Une découverte archéologique en Afrique de l'Ouest révèle que les humains vivaient dans des forêts tropicales il y a 150 000 ans, bien avant ce que l'on pensait. Cette révélation remet en question notre compréhension de l'évolution humaine et des milieux qui l'ont façonnée.
Les forêts tropicales, souvent considérées comme des barrières naturelles pour les premiers humains, auraient en réalité joué un rôle clé dans leur développement. Une équipe internationale de chercheurs a réexaminé un site en Côte d'Ivoire, où des outils en pierre datant de cette époque ont été découverts, confirmant une présence humaine bien plus ancienne que prévu.
Une découverte qui bouleverse les certitudes
Jusqu'à présent, les preuves les plus anciennes d'une occupation humaine des forêts tropicales africaines dataient d'environ 18 000 ans. En Asie du Sud-Est, les traces remontaient à 70 000 ans. Cette nouvelle étude, publiée dans Nature, repousse cette date à 150 000 ans, doublant les estimations précédentes.
Les chercheurs ont analysé des sédiments du site de Bété I, en Côte d'Ivoire, où des outils en pierre avaient été découverts dans les années 1980. Grâce à des méthodes de datation modernes, ils ont pu établir que ces outils étaient utilisés il y a 150 000 ans, dans un environnement forestier dense.
Cette découverte suggère que les forêts tropicales ont été un habitat important pour les humains bien plus tôt que ce que l'on croyait. Elle soulève également des questions sur la manière dont ces environnements ont influencé l'évolution de notre espèce.
a) Carte des sites africains datés du MIS 6 (environ 130–190 ka). b) Localisation du site de Bété I. c) Séquence stratigraphique de Bété I en 2020 après échantillonnage pour la géochronologie et les analyses paléoécologiques.
Les forêts tropicales, un berceau méconnu de l'humanité
Les forêts tropicales africaines, longtemps négligées dans les récits de l'évolution humaine, pourraient avoir été un refuge pendant les périodes de changements climatiques. Les analyses de pollen et de restes végétaux confirment que le site de Bété I était situé dans une forêt dense et humide, similaire à celles que l'on trouve aujourd'hui en Afrique de l'Ouest.
Les outils découverts, adaptés à la vie en forêt, montrent que les humains avaient développé des techniques pour exploiter ces environnements. Cela remet en question l'idée que les savanes et les prairies ouvertes étaient les seuls milieux propices à l'évolution humaine.
Enfin, cette étude ouvre de nouvelles perspectives sur l'impact des humains sur les écosystèmes forestiers. Les chercheurs se demandent désormais à quel point ces premiers habitants ont modifié leur environnement, posant les bases d'une interaction durable entre l'homme et la forêt.
Pour aller plus loin: qu'est-ce que la datation des sédiments ?
La datation des sédiments est une méthode scientifique utilisée pour déterminer l'âge des couches géologiques où se trouvent des artefacts ou des fossiles. Elle repose sur l'analyse des minéraux et des éléments radioactifs présents dans le sol, comme le quartz ou les isotopes de l'uranium. Ces éléments se désintègrent à un rythme constant, ce qui permet de calculer l'âge des couches sédimentaires avec précision.
Dans le cas du site de Bété I, les chercheurs ont utilisé des techniques de datation par luminescence, qui mesurent l'énergie accumulée dans les grains de quartz au fil du temps. Cette méthode est particulièrement utile pour les sites archéologiques anciens, car elle permet de dater directement les sédiments entourant les artefacts, même en l'absence de matières organiques.
En combinant ces résultats avec l'analyse des pollens et des restes végétaux, les scientifiques ont pu reconstituer l'environnement de l'époque. Cela a confirmé que les outils en pierre retrouvés étaient bien utilisés il y a 150 000 ans dans une forêt tropicale dense, offrant ainsi une image plus complète de la vie des premiers humains dans ces milieux.