Dans une publication récente du Journal of Geophysical Research: Oceans, des scientifiques ont souligné le lien significatif entre l'expansion économique et les modifications chimiques des coraux. Leur méthode innovante impliquait l'analyse des niveaux de
baryum dans les coraux, ce qui a permis d'examiner des archives sur plusieurs décennies concernant les taux de développement régional et d'érosion.
L'Asie de l'Est et du Sud-Est a été le théâtre d'un développement fulgurant au cours des soixante dernières années, entraînant une
accélération rapide de l'érosion, parmi les plus importantes à l'échelle mondiale. Les experts s'accordent à dire que cette tendance risque fort de perdurer.
Il est essentiel de saisir où et à quelle cadence l'érosion se produit afin que les pays en pleine croissance puissent préserver leur rendement agricole. Toutefois, pour de nombreuses régions de l'Asie de l'Est et du Sud-Est, ces données sont absentes, complexifiant ainsi leur compréhension de l'état de leurs sols sur le long terme.
Les coraux pourraient détenir une réponse en conservant les traces de l'érosion à travers les décennies. En effet, lorsque les sédiments terrestres atteignent l'océan, ils transportent avec eux des éléments comme le baryum qui modifient la composition chimique de l'
eau de mer et s'infiltrent dans les squelettes des coraux et d'autres créatures marines. Puisque le baryum provient principalement des continents, sa présence dans les squelettes de coraux pourrait refléter l'érosion des sols vers la mer.
Les chercheurs ont proposé un modèle de l'érosion basé sur les concentrations et les isotopes de baryum dans les coraux. Les échantillons utilisés provenaient de la mer de Chine méridionale, près du sud de Taiwan et du centre du Vietnam, chacun offrant environ deux décennies de données.
Les résultats ont mis en évidence une corrélation entre l'érosion et le développement économique dans ces deux régions. L'échantillon de Taiwan, qui s'est formé entre 1980 et 2004, a révélé que de 1980 à 1995, le produit intérieur brut (PIB) de Taiwan et la teneur en baryum des coraux ont augmenté simultanément. À partir de 1996, bien que le PIB ait continué de croître, l'érosion a diminué. L'échantillon du Vietnam, qui s'est formé entre 1978 et 2003, a également montré une corrélation entre le développement économique et l'érosion.
Par conséquent, l'étude démontre que les coraux peuvent servir de témoins précieux pour fournir des données sur les taux d'érosion à long terme, aidant ainsi les pays en développement rapide à obtenir des informations cruciales sur l'état de l'érosion de leurs sols, et à prendre des mesures pour préserver leur production agricole.
Cette recherche ouvre de nouvelles voies pour la surveillance des interactions entre les activités humaines et les écosystèmes marins. Les coraux se révèlent être de véritables chroniqueurs de l'activité humaine. En effet, ils conservent dans leurs structures des preuves tangibles des changements environnementaux, notamment ceux induits par le développement économique. Ainsi, la lecture de ces archives vivantes, telles que les coraux, offre une perspective unique et précieuse pour comprendre et anticiper les impacts des activités humaines sur les milieux marins.
L'étude souligne également l'importance de la protection des récifs coralliens. Non seulement ces écosystèmes sont vitaux pour la biodiversité marine, mais ils jouent également un rôle clé en tant qu'indicateurs de la santé environnementale globale.