l'étude du développement des maladies.
La presse indique que le comité va rendre son rapport final sur le sujet lors de sa prochaine assemblée en juillet. Il reviendra ensuite au MEXT d'en transformer les conclusions en directives réglementaires. La première expérience aurait alors pour but de démontrer qu'un organe humain peut se développer au sein d'un organisme animal à partir d'un embryon chimérique. D'après le professeur Nakauchi, si cette expérience réussit, le développement de cette méthode pour une application pratique pourrait se faire en 5 ans.